Elle est accusée d'avoir contrevenu à la loi en séparant d'office des couples de demandeurs d'asile: Inger Støjberg, ex-ministre de l'intégration du Danemark, est jugée à partir de jeudi devant une cour spéciale de justice, une procédure rarissime dans le pays scandinave.
Pendant les 36 jours d'audience, les 26 juges de la Cour spéciale, qui ne se réunit que pour juger des membres du gouvernement anciens ou présents, vont tâcher de déterminer si Inger Støjberg a violé la Convention européenne sur les droits de l'homme en ordonnant la séparation de couples de demandeurs d'asile lorsque la femme est mineure.
Si elle est déclarée coupable, Inger Støjberg devrait très certainement être condamnée à une amende, selon le professeur de droit. L'ancienne ministre de 48 ans doit témoigner à partir du 13 septembre.
En 2016, 23 couples, dont la différence d'âge était majoritairement peu importante, avaient été séparés sans examen individuel de leur dossier, en vertu de la consigne donnée par la ministre libérale qui a depuis quitté le parti sans renoncer à son siège de députée.
Parmi les 179 députés du Folketing, 139 avaient voté en faveur de l'acte d'accusation. Trente y étaient opposés et dix n'ont pas participé au vote.
Ministre de l'immigration de 2015 à 2019 dans un gouvernement centre-droit soutenu par le Parti du peuple danois (DF, droite populiste anti-immigration), Støjberg assumait la très restrictive politique d'accueil du pays et s'enorgueillit d'avoir fait adopter plus de 110 amendements restreignant les droits des étrangers.
Tenante d'une ligne anti-immigration dure, habituée à critiquer l'islam, elle avait suscité la polémique en posant avec un gâteau sur les réseaux sociaux pour fêter le 50e de ces amendements en 2017. Durant son mandat, elle avait aussi fait passer une mesure confisquant des biens de migrants pour financer leur prise en charge au Danemark.
C'est la troisième fois depuis 1910 qu'un responsable politique est renvoyé devant la Cour spéciale de justice, destinée à juger des ministres ayant commis des malversations ou négligences dans l'exercice de leurs fonctions.
Le dernier cas remonte à 1993 avec le «Tamoulgate», le gel illégal du regroupement familial des réfugiés tamouls qui avait été décidé en 1987 et 1988 par l'ancien ministre conservateur de la Justice Erik Ninn-Hansen. Ce dernier avait écopé ensuite d'une peine de quatre mois de prison avec sursis.
Au pouvoir depuis 2019, les sociaux-démocrates de Mette Frederiksen ont peu changé la très restrictive politique d'immigration du pays en vigueur sous la droite, prenant même des initiatives encore plus dures. (ats/jch)