Des pirates informatiques ont attaqué la société américaine Kaseya pour demander une rançon à potentiellement plus de 1000 entreprises à travers son logiciel.
Kaseya, qui a qualifié samedi la cyberattaque de «sophistiquée», assure qu'elle a été circonscrite «à un très petit nombre de clients».
Basée à Miami, Kaseya propose des outils informatiques aux petites et moyennes entreprises, dont l'outil VSA destiné à gérer leur réseau de serveurs, d'ordinateurs et d'imprimantes depuis une seule source. Elle revendique plus de 40 000 clients.
La première conséquence directe de l'attaque a été la fermeture de 800 magasins en Suède. Le piratage a, en effet, paralysé les caisses de Coop Suède, une des plus grandes chaînes de supermarchés du pays, qui a dû suspendre son activité samedi. Il est difficile pour l'instant d'estimer l'ampleur de cette attaque par rançongiciel.
Vendredi soir, Kaseya a expliqué s'être rendu compte d'un possible incident sur son logiciel VSA à la mi-journée sur la côte est-américaine, juste avant un week-end prolongé par un jour férié lundi.
La société estimait alors que «moins de 40 clients dans le monde» étaient affectés. Le problème? Ces derniers fournissent eux-mêmes des services à d'autres sociétés.
Selon l'entreprise spécialisée dans la sécurité informatique Huntress Labs, «plus de 1000 entreprises» ont été affectées par ce rançongiciel.
L'Agence américaine de cybersécurité et de sécurité des infrastructures (CISA) «surveille de près la situation», a indiqué Eric Goldstein, responsable pour la cybersécurité au sein de l'organisme:
La nature de l'attaque est similaire à celle utilisée avec l'éditeur de logiciels de gestion informatique Solarwinds, qui avait touché fin 2020 des organisations gouvernementales et des entreprises américaines. Sauf que cette dernière, imputée par Washington aux services secrets russes, était plutôt «dans une logique d'espionnage, alors qu'on est là dans une logique d'extorsion», souligne Gérôme Billois, expert en cybersécurité du cabinet de conseil Wavestone.
Selon Huntress Labs, à en croire les méthodes utilisées, les notes de rançongiciel et l'adresse internet fournie par les hackers, c'est un affilié au groupe de hackeurs connu sous les noms de Revil ou Sodinokibi qui serait à l'origine de ces intrusions. Début juin, le FBI avait attribué à ce groupe l'attaque informatique contre le géant de la viande JBS.
Les attaques par rançongiciel sont devenues fréquentes et les Etats-Unis ont été particulièrement frappés ces derniers mois par des assauts touchant aussi bien des grandes entreprises:
Habituellement, «les cybercriminels opèrent entreprise par entreprise», rappelle Gérôme Billois, expert en cybersécurité du cabinet de conseil Wavestone:
Il est compliqué de déterminer combien exactement, car dans ce genre de situation, les entreprises affectées perdent leur moyen de communication, ajoute Gérôme Billois. Et Kaseya, qui a demandé à ses clients d'éteindre tous leurs systèmes, ne peut pas savoir si leur système s'est éteint «de plein gré ou de force», explique-t-il.
L'attaque lancée vendredi est «l'une des plus importantes et étendues que j'ai vues dans ma carrière», estime Alfred Saikali, du cabinet d'avocat Shook, Hardy & Bacon, qui a l'habitude de traiter ce genre de situations:
Il est en général recommandé de ne pas payer la rançon, souligne Alfred Saikali. Mais parfois, en particulier quand les données ne peuvent pas être sauvegardées, «il n'y a pas le choix», reconnaît-il.
Si plusieurs entreprises choisissent de payer, il n'est pas sûr que le groupe de hackers «ait les capacités de gérer des conversations simultanées», remarque par ailleurs Brett Callow de la société spécialisée en cybersécurité Emsisoft. «Si elles doivent faire la queue pour négocier, le temps perdu peut revenir très cher». (jah/ats)