L'affaire des violences physiques et sexuelles au sein de l'établissement catholique Notre-Dame-de-Bétharram, dans le sud-ouest de la France, fait écho aux scandales de pédocriminalité secouant depuis plusieurs années dans le pays l'Eglise, qui a déploré «des faits graves».
L'établissement presque bicentenaire, avec son pensionnat à la réputation «stricte», est au cœur d'une vaste enquête sur des violences, agressions sexuelles et viols sur des enfants commis pendant des décennies.
Des «faits graves» et «en contradiction totale avec l'esprit de l'enseignement catholique», a affirmé jeudi la Conférences des évêques de France (CEF), en réaffirmant sa «détermination à agir» pour que le silence soit levé sur ce type d'actes.
Au total, le collectif de victimes de Bétharram a recensé 132 plaintes.
Mercredi, trois hommes ont été placés en garde à vue pour des «viols aggravés, agressions sexuelles aggravées et/ou violences aggravées», sur une période allant de 1957 à 2004, mais le parquet a «mis un terme» jeudi à l'interrogatoire d'un ex-prêtre nonagénaire, sans rien dire des suites de la procédure judiciaire.
Un bon observateur de l'Eglise affirme:
Ce n'est pas le seul: les dernières années ont été émaillées d'autres scandales dans des établissements catholiques.
Ainsi, 32 victimes ont été agressées au petit séminaire de Chavagnes, dans l'ouest de la France, entre 1956 et 1975.
En 2022, les Frères de Saint-Gabriel - autre congrégation enseignante - avaient reconnu des actes de pédocriminalité sur une cinquantaine de personnes, de 1950 au milieu des années 1970.
Interrogée par l'AFP, Véronique Margron, la présidente de la Conférence des religieux et religieuses de France (Corref), répond:
Avant d'ajouter:
Bétharram occupe le devant de la scène médiatique car le Premier ministre français François Bayrou est mis en cause depuis début février par plusieurs témoignages affirmant qu'il était au courant -ce qu'il dément- d'accusations entourant l'établissement où certains de ses enfants ont été scolarisés. Bayrou a été ministre de l'Education de 1993 à 1997.
«L'Etat n'a pas été au rendez-vous» dans cette affaire, a regretté vendredi la ministre de l'Education nationale Elisabeth Borne, en jugeant difficile de «comprendre pourquoi on n'a pas agi plus tôt». Elle a néanmoins déploré «une exploitation politique» de l'affaire contre François Bayrou, qui selon elle n'est pas le seul à n'avoir «pas vu ou réagi à l'époque».
L'enquête sur l'institution religieuse a été ouverte il y a un an déjà. En 1998, l'ancien directeur du collège Pierre Carricart avait été inculpé pour viol sur mineur en 1987-1988. Il avait été retrouvé mort à Rome début 2000.
En 2021, la Ciase (Commission indépendante sur la pédocriminalité dans l'Eglise catholique) avait estimé à 330.000 le nombre de mineurs victimes de violences pédophiles dans l'Eglise en France depuis 1950.
Cette dernière a depuis mis en place plusieurs dispositifs en faveur des victimes.
La Commission reconnaissance et réparation (CRR) pour les victimes dans les congrégations compétente dans le cas de Bétharram, a été saisie par 33 anciens élèves de l'établissement et a émis 20 recommandations - dont «beaucoup de dossiers dans le haut de la fourchette» financière des 60 000 euros, indique son président Antoine Garapon, en soulignant «la bonne collaboration de la congrégation».
Cela concerne «une époque ancienne» mais les conséquences sont «terribles» car «cela détruit des vies, au sens propre du terme, avec des gens devenus asociaux, alcooliques, qui ne pourront jamais se marier...» affirme-t-il à l'AFP.
«Il faut réparer des gens détruits par des actes répétés, organisés», et aussi "d'autres, victimes d'une ambiance", qui peuvent elles aussi obtenir une réparation: "un enfant qui assiste à une scène, ou qui a peur la nuit qu'il lui arrive quelque chose est déjà victime". (afp/svp)