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«J’ai saigné»: piégée dans un tournage porno, elle raconte

«C’était de la torture»: piégée sur un tournage porno, elle raconte
Fanny raconte son calvaire à visage caché.Image: watson

«C’était de la torture»: piégée dans un tournage porno, elle raconte

L’affaire French Bukkake soulève de vives questions: les plaignantes dénoncent des actes de torture, non reconnus comme circonstance aggravante par la justice. Fanny raconte ce qu'elle a vécu et comment elle compte continuer son combat.
21.03.2025, 12:0421.03.2025, 13:47
Clara WRIGHT / afp
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L’affaire «French Bukkake» oppose 32 plaignantes à la justice, qui a refusé de retenir la torture comme circonstance aggravante. Seize hommes sont renvoyés pour viols en réunion ou traite d’êtres humains. Un pourvoi a été déposé devant la Cour de cassation, dont l’audience reste à fixer. L’affaire pourrait ensuite être portée devant la Cour européenne des droits de l’homme. Fanny, l’une des victimes raconte ce qu'elle a vécu.

C'était un week-end d'octobre 2015. La plateforme pornographique French Bukkake lui avait promis un tournage avec des actes consentis. Sur place, «j’ai été torturée», affirme à l’AFP l’une des quarante plaignantes.

«Je n’ai pas été une actrice: on ne m’a pas fait signer de contrat, et surtout, une actrice joue un rôle. Tout ce qui a été montré à l’écran, la violence, les viols, je les ai vécus, il n’y a pas eu de simulation.»
Fanny

«J’ai subi une double pénétration vaginale sans en être informée» et sans «y avoir consenti», sans préservatif, raconte Fanny, alors âgée de 20 ans. Elle tournait pour «la première et unique fois». «J’ai saigné», se souvient-elle. «J’ai repoussé, pleuré. J’ai bien dit "Non" (…) mais on m’a tenue plus fort.»

La «déshumanisation» se poursuit même «hors caméra»: «on m’a servi de la carcasse de poulet au dîner, comme les chiens.»

Une violence assumée à l'écran

D’après des éléments d’enquête consultés par l’AFP, les gendarmes ont constaté, lors du visionnage du film, que l’un des dirigeants de la plateforme, surnommé «Pascal OP», enjoignait «d’user complètement» de Fanny. Une voix d'homme lui répondait:

«On va l’achever»

Les enquêteurs relèvent aussi que Fanny cherche à s’écarter, exprime sa douleur, manque plusieurs fois de vomir lors de fellations.

Malgré ce vécu, Fanny n’a pas obtenu que les circonstances aggravantes de torture et d’actes de barbarie soient retenues. Avec 31 autres parties civiles, elle a formé un pourvoi en février. La Cour de cassation va «regarder précisément si la loi a été régulièrement appliquée, ce qui n’est pas le cas», affirme Me Seydi Ba, son avocat.

Si elle rejette à son tour, il envisage de saisir la Cour européenne des droits de l’homme. «On veut nous faire un procès au rabais», s’indigne Fanny. «Je veux un vrai procès qui rachète ma dignité.»

Le malaise d’une société consommatrice de violence

Ce procès sera le premier grand procès en France traitant du porno amateur. Fanny pointe une gêne sociale:

«Toutes les classes sociales consomment du porno. C’est compliqué pour les gens de se dire que ce qui les excite, pour la grande majorité des cas, ce sont des viols.»

Il y a dix ans, elle était contactée sur les réseaux par «Axelle Vercoutre», qui se révélera être Julien D., accusé de viols sur 31 femmes. Il se faisait passer pour une actrice pour recruter des femmes. «J’ai été manipulée. Axelle m’a mise tout doucement en confiance. Je n’aurais jamais dit oui, sinon, à un film porno.»

Piégée, isolée, terrorisée et manipulée

Le jour du tournage, malgré les premières scènes où elle comprend avoir été trompée, Fanny «ne peut pas partir». «J’étais entourée d’hommes… Que m’auraient-ils fait si je leur avais dit que je voulais partir?»

Elle avait accepté en pensant que le film ne serait diffusé qu’au Canada. Quelques jours plus tard, elle commence à recevoir des messages: «Je te pensais pas comme ça…» Puis d’autres, de plus en plus nombreux.

Fanny raconte avoir fait une tentative de suicide. Elle perd son emploi, harcelée dans sa ville, sur les réseaux sociaux, jusque chez elle:

«On m’a jeté des cailloux, craché dessus… Un jour, dans le tramway, un homme m’a chuchoté qu’il m’avait reconnue et allait me séquestrer dans une cave.»

Aujourd’hui mère d’une petite fille, Fanny, 30 ans, vit dans «l’hypervigilance», souvent «pétrifiée» par sa «peur des hommes».

Du porno diffusé sur l'écran d'un parcmètre
Video: watson
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