«Bordel! Je devrais peut-être partir d'ici, ça se rapproche de plus en plus. Qu'est-ce que je vais faire?», dit une voix d'homme dans l'une des vidéos qui circulaient mardi matin sur les canaux Telegram russes. Elle montre un drone survolant la maison de la personne filmée dans la région de Moscou.
Il s'agit en effet d'un réveil, d'une sorte de test au cours duquel les Russes doivent ressentir ce qu'est la guerre, qu'ils ont l'habitude d'appeler officiellement «opération militaire spéciale» depuis plus de 15 mois et qu'ils acceptent comme quelque chose qui leur est tombé dessus de l'extérieur.
Cette question rhétorique a été lancée par le maire de Kiev, Vitali Klitschko. Dans la nuit de lundi à mardi, sa ville était encore sous le feu nourri de l'armée russe.
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Mais quelques heures plus tard, certaines rues de Moscou étaient encerclées par la police, les pompiers et les services secrets. Dans le sud-ouest de Moscou – où l'on trouve des immeubles d'habitation allant jusqu'à 25 étages, de nombreuses écoles et des centres commerciaux – les voitures s'entassaient, comme cela n'arrive guère aux premières heures d'un jour ouvrable.
Le ministère russe de la Défense a parlé d'un «acte terroriste du régime de Kiev», mais n'a pas fourni d'éléments de preuve. Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a considéré l'attaque comme une «réponse du régime de Kiev» à ce qu'il a appelé une attaque russe «contre l'un des centres de décision» en Ukraine le 28 mai. Il n'a pas précisé de quelle attaque il s'agissait. Le Kremlin se voit toujours «confirmé» par cette attaque de drone dans sa volonté de «poursuivre l'opération spéciale et d'atteindre les objectifs fixés». Peskov n'a vu «aucun danger» pour Moscou et ses habitants.
1) Parmi les drones ukrainiens qui ont attaqué Moscou ce matin il y en a un qui intrigue davantage que les autres : le Castor. Révélé par l'influenceur ukrainien Ihor Lashen au début de mois de mai, il s'agirait d'un appareil kamikaze avec une forme et un vol particulier. pic.twitter.com/b3OsQVtdIL
— Bogdan BODNAR (@bogdandebodnar) May 30, 2023
Kiev a démenti son implication dans l'attaque de drones et a réagi par la dérision: «Il se peut que les drones russes veuillent retourner à leurs expéditeurs», a déclaré le conseiller présidentiel ukrainien Mykhaïlo Podoliak dans une émission du journaliste russe indépendant Alexandre Plychtchev.
Attaques de drones sur Moscou - © Chappatte dans @LeTemps , Genève > https://t.co/61P2XtfX94 pic.twitter.com/qvAHGOoA9u
— Dessins de Chappatte (@chappatte) May 30, 2023
Huit drones auraient été utilisés, selon Moscou. «Trois d'entre eux ont perdu le contrôle et se sont écartés des objectifs visés», a indiqué le ministère russe de la Défense dans un communiqué. Cinq autres drones auraient été abattus par la défense antiaérienne russe.
Certaines sources non confirmées ont mentionné jusqu'à 32 objets volants. L'un des lieux où un drone apparemment abattu s'est écrasé et a explosé se trouve à quelques kilomètres à vol d'oiseau de Novo-Ogaryovo la résidence en banlieue du président russe Vladimir Poutine.
Videos verified by The New York Times show evidence of four drone attacks on Moscow on Tuesday, the first attack to hit civilian areas in the Russian capital. https://t.co/t8mPgsuMVL pic.twitter.com/qKGnT8eivQ
— The New York Times (@nytimes) May 30, 2023
Le maire de Moscou a joué l'apaisement. A peine les premiers débris des drones avaient-ils été retrouvés dans les rues de Moscou et les habitants des maisons environnantes évacués qu'il écrivait sur son canal Telegram que les dégâts étaient «mineurs». Le député de la Douma Andreï Kartapolov, responsable de la défense au Parlement, a appelé au calme. Selon lui, l'attaque est:
Le vice-président de la Douma, Piotr Tolstoï, un furieux partisan de la guerre a appelé à la «mobilisation de toutes les forces». Pour stopper les «tirs sur Moscou», il faut «prendre Kiev». Le gouverneur de la région frontalière de Belgorod, régulièrement bombardée et attaquée il y a une semaine par des combattants russes pro-ukrainiens, avait déjà tenu des propos similaires. La région de Kharkiv doit être rattachée à la région de Belgorod, et les attaques cesseront alors également, avait-il déclaré.
Il est pour l'instant impossible de dire avec certitude d'où les drones ont décollé et de quels types de drones, il s'agit exactement. L'objectif est toutefois clair: les attaques doivent créer de l'insécurité au sein de la population russe et – comme l'attaque de drones contre le Kremlin il y a quatre semaines – montrer la vulnérabilité de Moscou.
Mais de nombreuses personnes ne sont pas conscientes du danger. Une Moscovite interrogée par la télévision d'Etat russe s'étonne:
Dans le centre de la ville, les gens se promènent tranquillement sous le soleil. «Je n'ai rien à voir avec la politique», disent-ils. Ou encore: «Tout cela est bien loin de moi.»
Traduit et adapté par Noëline Flippe