Ils sont quasiment invisibles, atteignent leurs cibles à des centaines de mètres et sèment la terreur parmi les occupants: les tireurs d'élite prennent de plus en plus d'importance dans la lutte de l'Ukraine contre l'armée russe. Ces soldats spécialement formés et équipés semblent viser tout particulièrement les officiers supérieurs de Poutine.
👉 Suivez en direct la guerre contre l'Ukraine 👈
«Si vous êtes en train de vous préparer à une attaque et que soudain votre commandant disparaît, toute l'unité se retrouve perdue», explique Robert Scales, expert militaire américain et général de l'armée à la retraite, au Wall Street Journal.
Les artilleurs expérimentés, dont les compétences sont difficiles à remplacer, sont également des cibles stratégiques.
Les officiers russes constituent des cibles particulièrement faciles pour les Ukrainiens, selon Robert Scales, car ils sont aisément reconnaissables de loin à leur uniforme et même à leurs bottes. Dans l'armée russe, seuls les officiers ayant suivi une formation académique accèdent à des postes de commandement. Dans les armées occidentales, les sous-officiers qui se sont distingués par leurs performances en service ou au combat peuvent également prendre le commandement.
L'armée ukrainienne a aussi adopté ce principe, car il permet de prendre des décisions plus rapidement et offre ainsi des avantages sur le champ de bataille. Du côté russe, les commandants sur le terrain doivent en revanche toujours se concerter avec des officiers supérieurs qui se trouvent dans des postes de commandement loin derrière le front.
Le soldat ukrainien a lui-même été tireur d'élite et forme désormais d'autres soldats à cette pratique. Kiev ne veut désormais plus seulement envoyer au front des tireurs d'élite expérimentés, mais aussi de simples soldats ayant suivi une formation continue et disposant de l'équipement adéquat.
Le tireur est généralement accompagné d'un éclaireur qui repère les cibles à l'aide de jumelles et vérifie si le tireur a atteint sa cible. En tenue de camouflage et protégés par la nuit, toujours à l'affût des mines russes, les équipes de tireurs s'approchent ensuite des positions ennemies.
L'Ukraine a appris la valeur des tireurs d'élite équipés de fusils de précision occidentaux dans la bataille pour Bakhmout. Depuis le début de l'année, une unité de 20 tireurs d'élite, qui se nomment eux-mêmes les «fantômes de Bakhmout», opère dans cette ville de l'est du pays. Selon leurs propres déclarations, ils ont tué 524 occupants russes entre janvier et juillet. Ce chiffre n'est toutefois pas vérifiable.
Les tireurs à distance de Kiev peuvent également faire valoir leurs avantages sur le terrain plat et ouvert du sud de l'Ukraine, où se déroulent actuellement les combats les plus violents. Mais là aussi, ils doivent être particulièrement prudents, car à la moindre erreur de camouflage, les drones peuvent les repérer – et s'en suit alors une violente riposte: «Les hélicoptères de combat tirent, les obus d'artillerie s'abattent, et les Russes changent soudainement de position», raconte une tireuse dont le nom de code est «Coucou».
Un tireur d'élite entraîné et équipé d'un bon fusil de précision peut toucher des ennemis à une distance de 1200 à 1500 mètres. Jusqu'à présent, le tir le plus lointain a été réalisé par un soldat ukrainien en novembre dernier. Il aurait tué un occupant à plus de 2,7 kilomètres de distance, selon l'armée ukrainienne. Il s'agirait de la deuxième frappe la plus lointaine jamais enregistrée. Seul le tireur d'élite canadien – nom de code «Wali» – aurait frappé depuis une plus grande distance encore – plus de 3,5 kilomètres, en Irak en 2017. Il n'a toutefois pas été possible de vérifier ces données de manière indépendante.
Pourtant, tous les soldats ne sont pas aptes à servir comme tireurs d'élite. La charge psychologique de presser la détente et de voir quelqu'un mourir à travers la lunette de visée est très lourde. La tireuse «Coucou» établit une distance émotionnelle avec ses victimes: «Je ne vois pas leur visage ni les sentiments qu'ils expriment», explique-t-elle au Wall Street Journal. Elle conclut:
(t-online, mk)
Interprété de l'allemand par Tanja Maeder