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Iran: pourquoi les sanctions économiques n'ont pas d'effet

Iran: pourquoi les sanctions économiques n'ont pas d'effet
Il n'existe pratiquement aucun secteur de l'économie iranienne, y compris l'armée, qui ne soit pas soumis à des sanctions.Keystone

L'Iran a trouvé comment contourner les sanctions occidentales

L'Iran est soumis à de lourdes sanctions de la part des Etats-Unis et de l'Europe. Mais la République trouve des moyens de les contourner, notamment en effectuant des transactions pétrolières en haute mer.
05.05.2024, 06:59
Michael Wrase, Beyrouth / ch media
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Plus de 3600 sanctions, selon les calculs des experts, ont été imposées à ce jour par le monde occidental à l'Iran. Ce moratoire a commencé en 1979, lorsque les Etats-Unis ont gelé tous les avoirs iraniens sur leur territoire, après l'occupation de l'ambassade américaine à Téhéran pendant 444 jours et ont décrété une interdiction de commerce de biens et de services qui dure encore aujourd'hui.

45 ans plus tard, il n'existe pratiquement aucun secteur de l'économie iranienne, y compris l'armée, qui ne soit pas soumis à des sanctions. Dans le même temps, l'UE a également introduit des mesures de coercition de grande envergure, dont les objectifs n'ont pas été atteints à ce jour.

Les sanctions n'ont pas entraîné la chute du régime de Téhéran, comme l'auraient souhaité les Etats-Unis. Au contraire, l'Iran est devenu la première puissance militaire régionale – après Israël – au Proche et au Moyen-Orient. Le pays ne se contente pas de produire des missiles et des drones équipés de composants occidentaux, il les exporte désormais dans plus de 20 pays.

La Turquie et les EAU rompent les sanctions

Le principal client est la Russie, qui utilise quotidiennement des drones iraniens contre l'Ukraine. Malheureusement, l'efficacité des sanctions a été extrêmement limitée, regrette Michel Duclos, ancien ambassadeur de France et conseiller géopolitique du groupe de réflexion Institut Montaigne. Selon lui, la République islamique a toujours trouvé des moyens de contourner les sanctions.

D'après Meir Litvak, spécialiste israélien de l'Iran, les principaux contrevenants aux sanctions sont la Chine, la Turquie, l'Inde, les Emirats arabes unis et la Russie. Le régime de Poutine avait déjà aidé l'Iran à contourner les sanctions avant l'attaque contre l'Ukraine. Après l'agression, c'est désormais Téhéran qui explique aux dirigeants de Moscou comment se jouer de l'Occident.

Tant la Russie que l'Iran utilisent toute une série de sociétés fictives et d'institutions financières à Dubaï. Le business est en plein essor. Jusqu'à 40 avions gros porteurs d'Emirates Airlines volent chaque semaine entre les Emirats et Moscou et Saint-Pétersbourg, transportant jusqu'en novembre dernier relativement librement des marchandises figurant sur les listes de sanctions, principalement de l'électronique.

Depuis lors, les Etats-Unis ont accentué la pression sur Dubaï et sanctionné certains prestataires de services financiers locaux. Les compagnies aériennes iraniennes desservant Dubaï seraient également soumises à des contrôles plus stricts.

Le pétrole fait rentrer des milliards dans les caisses

S'y ajoutent des centaines de bateaux de transport arabo-persans. Généralement peu contrôlés, ils font la navette entre les émirats et la côte iranienne, distante de seulement 100 kilomètres. C'est en haute mer que les Iraniens font leurs meilleures affaires. Jusqu'à 265 pétroliers iraniens sillonnent les mers du globe pour, selon Armen Azizian, expert en sanctions auprès de la société britannique de développement de logiciels Vortexa, pomper leurs cargaisons sur d'autres navires en désactivant leurs balises de localisation.

Les clients, rapporte le Oil & Gas Journal, sont surtout les plus de 40 raffineries moyennes et petites de Chine, qui auraient acheté chaque jour jusqu'à 1,3 million de barils de pétrole brut d'Iran au cours des trois premiers mois de l'année - avec une réduction de prix de 13 dollars par baril.

Selon son ministre du pétrole Javad Owij, l'Iran a réalisé 35 milliards de dollars d'exportations de pétrole l'année dernière. En faisant pression sur la Chine, les Etats-Unis pourraient réduire le flux de devises, mais semblent hésiter à le faire.

«Surtout en année électorale, le président américain Joe Biden attache une grande importance à la baisse des prix du pétrole, à laquelle contribuent également les exportations iraniennes.»
Robert McNally, président du Rapidan Energy Group

Une réduction marquée des exportations iraniennes pourrait entraîner une hausse du prix du pétrole - et donc du prix de l'essence aux Etats-Unis.

Dans un premier temps, la baisse des exportations de pétrole n'aurait pas grande conséquences pour le régime iranien. La population iranienne, dont environ 40% vit déjà au seuil ou en dessous du seuil de pauvreté, en souffrirait. Elle le ressent immédiatement lorsque le régime de Téhéran fait tourner la planche à billets pour combler les déficits et fait ainsi grimper l'inflation. En avril, selon le Fonds monétaire international, les biens étaient 37,5% plus chers en Iran qu'un an auparavant. (aargauerzeitung.ch)

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L'attaque du Hamas contre Israël, en images
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source: ap / tsafrir abayov
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