Une mesure phare du président américain Joe Biden visant à annuler une partie de la colossale dette étudiante a semblé en péril mardi lors d'une audience devant la très conservatrice Cour suprême des Etats-Unis.
Une majorité de ses magistrats ont paru penser que le gouvernement démocrate avait outrepassé ses pouvoirs en adoptant ce programme coûteux sans autorisation explicite du Congrès.
Au début de la pandémie, l'administration du président républicain Donald Trump avait gelé le remboursement de ces emprunts en vertu d'une loi de 2003 permettant de «soulager» les détenteurs de dette étudiante en cas d'«urgence nationale». Cette mesure a été reconduite sans interruption jusqu'ici.
A la fin août, le président Biden, qui se présente en champion des classes populaires, a voulu aller plus loin: il a annoncé effacer 10 000 dollars de l'ardoise des emprunteurs gagnant moins de 125 000 dollars par an, et 20 000 dollars pour les anciens boursiers.
Les candidats se sont précipités et 26 millions de dossiers ont été déposés, selon la Maison Blanche, qui estime la facture globale pour l'Etat à plus de 400 milliards de dollars.
La justice a toutefois bloqué la mise en oeuvre de ce plan après avoir été saisie par une coalition d'Etats républicains, mais aussi par deux étudiants non éligibles aux 20 000 dollars d'annulation.
Les plaignants accusent l'administration démocrate d'avoir engagé l'argent du contribuable sans l'accord du Congrès. Pour eux, la loi de 2003 couvre le gel de la dette, et non son annulation.
La fin de l'état d'urgence sanitaire «ne change pas la justification légale du programme (...): des millions d'emprunteurs ont été fragilisés par la pandémie et risquent de se trouver en défaut de paiement», a de son côté ajouté une porte-parole de la Maison Blanche, Olivia Dalton, dans des commentaires à la presse.
La haute juridiction a déjà infligé plusieurs revers à l'administration démocrate, invalidant des mesures prises pour bloquer les expulsions locatives pendant la pandémie ou obliger certaines populations à se vacciner.
Pour éviter un nouveau camouflet, le gouvernement plaide que les plaignants n'étaient pas en droit de saisir la justice puisqu'ils n'ont «subi aucun préjudice».
Les trois juges progressistes penchent plutôt du côté d'un rejet de la plainte, avec une oreille réceptive de leur consoeur conservatrice Amy Coney Barrett.
Si la haute Cour ne suit pas cette voie, elle pourrait au contraire profiter de ce dossier pour réaffirmer que les agences fédérales et le gouvernement ne peuvent pas agir sur les sujets les plus importants sans un feu vert du Congrès.
«Cela poserait un problème pour la capacité du gouvernement fédéral à opérer», a mis en garde la juge progressiste Ketanji Brown Jackson, alors que plusieurs de ses collègues semblaient tentés par cette option.
La Cour rendra sa décision d'ici au 30 juin. (ats/jch)