La fermeture des dernières bases françaises au Mali prendra de «4 à 6 mois» a déclaré, jeudi, Emmanuel Macron en annonçant le retrait des militaires français, européens et canadiens de ce pays dirigé par une junte militaire. La Mission de l'ONU au Mali, forte de plus de 13 000 Casques bleus sera maintenue.
«Pendant ce temps (...) nous allons continuer d'assurer les missions de sécurisation de la Minusma», qui continuera de bénéficier d'un soutien aérien et médical français sur place, avant le transfert ultérieur de ces moyens, a-t-il assuré.
Résumé de la situation en 4 points👇
Après neuf ans de lutte antidjihadiste, la France et ses partenaires européens retirent officiellement leurs troupes militaires présentes au Mali. La raison? Les diverses «obstructions» de la junte au pouvoir et une divergence de stratégie.
«En raison des multiples obstructions, des autorités de transition maliennes, le Canada et les Etats européens opérant aux côtés de l'opération (française) Barkhane et au sein de la Task Force Takuba estiment que les conditions ne sont plus réunies pour poursuivre efficacement leur engagement militaire actuel (...) au Mali et ont donc décidé d'entamer le retrait coordonné du territoire malien de leurs moyens militaires respectifs dédiés à ces opérations», soulignent-ils dans une déclaration conjointe.
D'après Emmanuel Macron, les autorités maliennes ont recours à «des mercenaires de la société Wagner» aux «ambitions prédatrices». Les autorités maliennes continuent de nier la présence de ces mercenaires sur leur territoire.
Paris et ses partenaires souhaitent toutefois «rester engagés dans la région» sahélienne et «étendre leur soutien aux pays voisins du Golfe de Guinée et d'Afrique de l'Ouest» pour contenir la menace djihadiste. Les «paramètres» de cette réorganisation seront arrêtés «d'ici juin 2022», selon une déclaration commune.
«Nous comprenons cette décision», a déclaré Macky Sall dans une conférence de presse commune avec le président Emmanuel Macron. «La lutte contre le terrorisme au Sahel ne saurait être la seule affaire des pays africains (...). Nous sommes heureux que l'engagement ait été renouvelé de rester dans la région et de réarticuler le dispositif», a-t-il ajouté, alors que le départ français risque potentiellement d'ouvrir des perspectives aux djihadistes.
Le Sahel et le Golfe de Guinée sont des «priorités de la stratégie d'expansion» des organisations djihadistes Al-Qaïda et État islamique, a souligné Emmanuel Macron.
Présente militairement depuis 2013 au Mali, la France est d'abord intervenue pour enrayer la progression des groupes islamistes radicaux menaçant Bamako. Elle a ensuite mis sur pied une vaste opération régionale, Barkhane, déployant des milliers de soldats pour lutter contre les franchises locales d'Al-Qaïda et du groupe État islamique.
Mais malgré des victoires tactiques, le terrain n'a jamais été véritablement repris par l'État malien et ses forces armées. Le chef de l'État «récuse complètement» l'idée d'un échec français au Mali, a-t-il réagi jeudi.
«Que se serait-il passé en 2013 si la France n'avait pas fait le choix d'intervenir? Vous auriez à coup sûr un effondrement de l'Etat malien», a-t-il fait valoir, en ajoutant qu'«ensuite nos militaires ont obtenu de nombreux succès», dont l'élimination de l'émir d'al-Qaïda au Maghreb Islamique en juin 2020.
Quelque 25 000 hommes sont actuellement déployés au Sahel, dont environ 4300 Français (2400 au Mali dans le cadre de Barkhane), selon l'Élysée. Le pays accueille aussi 15 000 soldats de l'ONU au sein de la Minusma.
Le Mali était au cœur du dispositif antiterroriste français et européen au Sahel. Aujourd'hui, et dans l'effort de rendre la présence française moins visible, les militaires européens seront repositionnés, notamment au Niger qui héberge déjà une base aérienne et 800 militaires français.
Des militaires européens participant au groupement de forces spéciales Takuba «seront repositionnés aux côtés des forces armées nigériennes dans la région frontalière du Mali», a-t-il précisé.
Durant l'été 2021, Emmanuel Macron avait déjà décidé d'amorcer une réduction des effectifs français au profit d'un dispositif régional moins visible. Aujourd'hui, ce départ contraint force Paris à accélérer cette réorganisation dans d'autres pays de la région menacés par la contagion djihadiste.
«Nous définirons dans les semaines et mois qui viennent l'appui que nous apporterons à chacun des pays de la région sur la base des besoins qu'ils auront exprimés, et cet appui pourra inclure de l'aide en matière de formation et d'entraînement, de la fourniture d'équipements, voire un appui à leurs opérations contre le terrorisme», a conclu Emmanuel Macron. (ari/ats)