Un tribunal de Moscou a commencé à examiner en appel la condamnation de Navalny pour «escroquerie». Bien qu'il soit emprisonné depuis janvier 2021, le farouche opposant politique n'a jamais cessé de dénoncer la propagande du maître du Kremlin.
Entamé mardi, le procès a finalement été renvoyé au 24 mai. Environ une heure après le début de l'audience, le tribunal a annoncé que le procès était prorogé d'une semaine à la demande d'Alexeï Navalny. Ce dernier a déclaré vouloir prendre connaissance de l'enregistrement audio de son jugement pour le comparer avec sa version écrite.
Il a par ailleurs précisé que sa famille avait obtenu un droit de visite pour vendredi et qu'il ne voulait pas rater ce parloir.«On va m'envoyer dans une colonie à régime sévère et ce rendez-vous presse», a-t-il observé. «Le 24 (mai), vous pourrez parfaitement me condamner et je partirai en régime sévère», a-t-il ironisé.
Pour le moment, Navalny est détenu dans une colonie dite en régime «normal». Or, si le verdict de première instance est confirmé en appel, il devrait rejoindre un pénitencier en régime «sévère» où les conditions de détentions sont plus rudes.
L'opposant comparaissait par visioconférence depuis la colonie pénitentiaire numéro 2 de Pokrov, à une centaine de kilomètres à l'est de Moscou.
Navalny est apparu enfermé dans une cage, en uniforme de prisonnier, selon les images diffusée dans la salle d'audience du tribunal.👇
Accusé d'avoir détourné des millions de roubles de dons, versés à ses organisations de lutte contre la corruption, Nalvany a été condamné pour «escroquerie» ainsi que pour «outrage à magistrat». Ecopant, de ce fait, de neuf ans de prison.
Cette peine infligée le 22 mars au charismatique militant anticorruption comprend celle prononcée un an plus tôt, en mars 2021, pour «fraude».
Alexeï Navalny avait été arrêté en janvier 2021, à son retour de Berlin, où il avait passé plusieurs mois en convalescence après un empoisonnement par un agent innervant.
Sitôt remis sur pied, Navalny a déclaré publiquement qu'il tenait le président russe Vladimir Poutine pour responsable. Accusation catégoriquement démentie par l'intéressé. Aucune enquête n'a toutefois été ouverte.
Quoi qu'il en soit, l'arrestation a marqué le point de départ de l'accélération d'une vaste répression de tous les mouvements anti-Kremlin et médias indépendants en Russie.
Depuis le lancement de l'assaut militaire russe contre l'Ukraine, le 24 février, l'opposant n'a pas mâché ses mots, dénonçant une «guerre». Un terme loin d'être anodin! En effet, il est rigoureusement interdit par le droit russe pour décrire l'offensive, «destinée à détourner l'attention des citoyens russes des problèmes intérieurs», selon Navalny.
Mi-avril, le principal critique du Kremlin a qualifié de «mensonges» les sondages selon lesquels la popularité de Vladimir Poutine était en hausse depuis le début de l'offensive.
L'opposant a également appelé les géants numériques occidentaux à ouvrir un «front de l'information» pour «écraser la propagande de Poutine».
Depuis le début du conflit, il est de plus en plus dur d'être opposant en Russie. Les autorités n'ont eu de cesse de durcir le ton, les pressions et leur arsenal juridique pour contrôler la communication sur le conflit. Les menaces de peines vont jusqu'à 15 ans de prison pour la diffusion de «fausses informations» sur l'armée russe.
Depuis juin 2021, les principales organisations d'AlexeÏ Navalny ont été qualifiées d'«extrémistes» par la justice.
Décision qui a entraîné leur fermeture et des poursuites contre nombre de leurs militants. Beaucoup d'entre eux sont désormais en exil. Fin janvier, Navalny a lui-même été placé sur la liste des «terroristes et extrémistes». Sarcastique, il avait dit en septembre à ses soutiens de ne pas s'inquiéter pour lui, car il serait «libre au plus tard au printemps 2051.» (mbr/ats)