Un nom qui fleure bon le scandale: «McKinsey Gate». Encore inconnu du grand public il y a quelques mois, il s’est imposé dans le débat politique. Cette semaine, on l'a vu surgir sans arrêt sur les réseaux sociaux. D'aucuns spéculent déjà que cette ébauche de scandale pourrait fragiliser Emmanuel Macron, à deux semaines du premier tour de la présidentielle. Voire, même, impacter sur le résultat de l'élection.
Alors voici les 5 choses à savoir pour comprendre la polémique qui remue nos voisins français.
Ou plutôt, c'est quoi? McKinsey est une entreprise américaine. 600 salariés et 300 millions d'euros de chiffre d'affaires en France, précise le Canard enchaîné.
Ce cabinet de conseil a été mandaté à de maintes reprises par le gouvernement français pour différentes «missions de conseil». Il a notamment particulièrement oeuvré pendant la pandémie. Selon Le Monde, pas moins de 13 millions d'euros ont été déboursés pour s'offrir les précieux conseils du cabinet sur la vaccination, les tests, le passe sanitaire, ou même les scénarios de reprise des transports publics, une fois le confinement terminé.
Outre le Covid, l'entreprise a également prêté main forte à l'administration française pour différents projets de réformes, dont celle des retraites, ou encore des aides au logement, l'assurance chômage, ainsi que les pensions alimentaires. Là encore, la facture s'est élevée à plusieurs millions d'euros.
L'entreprise a été associée à certains des projets les plus importants du quinquennat d'Emmanuel Macron. Toujours selon Le Monde, McKinsey a effectué au moins une quarantaine de missions pour le compte du gouvernement, entre 2018 et 2021, pour un coût compris entre 28 et 50 millions d’euros.
Il existe donc des liens irréfutables entre l'entreprise et le président français, même si le cabinet américain avait aussi oeuvré précédemment pour le gouvernement de Nicolas Sarkozy ou de François Hollande.
La société est soupçonnée par le Canard enchaîné d'avoir joué un rôle dans la campagne présidentielle de 2017. Tout du moins, il ne s'agit pas d'un rôle officiel, précise le Monde. Il est avéré que plusieurs consultants cabinet s’y sont investis à titre bénévole. Après la victoire, certains d'entre eux ont rejoint des postes d’influence au sein de la macronie.
Toute la polémique est partie d'un rapport d'enquête publié par le Sénat, le 17 mars 2022.
Cette enquête s'est penchée sur l'emprise grandissante des cabinets de conseil, dont fait partie McKinsey, sur l'appareil d'Etat français. En effet, cette influence croissante entraînerait un coût considérable pour les finances publiques.
Le rapport d'enquête a mis ainsi le doigt sur plusieurs faits particulièrement problématiques:
Selon 20 Minutes, le mécanisme utilisé par le cabinet pour réduire ses impôts est connu et assez fréquemment employé par les multinationales: le «prix de transfert».
Ce mécanisme est légal, dans la mesure où le groupe n’en abuse pas. Il s'agira à présent de déterminer dans quelle mesure les prestations facturées par le cabinet l'ont été correctement, «à leur juste valeur». Si ce n'est pas le cas, McKinsey pourrait s'être rendu coupable de fraude fiscale.
Quant à la charge de «suspicion de faux témoignage», ce sera au procureur de la République de décider d’engager ou non des poursuites contre le dirigeant de l’entreprise accusé d'avoir menti.
Le sujet est politiquement sensible pour le gouvernement, qui a multiplié les contrats avec la société de conseil incriminée ces dernières années. Et il l'est plus encore pour le président sortant, dont l'étiquette de «président des riches» colle à la peau.
Soupçonné de favoritisme envers McKinsey, Macron a bien été obligé de répondre à ses détracteurs sur France 3, le 27 mars dernier, pour faire retomber le soufflé:
«Donc tout est clair là-dessus?», insiste le journaliste. Pour le président, cela ne fait aucun doute. Mettant au défi ceux qui affirment le contraire de lancer une action en justice, Macron a conclu: «Que quiconque a la preuve d’une manipulation mette le contrat en cause au pénal.»
Toutefois, derrière la fermeté et l'assurance affichée, un conseiller d'Emmanuel Macron s'est quand même plaint auprès d'Europe1 que les oppositions «ont réussi à faire de cette affaire un sujet de campagne». Un autre conseiller a confirmé: «Désormais, les oppositions nous collent ça comme un sparadrap.»
Si des membres de l'entourage du président ne s'émeuvent pas de ce début de polémique, qui, selon eux, «agite le microcosme», «sans toucher l’opinion», cela n'empêche pas Macron d'être «prudent, car tout peut basculer», conclut un proche.