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Présidentielle 2022

«McKinsey gate»: l'affaire qui pourrait fragiliser Emmanuel Macron

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C'est quoi le «McKinsey gate», cette affaire qui pourrait nuire à Macron?

epa07143397 French President Emmanuel Macron delivers a speech during the economic event 'Choose Grand Est' in Pont-a-Mousson, France 05 November 2018. Macron is currently on a six-day tour  ...
La collaboration entre le président français et une société américaine pourrait coûter cher au président sortant. Image: EPA AFP POOL
Depuis quelques jours, les réseaux sociaux bruissent de ce mystérieux nom aux consonances anglophones: «McKinsey». Alors que la présidentielle approche à grands pas, l'affaire pourrait éclabousser le président sortant. Résumé en 5 points.
31.03.2022, 20:3001.04.2022, 06:56
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Un nom qui fleure bon le scandale: «McKinsey Gate». Encore inconnu du grand public il y a quelques mois, il s’est imposé dans le débat politique. Cette semaine, on l'a vu surgir sans arrêt sur les réseaux sociaux. D'aucuns spéculent déjà que cette ébauche de scandale pourrait fragiliser Emmanuel Macron, à deux semaines du premier tour de la présidentielle. Voire, même, impacter sur le résultat de l'élection.

Alors voici les 5 choses à savoir pour comprendre la polémique qui remue nos voisins français.

C'est qui «McKinsey»?

Ou plutôt, c'est quoi? McKinsey est une entreprise américaine. 600 salariés et 300 millions d'euros de chiffre d'affaires en France, précise le Canard enchaîné.

Ce cabinet de conseil a été mandaté à de maintes reprises par le gouvernement français pour différentes «missions de conseil». Il a notamment particulièrement oeuvré pendant la pandémie. Selon Le Monde, pas moins de 13 millions d'euros ont été déboursés pour s'offrir les précieux conseils du cabinet sur la vaccination, les tests, le passe sanitaire, ou même les scénarios de reprise des transports publics, une fois le confinement terminé.

Outre le Covid, l'entreprise a également prêté main forte à l'administration française pour différents projets de réformes, dont celle des retraites, ou encore des aides au logement, l'assurance chômage, ainsi que les pensions alimentaires. Là encore, la facture s'est élevée à plusieurs millions d'euros.

Quel rapport avec Emmanuel Macron?

L'entreprise a été associée à certains des projets les plus importants du quinquennat d'Emmanuel Macron. Toujours selon Le Monde, McKinsey a effectué au moins une quarantaine de missions pour le compte du gouvernement, entre 2018 et 2021, pour un coût compris entre 28 et 50 millions d’euros.

Il existe donc des liens irréfutables entre l'entreprise et le président français, même si le cabinet américain avait aussi oeuvré précédemment pour le gouvernement de Nicolas Sarkozy ou de François Hollande.

La société est soupçonnée par le Canard enchaîné d'avoir joué un rôle dans la campagne présidentielle de 2017. Tout du moins, il ne s'agit pas d'un rôle officiel, précise le Monde. Il est avéré que plusieurs consultants cabinet s’y sont investis à titre bénévole. Après la victoire, certains d'entre eux ont rejoint des postes d’influence au sein de la macronie.

Du coup, c'est quoi le problème?

Toute la polémique est partie d'un rapport d'enquête publié par le Sénat, le 17 mars 2022.

Cette enquête s'est penchée sur l'emprise grandissante des cabinets de conseil, dont fait partie McKinsey, sur l'appareil d'Etat français. En effet, cette influence croissante entraînerait un coût considérable pour les finances publiques.

Le rapport d'enquête a mis ainsi le doigt sur plusieurs faits particulièrement problématiques:

  • McKinsey n'a payé aucun impôt entre 2011 et 2020 sur ses sociétés en France, malgré un chiffre d'affaires de plus de 300 millions d'euros. «Un exemple caricatural d’optimisation fiscale», selon les mots de la commission d’enquête.
  • Entre outre, le Sénat a saisi la justice pour «suspicion de faux témoignage» contre un dirigeant d’une filiale française de McKinsey. Interrogé mi-janvier par la commission d'enquête, l'intéressé avait juré que le cabinet avait bien payé l’impôt sur ses sociétés en France... contrairement à ce qu'affirme le rapport final de l'enquête, qui conclut que l'entreprise n'a pas versé un centime pendant près de 10 ans.

Que risque le cabinet?

Selon 20 Minutes, le mécanisme utilisé par le cabinet pour réduire ses impôts est connu et assez fréquemment employé par les multinationales: le «prix de transfert».

C'est quoi, le «prix de transfert»?
Ce système, qui permet à une entreprise de réduire considérablement ses impôts, consiste à facturer des biens ou des services à ses filiales situées à l'étranger, dans des territoires moins avantagés fiscalement. Ce «prix de transfert» constitue donc une charge pour les filiales et réduit leurs bénéfices... et, en bout de course, leur résultat fiscal. En réduisant leur résultat fiscal, les filiales font ainsi diminuer le montant de leur imposition.
Selon Vincent Drezet, fiscaliste et analyste interrogé par 20 Minutes, les «prix de transfert» ont un impact «colossal» dans le commerce mondial. Elles en représenteraient près de la moitié.

Ce mécanisme est légal, dans la mesure où le groupe n’en abuse pas. Il s'agira à présent de déterminer dans quelle mesure les prestations facturées par le cabinet l'ont été correctement, «à leur juste valeur». Si ce n'est pas le cas, McKinsey pourrait s'être rendu coupable de fraude fiscale.

Quant à la charge de «suspicion de faux témoignage», ce sera au procureur de la République de décider d’engager ou non des poursuites contre le dirigeant de l’entreprise accusé d'avoir menti.

Et que risque Macron?

Le sujet est politiquement sensible pour le gouvernement, qui a multiplié les contrats avec la société de conseil incriminée ces dernières années. Et il l'est plus encore pour le président sortant, dont l'étiquette de «président des riches» colle à la peau.

Soupçonné de favoritisme envers McKinsey, Macron a bien été obligé de répondre à ses détracteurs sur France 3, le 27 mars dernier, pour faire retomber le soufflé:

«On a l’impression qu’il y a des combines, c’est faux. Il y a des règles de marchés publics. La France est un pays de droit»

«Donc tout est clair là-dessus?», insiste le journaliste. Pour le président, cela ne fait aucun doute. Mettant au défi ceux qui affirment le contraire de lancer une action en justice, Macron a conclu: «Que quiconque a la preuve d’une manipulation mette le contrat en cause au pénal.»

Toutefois, derrière la fermeté et l'assurance affichée, un conseiller d'Emmanuel Macron s'est quand même plaint auprès d'Europe1 que les oppositions «ont réussi à faire de cette affaire un sujet de campagne». Un autre conseiller a confirmé: «Désormais, les oppositions nous collent ça comme un sparadrap.»

«Il n’y a pas une interview sans que l’on soit interrogé sur le sujet. On a beau répondre à chaque fois, ça ne suffit pas à éteindre la polémique»

Si des membres de l'entourage du président ne s'émeuvent pas de ce début de polémique, qui, selon eux, «agite le microcosme», «sans toucher l’opinion», cela n'empêche pas Macron d'être «prudent, car tout peut basculer», conclut un proche.

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