Patrons des plus grandes entreprises russes et étrangères, chefs d'Etat et dirigeants politiques en provenance de plus de 120 pays du monde. D'ordinaire, le Forum économique international de Saint-Pétersbourg (Spief) est un rendez-vous majeur. Les spécialistes l'ont d'ailleurs toujours surnommé le «Davos russe», en référence à son grand frère, le World economic forum (WEF).
Pour vous faire une idée encore plus précise de l'ampleur de la manifestation, c'est au Spief qu'Emmanuel Macron et Vladimir Poutine avaient eu, en 2018, l'un des échanges diplomatiques à la fois le plus tendu et le plus brillant sur la sécurité du monde moderne. A l'époque, le mot d'ordre (dans la bouche du président de la République) était: «La confiance au cœur de la relation économique entre la France et la Russie».
Rappelez-vous, les sourires et les petites piques aiguisés:
En 2022, changement de programme. La guerre en Ukraine a évidemment fait perdre quelques points de prestige au forum qui fête, jusqu'à samedi, sa 25e édition. Les pays occidentaux ont logiquement boudé la sauterie et, au lieu des habituelles 120 délégations, seuls 40 Etats, dont l'Egypte (invitée d'horreur), se sont déplacés à Saint-Pétersbourg. En clair: pas de Macron et encore moins de Cassis, cette année.
Le discours de Vladimir Poutine était d’ailleurs très attendu, ce vendredi. Repoussé d'une heure en raison d'un risque de cyberattaque, le speech du président russe a finalement résonné sur la scène après un tonnerre d’applaudissements.
Forum Économique International de Saint-Pétersbourg _ SPIEF
— Christ_essis (@Christ_essis) June 17, 2022
Arrivée de Vladimir Poutine dans la salle. pic.twitter.com/YSrk525sAZ
L'ambiance générale, en pleine guerre sanglante, a donc sombré cette année dans un océan de fake news, avec des thèmes de conférences plutôt étranges, des animations absurdes et des déclarations totalement WTF.
On vous résume ce forum en cinq points.
Elle s'appelle Dunyasha, porte une jolie robe à pois, un collier de perles et n'a qu'une seule mission au Forum international de Saint-Pétersbourg: tout faire pour que les invités et les intervenants se sentent chez eux. Une vraie reine de beauté russe. Petite particularité, Dunyasha est un robot. Elle fait de grands sourires, balance des compliments aux clients et sert des glaces et du café. Son corps a été fabriqué sur un modèle humain: Diana Gabdullina. Qui n'est autre que l'épouse du fabricant de robots Rashid Gabdullin.
Elle a surtout fait sensation sur Internet. Certains médias racontent même que des journalistes présents sur place auraient préféré sa peau à la glace qu'elle servait. Au point de toucher les seins... du robot, qui ont été «comparés à des ballons de rugby».
Quand on sait comment la Russie utilise les réseaux sociaux et les médias pour raconter n'importe quoi au sujet de la guerre en Ukraine, c'est assez cocasse d'apprendre qu'une table ronde sur les fake news a été organisée, au calme. Certains intervenants font d'ailleurs furieusement sourire.
Le duo Vovan & Lexus d'abord. Deux humoristes (et activistes) russes dont la spécialité se résume à piéger des personnalités du monde entier, par téléphone. Ils affirment, par exemple, s'être fait passer pour Zelensky dans un coup de fil avec George Bush en mai dernier. Ils auraient aussi piégé Emmanuel Macron en 2019, mais l'Elysée n'a jamais commenté ce canular. Plus loufoque, enfin: Elton John. Les comiques s’étaient fait passer, cette fois, pour... Vladimir Poutine. Le président russe (le vrai) a fini par joindre le chanteur en personne pour s'excuser: «Je sais que des personnes vous ont fait un canular. Ne leur en voulez pas, ils sont inoffensifs, même si cela ne les excuse pas».
Durant la table ronde organisée ce jeudi, le duo a notamment diffusé sur un grand écran son dernier canular. La victime? J. K. Rowling. Dans cette séquence, «Madame Harry Potter» a cru longtemps parler tranquillement à Zelensky. La séquence avait évidemment été enregistrée à l'avance.
Autre invitée un peu... particulière pour parler des news, à l'heure de la guerre en Ukraine: Kristina Potupchik. Au départ, la jeune femme n'est qu'une blogueuse russe à succès. Pro-Poutine depuis le début, elle avait notamment participé au calendrier érotique, qui avait fait scandale, à l'occasion du 58e anniversaire du patron du Kremlin. A l'époque, elle était déjà porte-parole du groupe de jeunes fervents du Kremlin, baptisé Nashi (dissout en 2019).
Aujourd'hui, la jeune femme est officiellement de retour auprès de Vladimir Poutine en tant que «spécialiste des médias sociaux». Le Kremlin, pour pallier aux sanctions, notamment médiatiques, avait très vite activé un large réseau de blogueurs influents afin de propager sa «vision» de la guerre en Ukraine sur des canaux moins officiels. Celle qui avait obtenu, avec son ex-mari et il y a quelques années, un visa doré en Espagne, est également très active sur Telegram.
Vous rêvez de passer les mêmes vacances que Vladimir Poutine? L'Agence fédérale russe pour le tourisme vient de réaliser votre rêve. Un parcours qui s'étend sur plus de 1200 kilomètres. Rostotourism a profité du Spief pour présenter ce petit safari qui fera déambuler le vacancier dans les lieux préférés du président russe. De Krasnoïarsk aux républiques de Khakasie et de Touva. Et l'itinéraire porte déjà un nom: «Les vacances sibériennes». C'est Zarina Doguzova, la cheffe de l'agence, qui a vendu la mèche sur scène, ce jeudi.
La raison de ce projet? A cause de «l'opération spéciale» en Ukraine, «les Russes n'ont plus les moyens de partir en vacances à l'étranger». Sans blague. La durée de ce voyage est estimée à huit jours et il sera lancé officiellement en juillet.
Comme on l'a déjà dit plus haut, cette année, tous les pays occidentaux ont boycotté le Spief. L'occasion rêvée pour les Russes de faire défiler toute une ribambelle de nouveaux pays «non hostiles» pour prouver que «la Russie n'est pas isolée du reste du monde». Sur place donc, des représentants chinois, africains, mais aussi quelques... talibans. Le nouveau gouvernement afghan avait d'ailleurs affirmé au début du conflit «vouloir une fin pacifique à cette guerre». Etonnant, quand on connaît leur pedigree et l'atmosphère relativement peu sereine qui règne dans leur propre pays depuis la chute de Kaboul.
[🇷🇺-#SPIEF22]⚡Le directeur adjoint de la Chambre de commerce afghane dans une interview au SPIEF a déclaré que des hommes d'affaires russes étaient venus en Afghanistan il y a 10 à 20 jours.#SPIEF2022 pic.twitter.com/9T2vuadb5q
— UNCOVER infos™ 😏🎙️ (@william_jengu) June 15, 2022
On rappelle tout de même que les talibans sont toujours officiellement considérés comme une organisation terroriste par le Kremlin. Au même titre que l'Etat islamique.