Des répliques claires de la part d'un allié, et ce en direct sur scène: Vladimir Poutine n'aura pas apprécié que Kassym-Shomart Tokaev refuse vendredi de reconnaître les Républiques populaires autoproclamées de Donetsk et de Louhansk et fasse référence au droit à l'autodétermination des peuples. Lors de son apparition vendredi à Saint-Pétersbourg, Poutine n'a pas laissé transparaître sa colère à l'égard du président kazakh, mais le ton monte désormais entre Moscou et Nour-Sultan.
Konstatin Satulin, le président de la commission des affaires de la Fédération de Russie de la Douma, menace par exemple de prendre des mesures «comme pour l'Ukraine»: selon le média indépendant Moscow Times, le député aurait dit:
Auparavant, le mari de la propagandiste russe Margarita Simonyan avait accusé le Kazakhstan d'«ingratitude» dans une vidéo et recommandé au pays de regarder «ce qui se passe en Ukraine». Mais le différend entre les alliés ne se règle visiblement pas uniquement par des mots.
Comme l'écrit le journal russe Kommersant, contrôlé par l'Etat, la Russie bloque actuellement l'exportation du pétrole kazakh via le port russe de Novorossijsk sur la mer Noire – le principal point de transbordement du pétrole kazakh vers l'Ouest. La raison officielle est que des mines marines datant de la Seconde Guerre mondiale ont été découvertes dans le port. L'évacuation se poursuivrait au moins jusqu'à la fin du mois. L'ensemble du trafic maritime serait bloqué dans le port, mais cela n'a pas été confirmé par les autorités maritimes russes de Rosmorrechflot, selon Kommersant.
Selon le Moscow Times, le Kazakhstan aurait auparavant rebaptisé son pétrole afin qu'il ne soit pas confondu avec le pétrole russe dans les ports occidentaux et tombe sous le coup des sanctions de l'UE. L'agence de presse ukrainienne Unian rapporte en outre que le Kazakhstan empêcherait 1 700 wagons de charbon russe d'être exportés. Une brouille entre Moscou et Nur-Sultan serait pourtant mauvaise pour les deux partenaires.
Ce n'est qu'au début de l'année que l'alliance militaire régionale OKVS, dirigée par la Russie, a assuré à Tokaïev le pouvoir au Kazakhstan. Des manifestations massives contre la corruption et l'injustice sociale y ont éclaté en janvier, après le départ du président Noursoultan Nazarbaïev en 2019. En coulisses, le dirigeant de longue date continuerait toutefois à décider de l'orientation du gouvernement. Des centaines de personnes auraient été tuées et des milliers arrêtées lors de la répression des manifestations.
Mais la Russie dépend également de son allié d'Asie centrale, sans doute plus que jamais depuis l'invasion de l'Ukraine: «L'Etat russe contrôle de nombreuses installations militaires et industrielles au Kazakhstan, qui sont pleinement opérationnelles et ne sont pas touchées par les sanctions occidentales», écrit l'analyste en politique de sécurité Ivanna Kuz. «Le partenariat entre les deux pays est solide, comme le montrent la participation kazakhe aux exercices militaires russes, la coopération avec les entreprises de défense russes et le développement commun de nouvelles armes.»
Sources utilisées:
(t-online,mk)
(Traduit de l'allemand par Jonas Follonier)