C'est une tragédie humanitaire qui passe presque inaperçue, derrière l'actualité en Ukraine et en Palestine: depuis environ 16 mois, une guerre civile fait rage au Soudan. Selon l'ONU, plus de dix millions de personnes sont en fuite, la plupart à l'intérieur des frontières de ce pays d'Afrique du Nord-Est.
Plus de 25 millions d'habitants n'ont pas assez à manger, soit environ la moitié de la population. Des experts internationaux ont déjà déclaré une famine dans un camp de réfugiés abritant des centaines de milliers de personnes dans la région en guerre du Darfour. En résumé, le Soudan est en train de vivre l'une des plus grandes catastrophes humanitaires de l'histoire récente.
La situation est complexe. Deux organisations militaires rivales se disputent le pouvoir: l'armée soudanaise et le groupe Les Forces de soutien rapide (FSR), une force paramilitaire soudanaise. La guerre civile a éclaté en avril 2023, au moment où le pouvoir devait enfin être transféré aux civils après le renversement militaire du dictateur de longue date Omar el-Bechir en 2019. Il était également prévu que les RSF soient intégrées dans l'armée. Au lieu de quoi, les deux groupes ont pris les armes.
Toutefois, il subsiste une lueur d'espoir: des pourparlers de paix sur le Soudan sont annoncés à Genève à partir de mercredi. Ils devraient durer jusqu'à dix jours. Le lieu exact reste confidentiel.
La Suisse ne servira que de terre d'accueil aux pourparlers, organisés à l'initiative des Etats-Unis. «Il faut plus d'attention de la communauté internationale et plus de volonté politique pour que les combats cessent et que l'aide parvienne aux régions touchées», a souligné Tom Perriello, envoyé spécial du gouvernement américain pour le Soudan, devant les médias lundi à Genève.
Il reste un problème: alors que la force de FSR a promis sa participation sans poser de conditions, l'armée soudanaise n'a toujours pas confirmé sa présence.
Les pourparlers de paix de Genève risquent-ils d'échouer avant même d'avoir commencé? Selon Tom Perriello, tout espoir de voir le FSR participer n'est pas perdu. L'Américain vient de se rendre à Djeddah, en Arabie Saoudite, pour discuter avec une délégation du gouvernement soudanais de l'inviter à se rendre en Suisse. L'envoyé spécial des Etats-Unis pour le Soudan a cependant conscience que la paix ne pourra être négociée que si les deux parties en conflit sont à la table.
Si un cessez-le-feu est l'un des objectifs déclarés des pourparlers, un autre point important est l'amélioration de l'accès de la population à la nourriture, à l'eau potable et aux soins médicaux. C'est là que Tom Perriello veut commencer si l'armée soudanaise ne vient pas à Genève. Il a promis une «feuille de route internationale» pour l'aide humanitaire au Soudan.
Bien que cela puisse sembler abstrait pour l'instant, il y a au moins un élément positif: des acteurs régionaux importants participent aux discussions de Genève, dont l'Egypte, les Emirats arabes unis et l'Union Africaine, ainsi que l'ONU. Car le conflit au Soudan implique également des forces étrangères. L'Egypte, par exemple, entretient des relations avec l'armée soudanaise, tandis que les Emirats arabes unis sont proches des FSR.
Les Etats-Unis espèrent que l'aggravation de la situation bouleversera les parties concernées. Il ne s'agit plus seulement d'une crise humanitaire, estime Tom Perriello, mais «d'une crise humanitaire plus importante, qui devient une crise pour la stabilité de la région».
Traduit et adapté par Noëline Flippe