«A mi-chemin entre le néofascisme et le néonazisme.» C’est en ces termes que le chercheur français Jean-Yves Camus, co-directeur de l’Observatoire des radicalités politiques, joint par watson, décrit les Zouaves Paris, le groupe extrémiste auteur des coups violents assénés aux militants de SOS-Racisme lors du meeting d’Eric Zemmour dimanche à Villepinte, en banlieue parisienne.
Le site StreetPress a révélé la présence de membres de cette faction de l’ultra-droite au premier grand rassemblement politique du candidat identitaire. Et notamment celle de son leader, Marc de Cacqueray-Valmenier. «Le jeune homme a le Troisième Reich dans la peau. Sur ses jambes bardées de tatouages on distingue encore une Totenkopf ceinte des mots "Ehre" et "Treue". Une référence à la devise de la SS (encore elle) Meine Ehre heisst Treue: "Mon honneur s’appelle fidélité."», écrit StreetPress.
🔴 Au meeting de Zemmour, les militants de @SOS_Racisme ont été lynchés
— StreetPress (@streetpress) December 6, 2021
Parmi les cogneurs identifiés, des membres d’une bande ultra-violente, dirigée par un garçon de bonne famille entraîné au combat: les Zouaves Paris
✍️ @pierre_plottu @MaskymMace https://t.co/XNLWwb0b6A
A Villepinte, la mouvance «facho» était entre autres représentée par le Parti de la France, comme relaté ci-après sur Twitter:
1/On retrouvait ainsi @thomasjoly et son @PartidelaFrance, arborant vigoureusement leur bannière au meeting de Zemmour https://t.co/0LTKxMMudu
— Gaston Crémieux (@GastonCremieux) December 7, 2021
L'un des membres du Parti de la France, Bruno Hirout, s’était fait prendre en photo avec une fausse bonbonne de Zykon B, le gaz utilisé par les nazis pour exterminer les juifs. Un cliché datant de plusieurs années, qui avait fait scandale lorsqu’il fut découvert, rapportait le quotidien Ouest France en 2014.
Le 4 novembre, soit un mois avant la réunion publique de Villepinte, Jean-Yves Camus avait publié un article sur le site de la Fondation Jean Jaurès, à laquelle est rattaché l’Observatoire des radicalités politiques. Il y listait les soutiens d’ultradroite d’Eric Zemmour. Parmi eux le précité Parti de la France, ainsi qu’un certain Hervé Ryssen, pourtant un «antijuif compulsif», note le spécialiste des mouvements extrémistes.
D’où vient que des antisémites soutiennent un candidat qui ne fait pas mystère de ses racines juives berbères? «Zemmour, parce qu’il combat le "système", ne serait que très peu juif, voire plus du tout. Dès lors, prévient Ryssen, l’ostraciser reviendrait à "se priver de quelques têtes bien faites qui sont disposées à se mettre à notre service" pour "mettre un coup d’arrêt à la déferlante du gauchisme culturel et à l’invasion migratoire"», relève Jean-Yves Camus dans son article. La judéité d’Eric Zemmour? On verra plus tard, en somme.
La présence d'un groupuscule de la trempe des Zouaves Paris au meeting de Villepinte? «C’est une énorme et incroyable erreur de Zemmour», estime Jean-Yves Camus, interrogé par watson.
«Si Eric Zemmour a un minimum de sens politique, il devrait faire le ménage et se débarrasser de ces groupuscules qui ont tendance à se comporter comme des supplétifs du service d’ordre officiel», juge Jean-Yves Camus. Il se demande bien ce qu’«il arrivera lorsque Zemmour tiendra un meeting en province, dans des salles plus petites, situées dans les centres-villes et plus difficiles à sécuriser que le Parc des expositions de Villepinte».
Ce dimanche 5 décembre, il semble que l’organisateur du rassemblement n’ignorait rien de la venue des Zouaves Paris. Des remerciements leur auraient même été adressés. Certes, des antifas, présents dans les parages du Parc des expositions, décidés à perturber la tenue du meeting, avaient plus tôt dans la journée joué au chat et à la souris avec les forces de l’ordre. «Mais les militants de SOS-Racisme agressés par les Zouaves Paris ne sont pas des antifas. Ils sont non-violents», précise Jean-Yves Camus. Sans doute l'organisation antiraciste se sera montrée imprudente en appelant précédemment dans des tracts à «faire taire Zemmour», comme le signalait mardi matin le site de Jean-Marc Morandini, pas le plus inamical avec Eric Zemmour.
Séquence surréaliste : Une militante de SOS Racisme refuse de répondre quand elle est confrontée aux affiches de son association menaçant de "faire taire Zemmour"- Vidéo https://t.co/HWOnSq2Yws
— Jean Marc Morandini (@morandiniblog) December 7, 2021
De son côté, Jean-Yves Camus dresse le parallèle suivant, où il est question de l'UDC:
Mais le candidat de cette France identitaire, 13% d'intentions de vote selon un sondage de l’Ifop, en baisse de 2 points (quand Valérie Pécresse en gagne 7, passant à 17%), aura-t-il cure des mises en garde sur son entourage d'ultra-droite? Sommé de s'exprimer après les coups donnés dimanche à Villepinte, Eric Zemmour, ayant lui-même ce jour-là fait l'objet d'une agression de la part d'un individu rapidement maîtrisé, a déclaré mardi condamner «toutes les violences», tout en qualifiant les militants de SOS-Racisme de «provocateurs» et de «chiens truffiers de la subvention», traitant les médias de «complaisants».
Lorsque Marine Le Pen fut élue présidente, en 2011, d’un parti qui s’appelait encore le Front national, elle coupa les branches les plus compromettantes, se séparant, notamment, des militants de l’Œuvre française, groupuscule raciste et antisémite dissout en 2013 par Manuel Valls, à l’époque ministre de l'Intérieur. Jean-Yves Camus l’a constaté: les anciens leaders de l’Œuvre française, prétextant un critère ethnico-religieux, ne se sont pas ralliés à la candidature d’Eric Zemmour.