Le fondateur et chef historique du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK) Abdullah Öcalan a demandé jeudi au mouvement armé de se dissoudre et de déposer les armes après quatre décennies de guérilla. Sa déclaration a été lue par des députés kurdes qui lui ont rendu visite jeudi dans sa prison, au large d'Istanbul.
Le leader kurde dit «assumer la responsabilité historique de cet appel».
Son message, attendu depuis des semaines, a été lu en kurde puis en turc devant une foule compacte de journalistes réunis dans un hôtel du centre d'Istanbul, devant une large photo montrant le chef historique du PKK, les cheveux blanchis, une feuille blanche en main.
Une délégation du parti prokurde DEM s'était entretenue pendant trois heures jeudi matin avec M. Öcalan, détenu à l'isolement depuis 26 ans.
Des centaines de personnes se rassemblées en dansant et en chantant dans plusieurs villes du sud-est à majorité kurde, dont Diyarbakir, pour la lecture de son message. Des écrans géants ont aussi été dressés dans le nord de la Syrie et de l'Irak, où vit également une forte minorité kurde.
Abdulah Öcalan, 75 ans, avait exprimé lors de précédentes rencontres avec des députés prokurdes sa «détermination» à tourner la page de la lutte armée.
Ses deux précédents appels à la trêve, au début des années 2000 puis en 2013, avaient fait long feu, cédant la place à des flambées de violence.
Le gouvernement turc, qui a initié le processus par l'intermédiaire de son allié nationaliste du MHP, Devlet Bahçeli, a proposé de le sortir de son isolement après vingt-six ans de détention.
Une remise en liberté paraît cependant peu probable, étant donné les menaces de vengeance qui pèsent sur Abdullah Öcalan.
Le président Recep Tayyip Erdogan, qui s'est peu exprimé sur le sujet, a confirmé à plusieurs reprises la politique de «la main tendue aux frères kurdes», qui constituent la principale minorité de Turquie (20% de la population environ), tout en accentuant la pression sur l'opposition, en particulier sur le parti DEM, dont dix maires ont été démis de leurs fonctions depuis leur élection l'an dernier.
Des vagues d'arrestations ont été conduites contre des centaines de personnes – militants politiques, élus, artistes, journalistes – accusées de «terrorisme».
Cependant, et en dépit du charisme intact d'«Apo» Öcalan, une vaste incertitude pèse sur la réponse des combattants du PKK, pour la plupart repliés dans les montagnes de la région de Qandil, dans le nord de l'Irak.
«Ils peuvent arguer qu'Öcalan étant détenu, sa parole n'est pas libre et continuer le combat», redoute un diplomate occidental qui prédit alors une riposte militaire immédiate d'Ankara.
La Turquie accuse aussi le PKK de combattre dans le nord-est de la Syrie au côté des Forces démocratiques syriennes (FDS). Or les FDS sont soutenues par les Etats-Unis au nom de la lutte contre les djihadistes du groupe Etat islamique. Et nul ne connait à ce stade les intentions de Washington, qui maintient des forces sur place. (ats/asi)