Ils venaient évacuer leurs parents de Bakhmout et ont eux-mêmes été pris sous le feu: ce n'est que grâce à un drone, et à beaucoup de chance, que Valeria Ponomarova et son mari Andrii Bohomaz ont eu la vie sauve.
Leur folle histoire, qui a eu lieu le 23 juin 2022, a été retracée par le documentaire ukrainien «Follow Me», réalisé par Lubomir Levitsky. Son récit se base en grande partie sur les images prises par le drone du lieutenant des forces armées ukrainiennes Sid. C'est notamment grâce à son intervention que le coupe à pu s'en tirer vivant.
Revenons au 23 juin 2023. Ce jour-là, alors qu'ils roulaient de Kharkiv à Bakhmout, les deux civils ukrainiens se retrouvent soudainement entre deux fronts. Les images du drone montrent leur Mazda noire éviter d'abord les barricades de mines, pour se retrouver ensuite sous le feu des Russes.
Des tirs s'abattent autour de la voiture, Valeria et Andrii – encore indemnes – quittent le véhicule et s'éloignent en courant. Mais ils reviennent ensuite. «Incompréhensible pour nous», commente Sid, le pilote du drone, dans le film.
Andrii est gravement touché, aux jambes, à la poitrine et à la tête. Valeria tire son mari à l'abri derrière le coffre et bande la tête de son mari allongé sur la route.
Pendant ce temps, Sid essaie d'attirer l'attention de la femme avec son drone; il espère la guider hors de la zone de danger. Problème: les piles de l'engin se vident, le lieutenant doit faire revenir l'appareil. Il en profite pour fixer un papier sur lequel il est écrit, en Ukrainien, «suis-moi». Le drone retourne ainsi vers Valeria.
Dans le film, sur fond de musique dramatique, Valeria décrit comment elle a fait des adieux désespérés à son mari, en lui promettant de revenir le sauver. Ensuite, elle se met en marche en suivant le drone. Elle doit éviter les mines terrestres. Avec des manœuvres, l'engin du lieutenant Sid lui signale par où passer.
A peine Valeria partie, le drone aperçoit les soldats russes sortir de leur cachette et déposer Andrii, blessé, dans un fossé près de la route.
Pourquoi les Russes l'ont laissé là, dans cet état? Ce n'est pas clair. L'histoire se termine en tout cas de façon heureuse pour le couple. Andrii passe la nuit dans le fossé et ne reprend connaissance que le lendemain matin. La perte de sang et les blessures par balle sont graves - l'homme a dû subir plusieurs interventions - mais sa vie n'est pas en danger.
La documentation remarquable ainsi que plusieurs enregistrements téléphoniques des services secrets ukrainiens font de l'histoire de Valeria et Andrii un cas exemplaire des crimes de guerre russes en Ukraine.
Vendredi dernier, la Cour pénale internationale de La Haye a inculpé le président russe Vladimir Poutine pour des crimes de guerre. Dans le cas de Valeria et Andrii, une accusation «par contumace», c'est-à-dire en l'absence de l'accusé, a eu lieu cette semaine en Ukraine.
Selon l'autorité ukrainienne qui enquête sur les crimes de guerre, le tireur responsable des tirs sur Andrii serait Klim Kerzhaev, un commandant moscovite de 25 ans. Il est accusé de tentative de meurtre sur des civils.