L'instinct peut être un allié dans bon nombre de situations. Mais, en temps de guerre, il peut se montrer carrément contre-productif. Et notamment pour les êtres humains soudain frontalement confrontés aux horreurs en Ukraine. L'émotion et l'empathie, réflexes pourtant naturels face à une victime, n'aident pas à notre survie immédiate.
Pour les soldats, les médecins, les journalistes et les civils, le stress post-traumatique est souvent une guerre dans la guerre, la tétanie et l'angoisse aigüe sont légion, et l'objectif principal à ce moment-là est plutôt clair: en sortir. Le plus vite possible.
Ces derniers jours, au front, une technique mystérieuse refait surface. Elle a déjà fait ses preuves dans l’armée et les secours israéliens, l'armée américaine ou allemande et, plus récemment, en France, auprès des pompiers et des policiers. Le protocole «6C», c'est son nom, a été découvert par un spécialiste de la santé mentale, le professeur Moshe Farchi en 2017. Il permet d'arracher un individu à la sidération. En quelques minutes.
Les six «C»?
Ces six étapes doivent permettre à la victime de réorganiser à la fois la chronologie des faits et ses pensées, mais aussi de lui offrir les outils nécessaires à sa sécurité. «Rassemblez toutes vos affaires, mettez-vous ici, où sont vos papiers d'identité, combien de personnes sont avec vous et pouvez-vous les nommer? Nous avons besoin de votre aide pour sécuriser le périmètre, peut-on compter sur vous?» Autant de questions simples qui doivent signifier la fin d'un épisode traumatique aigu et projeter la personne dans l'action. Une technique qui s'applique donc à chaud, mais qui prévient également le stress post-traumatique chronique.
Le professeur israélien à la base du concept avait d'ailleurs alerté les autorités britanniques sur ses vertus, au moment de l'attentat de Manchester en 2017:
Selon France Culture, l'unité de secours civile israélienne United Hatzalah, qui a été l'une des premières à bénéficier du protocole en 2017, est désormais réputée pour abriter «les secouristes les plus rapides du monde». Emmanuelle Halioua, psychologue et unique formatrice agréée en France, raconte dans le HuffPost ce que permet le protocole en deux minutes chrono et sur le terrain:
Dans le cadre de l'agression russe en cours depuis deux semaines, ce protocole refait surface. Notamment par l'intermédiaire d'un grand reporter français, actuellement en Ukraine pour le magazine Paris Match. Nicolas Delesalle a lui-même été formé sur place au «protocole 6C» et s'est lancé dans une explication précise sur Twitter lundi.
Amis journalistes, si vous êtes en Ukraine ou si vous y partez, vous risquez de croiser sur votre route des gens en grande détresse psychologique ou de vous retrouvez vous-même en état de sidération.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) March 14, 2022
Enfin, de son côté, l’International Center for Functionnal Resilience (ICFR), ou exerce notamment le professeur Moshe Farchi, propose en ce moment des formations sur le terrain, en Ukraine, aux personnes qui sont au front.