Récemment, le gouvernement américain a annoncé la livraison à l'Ukraine de quatre lance-roquettes multiples supplémentaires de type Himars (High Mobility Artillery Rocket System). Le secrétaire américain à la Défense, Lloyd Austin, a déclaré à ce sujet que les Himars avaient «énormément fait la différence sur le champ de bataille». En effet, les missiles déployés jusqu'à présent sur le champ de bataille en Ukraine ont touché plusieurs dépôts de munitions, lieux de rassemblement et postes de combat russes.
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— Altavista 🇪🇺🇺🇦 (@na_intel) July 21, 2022
Mais les systèmes de lanceurs de missiles ont-ils vraiment un impact aussi important que le ministre américain de la Défense et parfois de nombreux médias l'ont récemment commenté? «Ponctuellement, certainement», dit Marcel Berni, expert en stratégie de l'Académie militaire de l'ETH Zurich. En effet, «le Himars permet à l'artillerie ukrainienne, du moins à certains endroits, de "dépasser" l'artillerie russe, c'est-à-dire d'attaquer les dépôts de munitions et les postes de commandement, avec une grande précision, derrière les lignes de front, sans être exposé à des tirs concentrés en retour», explique l'expert Marcel Berni.
Le missile de type Himars a une portée pouvant aller jusqu'à 80 kilomètres. Les systèmes de lance-roquettes ne doivent donc pas être tirés à portée de l'artillerie russe, ce qui facilite leur utilisation. L'armée ukrainienne peut donc désormais mener des attaques offensives limitées, une capacité qui a longtemps été réservée aux formations russes, poursuit l'expert en stratégie. Ainsi, les Himars agissent sur la capacité des Russes à ramener des forces sur le front et entravent leurs offensives.
En effet, il semble que l'artillerie russe ait dû faire une pause entre-temps. Entre le 8 et le 12 juillet, par exemple, les tirs ont fortement diminué dans l'est de l'Ukraine, comme le suggère une carte des anomalies de chaleur dans le monde de l'agence spatiale américaine Nasa. La carte montre un fort regroupement d'anomalies de chaleur dues aux tirs d'artillerie le long de la ligne de front dans l'est de l'Ukraine.
La question se pose de savoir si la diminution temporaire des tirs russes est due à l'utilisation accrue de Himars – et à la destruction des dépôts de munitions russes pour les armes d'artillerie – ou à d'autres systèmes d'armes livrés par l'Occident.
«Il semble que de nombreuses formations russes aient dû cesser ou du moins réduire leurs tirs d'artillerie au cours des dernières semaines», explique-t-il:
Il s'agit ainsi de priver les tirs d'artillerie russes de munitions et d'approvisionnement. L'expert en stratégie de l'EPFZ suppose que les missiles Himars «ont une influence tactique sur l'approche russe et qu'il va maintenant forcer les unités russes à organiser leur propre ravitaillement de manière plus décentralisée». Il faut, en outre, partir du principe que les Himars sont utilisés avec succès dans le sud de l'Ukraine.
Sur ce front sud, l'Ukraine veut désormais lancer sa propre offensive pour reconquérir la région de Kherson et la région de la mer Noire occupées par la Russie. Là aussi, les Himars doivent apporter leur soutien. Selon Marcel Berni, il est tout à fait possible que «le momentum au sud bascule du côté de l'Ukraine dans les prochaines semaines».
Mais il s'attend ici à une guerre de position acharnée, avec seulement des gains territoriaux incrémentiels pour Kiev. En effet, «l'Ukraine est très dépendante de l'Ouest. Pour la contre-offensive annoncée au sud, elle n'a pas seulement besoin d'artillerie, mais aussi de véhicules de transport mécanisés, de chars, d'importants stocks de munitions et bien sûr de formation».
Et en matière de véhicules blindés, par exemple, l'Ukraine est nettement inférieure aux forces armées russes. Ainsi, on peut douter que le président ukrainien Volodymyr Zelensky puisse concrétiser dans un avenir proche son annonce de reconquête des territoires du sud.