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Témoignage watson

«J'ai passé une semaine avec des yogis et c'était lunaire»

Sur la photo, c'est moi, fière de faire la différence entre des bananes et des bananes plantains.
Sur la photo, c'est moi, fière de faire la différence entre des bananes et des bananes plantains.instagram
Témoignage watson

«J'ai passé une semaine avec des yogis au Costa Rica et c'était lunaire»

Au début du mois de janvier, je suis allée à Santa Teresa au Costa Rica. Ce qui devait être un séjour relaxant s'est transformé en une quête acharnée de spiritualité. Après une semaine de yoga, de ice bath, de partage et de hugs... j'étais crevée. Maintenant, il me faut des vacances pour me reposer de mes vacances.
12.01.2023, 18:4213.01.2023, 07:12
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Santa Teresa se situe sur la côte ouest du Costa Rica, au bord de l'océan Pacifique. L'ambiance de cette petite ville, c'est celle d'un spot de surfers avec ces gens beaux et bronzés roulant en quad sur des routes en terre pourries, le foulard sur le nez pour éviter de respirer trop de poussière et surtout, pour se donner un style badass. Au bord de la route, des chiens errants adorables qu'on a envie d'adopter et des magasins de fringues à franges, de bobs et de bijoux en coquillages qui coûtent un rein.

La plage de Santa Teresa est remplie de surfers et de chiens.
La plage de Santa Teresa est remplie de surfers et de chiens.watson

Certains diront que c'est une version plus cool de Tulum avec moins de pseudo-shamans et d'influenceuses. Jay-Z et Beyoncé ont passé leurs vacances à Santa Teresa la même semaine que moi (pfff, ces gens qui n'ont pas de personnalité). Une rumeur tournait d'ailleurs sur le fait que le couple de stars voulait racheter l'une des boîtes de nuit de la ville.

Mais à Santa Teresa, il n'y a pas que des surfers et des stars qui vivent la «Pura Vida» (la vie pure), il y aussi une communauté de gens spirituels. Sur un malentendu, j'ai passé une semaine avec des hippies chics dans un hôtel avec accès direct à la mer. En arrivant, on me porte ma valise jusqu'à ma chambre qui est en fait une tente de luxe. C'est du glamping (les toilettes sont sèches). Devant ma tente, des slacklines avaient été installées et il y avait un panneau qui indiquait «l'arbre sacré», comme si nous étions dans Avatar. En se promenant dans la propriété, il n'était pas rare de voir des gens assis en tailleur en train de méditer.

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C'est pas un hôtel, c'est une famille

Dès mon arrivée, on m'a ajouté à un groupe WhatsApp. Chaque nouvel arrivant est présenté ainsi:

«Hello Familia, nous sommes heureux de présenter machin-truc à la famille»

Oui, parce qu'avant d'être un hôtel (entre 180 et 500 francs la nuit), c'est avant tout une famille, une communauté. Les gens avaient beau ne pas se connaître, ils se disaient bonjour en se faisant des hugs et faisaient du small talk qu'ils appelaient «partage». Libre à chacun de se présenter sur le groupe WhatsApp. Certaines personnes comme moi n'ont rien écrit, parce que je n'étais pas venue ici pour me faire des amis. D'autres, au contraire, avaient vraiment besoin de parler:

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Image: watson
Salut tout le monde, merci pour cet accueil chaleureux. Je m'appelle Julian, je viens d'Allemagne, j'ai vécu les 15 dernières années aux US (NY, SD, LA, Miami), j'ai fait plusieurs fois le Burning Man, je suis un road-trip fanatique et un Costa Rica lover. Je me réjouis de vous rencontrer❤️.

En lisant les messages du groupe, j'ai réalisé que je venais d'entrer dans une secte de bisounours blindés en mal de chakras alignés et de serendipity. Moi qui m'imaginais me faire servir des Agua de Pipa sur la plage, j'allais vite déchanter. Parce que dans cet hôtel, en plus de devoir aller chercher son eau de coco au bar, on ne vient pas pour se la couler douce, on vient pour faire des workshops. Ces ateliers sont organisés par l'hôtel et donnés par les clients, parce que je le répète, ce n'est pas vraiment un hôtel, c'est une communauté et nous ne sommes pas des clients, nous sommes des résidents... L'art du marketing.

Tu sais que t'es dans un hôtel serendipity quand tu vois ça. Le genre de message très maladroit destiné aux gens qui font le ménage et qui veulent juste savoir s'ils peuvent faire leur boulot.
Tu sais que t'es dans un hôtel serendipity quand tu vois ça. Le genre de message très maladroit destiné aux gens qui font le ménage et qui veulent juste savoir s'ils peuvent faire leur boulot.Image: watson

Parmi les activités proposées (certaines étant payantes), il y avait les classiques cours de yoga tous les matins à 7h15 que j'ai évité comme la peste vu que je suis souple comme une brique, mais il y avait aussi des workshops plus perchés qu'on ne peut prononcer qu'en anglais: «sexual wellness consultation», «nails standing», «gratitude circles» ou encore «primal movement»... Je n'avais jamais entendu parler de tous ces trucs. En lisant la description de chacun d'entre eux, ça m'a stressée. Je me suis dit: «Mais qu'est-ce que je fous là?» Les mots «gratitude» et «circle» m'ont tout particulièrement fait peur.

«Je me suis dit: "Mais qu'est-ce que je fous là?"»

Une autre activité populaire était le «Ice Bath». Concrètement, il s'agit de plonger tout son corps dans une baignoire remplie d'eau et de glaçons et d'y rester plusieurs minutes. C'est extrêmement douloureux, mais la plupart des workshops sont faits pour repousser la douleur. Super les vacances!

Orgasme avec les pieds empalés sur du métal

Malgré ma réticence à toutes ces activités de yogi, j'ai participé à ce qu'on appelle le «nails standing». Rien à voir avec les ongles. Il s'agit de tenir debout sur des clous comme des fakirs. Sur une musique mi-relaxante, mi-tribale, celui qui animait le workshop nous a demandés de mettre nos pieds sur des clous prévus à cet effet: «Dépasser le stade de la douleur. Vous aurez envie d'abandonner, essayez d'aller plus loin pour voir comment votre corps réagit». L'exercice devait durer 15 minutes.

Voici à quoi ça ressemble au niveau débutant.
Voici à quoi ça ressemble au niveau débutant.Image: watson

Après à peine 45 secondes, j'ai eu l'impression que mes pieds allaient s'empaler. Or non, ça faisait juste très mal. J'essayais de me concentrer, de repousser la douleur, de faire le vide dans ma tête, de penser à une prairie verte, à quelque chose d'agréable. Malheureusement pour moi, il y avait une prof de yoga juste à côté de moi, elle avait donné le cours de Vinyasa le matin même. Alors que j'essayais d'aligner mes chakras, elle a commencé à gémir. Les gémissements sont devenus de plus en plus forts. Elle avait les yeux fermés et elle est entrée dans une sorte de transe. Elle ne gémissait plus, elle avait carrément un orgasme, elle criait comme si elle jouissait tout en se balançant d'avant en arrière. Tout à coup, elle a eu comme des convulsions puis elle s'est mise à rire, elle avait carrément un fou rire... C'est donc ça le Metaverse?

Je n'ai tenu que trois minutes alors que tous les autres ont réussi l'exercice non sans peine. Je me suis sentie comme une merde. Mais pour moi, impossible de faire abstraction de la yogi en plein orgasme. A la fin de l'exercice, on a dû raconter, partager (encore) son expérience. Sur le principe, j'étais censée partager le fait que la yogi m'avait cassé les couilles, mais comme j'étais aussi censée être dans la tolérance et la bienveillance, j'ai fait une réponse bateau du genre: «J'ai repoussé mes limites et même si je n'ai pas réussi l'exercice jusqu'au bout, j'essaie de ne pas être trop dure avec moi-même.» Et j'avais aussi envie de frapper cette meuf.

Le partage, c'était l'un des moteurs du lieu. Il n'y avait aucune pudeur vis-à-vis des émotions, il fallait être transparent, crier si on le voulait, pleurer si on le voulait, rire si on le voulait, or comment être transparent quand on ne sait pas ce qu'on ressent?

Les gens étaient tellement dans le partage qu'après le cours de Nails Standing, l'un des participants a préparé une salade de fruits pour tout le groupe. Sauf que quand il l'a posé sur notre table au petit-déjeuner avant d'aller faire je ne sais pas trop quoi, on n'a pas compris que c'était un plat à partager comme le corps du Christ. On a tous pioché dedans sans l'attendre et du coup, il a un peu boudé.

Le temazcal, une tente de sudation

J'ai trainé la patte jusqu'à un autre workshop: le Temazcal. Il s'agit d'une hutte de sudation, c’est-à-dire une structure en bois en forme d’igloo recouverte de tissus avec au milieu, des pierres brûlantes. On m'a dit que c'était un genre de sauna mexicain et comme j'adore les saunas, je m'étais dit qu'enfin, j'allais faire une activité qui me plaisait. Par contre, ce qu'on ne m'avait pas, c'est qu'avant d'entrer dans la hutte, le groupe allait devoir à nouveau... PARTAGER.

Le maître de cérémonie nous a demandés à chacun de dire ce pourquoi on était reconnaissant cette année, quelles étaient nos leçons de 2022 et quelles étaient nos intentions en venant à ce workshop. Panique à bord. J'ai eu envie de pleurer, je crois même qu'à un moment j'ai pleuré, mais comme je transpirais énormément, ça ne se voyait pas. Il m'aurait fallu deux jours pour savoir quoi répondre. Je réfléchissais aux leçons de 2022 en me disant «Merde, c'est quoi le troisième truc déjà?». D'ailleurs, personne n'osait se lancer. C'est le maître de cérémonie qui a commencé suivi de sa femme et d'une amie à eux. Ils ont fait ça si naturellement. En même temps, je sentais bien qu'ils étaient rompus à l'exercice. En les écoutant, je me suis rendu compte qu'il fallait juste à nouveau sortir des banalités du genre: «I'm grateful for my family, I love this energy, I am more aware of the world around me.»

Heureusement, c'était vraiment beau.
Heureusement, c'était vraiment beau.watson

Dans cette communauté, j'ai réalisé que beaucoup de personnes se sont réfugiées dans un mode de vie spirituelle après avoir touché le fond. Ils sont devenus extrêmes comme on le devient en se convertissant à une religion. La prof de yoga qui jouit sur des clous a expliqué au début de son cours qu'avant de découvrir cette pratique, elle était «in a very bad place». Le prof de «primal movement» a fait dix ans de prison en Argentine pour trafic de drogue et le maître de cérémonie du temazcal est passé par la case hôpital psychiatrique.

J'ai d'ailleurs participé au cours de «primal movement», une discipline qui s'inspire des mouvements des animaux et qui revient aux essentiels de la mobilité comme courir, sauter, grimper ou encore ramper. Moins spirituel que le yoga mais tout aussi physique, c'est peut-être l'activité la plus amusante que j'ai testée. Et savoir que le prof était un ancien trafiquant de cocaïne, ça rendait le truc encore plus lunaire.

J'ai passé une semaine dans cet hôtel. Tous les résidents, y compris moi, vivions au rythme du soleil. Les gens se réveillaient vers 6h30 et se couchaient tôt (21 heures). Disons que personne ne se mettait une taule au bar où l'on servait de la «bière végane». D'ailleurs, beaucoup d'entre eux ne buvaient pas d'alcool (parce que le corps est un temple). A la fin de mon séjour, j'ai croisé deux nouveaux arrivants un peu perdus. Ils m'ont fait penser à moi une semaine auparavant. J'ai réalisé qu'il y avait finalement plus de gens qui me ressemblaient que ce que je pensais.

Suivez-moi pour plus d'aventures improbables!

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