Argentine-France est-il le plus beau match de l'Histoire? Oui, peut-être, fuck no!, ouais enfin ça dépend. Une petite balade dans les réponses de ce tweet, posté au coup de sifflet final par la voix de la Nati, permet de balayer toute tentative de raisonnement mathématique.
Si ce n’est pas celui-ci, quelqu’un peut me dire quel est le plus grand match de l’histoire du football, en tenant compte de l’enjeu. Je peine à avoir le recul en tribunes là. Tout le monde est abasourdi.
— David Lemos (@davidlemos) December 18, 2022
Qui méritait la victoire? Pourquoi? Le football, quand c'est une finale, quand c'est pour devenir la meilleure équipe du monde, quand c'est pour assouvir les rêves d'un peuple, autorise les plus profondes injustices, les holdups les plus brutaux et la plus froide subjectivité.
Jusqu'à faire d'Argentine-France «le plus grand match de l'histoire du football», parce que rebondissement(s) il y a eu. Quitte à ignorer les larges bâillements sur les canapés jusqu'à la première tête cadrée des Bleus, à la 68e minute. Quitte à oublier volontairement que le onze de Deschamps n'a rien eu de mieux à offrir que le Franprix de Villeurbanne, niveau qualité-prix. Comprenez: il y a eu de quoi s'ennuyer ferme pendant au moins une heure. Mais la vérité est ailleurs.
Ils jouent à quelle heure les Bleus ? #ARGFRA
— Betclic 🔞 (@Betclic) December 18, 2022
Quand le contesté Szymon Marciniak désigne le point de pénalty argentin à la 80e minute, c'est un véritable maelström émotionnel qu'il provoque. Mbappé, qui n'a pas craché une seule goutte de sueur jusque-là, obtient le droit de rapatrier son équipe dans le match. Il y a de quoi hurler rationnellement au démérite, ronger sa table basse et planter des popcorns dans son écran de télévision.
Pour cette pauvre Argentine, volontaire, habile, agile, qui doit gagner, qui veut gagner, qui a tout entrepris pour le faire. Ne laissant aux Bleus, ahuris, que les effluves d'une flemme indigne d'un rendez-vous de cette ampleur. Perdre et ne pas vouloir gagner, ça n'a jamais été tout à fait la même chose.
Le numéro 10 français n'a pas tremblé devant la cage d'Emiliano Martinez? L'inverse aurait pu tout aussi bien se produire. Réaliser un doublé en quelques secondes? C'est magnifique, bouleversant, cinématographique. Crions au beau geste et au génie, sans la moindre ironie. A 2-2 et à la 81e minute, les coeurs sont remontés dans les gorges et le football a disparu. Place à toute autre chose.
Dimanche, il y avait les apôtres de Mbappé, miséricordieux, ceux qui n'avaient d'yeux que pour Messi et tous les autres qui ne s'embarrassent d'aucun Dieu. Juste ce grand bol de popcorns sur les cuisses pour profiter du grand huit annoncé. Hollywood ne rivalisera d'ailleurs jamais avec la fabrique à humanité(s) que représente une finale de Coupe du monde.
Je dis plus rien, sport de merde, je vais faire une crise cardiaque
— Dimitri L'hours (@DimitriLhours) December 18, 2022
Le plus beau match de l'Histoire? Peu importe. L'Argentine mérite-t-elle son sacre? Parfaitement! Mais en se réveillant à la 80e minute, comme une fleur un lendemain d'hier, Kylian nous a permis de vibrer entre l'injustice et le miracle. Il a aussi rendu possible la rencontre du génie d'hier et celui de demain. Celle qui nous a précisément manqué durant la première heure de jeu. Voilà les amoureux du grand spectacle rassurés: dimanche, certes un peu tardivement, Messi et Mbappé se sont bel et bien passés le témoin.
«Que le meilleur gagne!» restera l'injonction la plus inutile et malhonnête de l'histoire du football.