«Le 7 mai 2020, le cycliste professionnel Heinrich Haussler se lance dans un entraînement qui va changer sa vie.» C'est par cette phrase, puissante et dramatique, que le magazine Spiegel a débuté son article à propos d'Heinrich Haussler cette semaine.
Né en Australie et débarqué en Allemagne, à Fribourg, à l'âge de 14 ans, Haussler est un dur au mal, capable de supporter des météos capricieuses rencontrées, par exemple, sur les classiques flandriennes. Le mauvais temps et les longs efforts, ils les affectionnent. Comme en témoigne sa victoire lors de la 13e étape du Tour de France 2009, sous la pluie et en solitaire, ou encore sa deuxième place lors de Milan-San Remo 2009, la course la plus longue du calendrier cycliste.
Mais à 36 ans et avec 22 succès professionnels au compteur, le cycliste de la Bahraïn Victorious sent que son corps lui joue des tours. Ce 7 mai 2020, il ressent les premiers signes d'un mal qui aurait pu l'emmener entre quatre planches.
Comme l'écrit noir sur blanc le magazine allemand:
Le coureur souffre de problèmes cardiaques. Ils ne sont pas nouveaux dans le cyclisme pro et sont même de plus en plus fréquents ces derniers temps. Sonny Colbrelli ou Nathan Van Hooydonck ont dû mettre la flèche à gauche du jour au lendemain. Même si le sport d'endurance est bon pour le cœur, les efforts à répétition peuvent peser. Celui d'Haussler n'arrivait tout simplement plus à subvenir aux besoins du sport pro.
Les athlètes qui s’entraînent beaucoup, durement et sans périodes de récupération suffisantes sont particulièrement à risque. Heinrich Haussler s'entraînait aussi lorsqu'il était enrhumé - il est déconseillé de faire du sport de manière intense avec le nez qui coule.
Après quelques passages chez le toubib, rien d'anormal n'est révélé. Haussler continue à enchaîner les sorties intensives et respecte les conseils donnés par le corps médical: si l'accélération du cœur ne s'arrête pas d'elle-même, il doit simplement se boucher le nez et faire entrer de l'air, ceci afin de calmer l'accélération de son pouls.
L'Allemand compose avec ses tracas cardiaques, mais cherche à comprendre pourquoi. Il attribue son trouble à sa consommation excessive de café. Il boit jusqu'à six doubles expressos par jour. Les médecins de l'hôpital universitaire de Fribourg estiment également qu'il est plausible qu'un taux de caféine aussi élevé perturbe le rythme cardiaque. Des problèmes de déshydratation sont aussi avancés. Mais ni la caféine, ni le manque d'hydratation ne sont la cause.
A la suite d'un camp d'entraînement en 2022, un contrôle de routine mené par les médecins de son équipe décèle que le cœur d'Haussler a changé et que ce dernier pourrait souffrir de tachycardie ventriculaire.
A son retour, il doit observer une pause forcée. Une torture pour cet amoureux de la pédale. Après deux semaines sans activité, il décide d'aller faire un petit jogging. 4 ou 5 kilomètres plus tard, il s'effondre après avoir senti une violente douleur - son pouls atteint 260 battements par minute.
Il essaie de se relever, mais l'Allemand reste à terre, sans pouvoir se remettre sur les cannes. Le Spiegel écrit:
Rapatrié chez lui par un automobiliste, le cycliste se fait une injection de magnésium dès son arrivée à son domicile, mais rien n'y fait. Son pouls ne baissant pas, il décide d'appeler un médecin et file à l'hôpital. Il ingurgite des médicaments pour faire descendre son rythme cardiaque et souhaite rentrer au bercail. Mais le corps médical refuse et lui annonce que sa carrière professionnelle est terminée.
Depuis, Heinrich Haussler a fait le deuil de sa carrière de cycliste et vit avec un défibrillateur implanté sous la peau, comme le footballeur danois Christian Eriksen. Son rôle est à présent dans les voitures, avec la casquette de directeur sportif dans l'équipe Bora-Hansgrohe. Désormais, il ne lui est plus possible de faire des intensités sur la bicyclette, mais il peut pédaler tranquillement dans sa région de Fribourg. (svp)