La Nati a été éliminée mardi soir en 8e de finale de la Coupe du monde après une claque contre le Portugal (1-6). La fin abrupte de cette aventure au Qatar coïncide aussi avec celle des fans suisses sur place. Deux d'entre eux, Roman Freuler et Marcel Rohner, racontent comment ils ont vécu leur séjour.
Le football et la bière vont généralement de pair. Mais au Qatar, la combinaison des deux est plus compliquée. En effet, l'Etat a des règles strictes en ce qui concerne la consommation d'alcool.
Toujours est-il que le tournoi au Qatar n'est pas devenu une Coupe du monde de l'abstinence. C'est ce qu'affirme Roman Freuler, qui a suivi les deux derniers matchs de la Nati sur place. «Ce n'est pas comme si tout le monde était sobre», raconte-t-il. Selon lui, il y a de l'alcool dans presque tous les restaurants rattachés à un hôtel international et sur la Fan Zone.
Par contre, il faut mettre la main à la poche pour une bière. «En ville, la bière coûte entre 12 et 14 francs. Sur notre bateau de croisière, c’est 16 francs pour quatre décilitres.»
«Toute la Suisse a l'impression que nous sommes ici à sec», s'amuse Marcel Rohner, autre fervent supporter de la Nati. «Mais ce n'est définitivement pas le cas.» Si l'on fait jouer ses contacts, on peut même se procurer un gin tonic «de manière semi-illégale».
Roman Freuler a choisi un hébergement spécial pour son séjour. Il dort sur un bateau de croisière ancré au large de Doha. Coût: 300 francs par nuit.
«Plus de 6000 personnes sont logées sur le bateau», raconte-t-il.
Le bateau ressemble à une petite ville. Il y a des galeries marchandes, des restaurants et des piscines. «Le soir, dans les bars du bateau, nous sommes tous mélangés. Là, les Brésiliens, là les Équatoriens, ici nous les Suisses. Des chants de supporters sont régulièrement entonnés. De manière tout à fait pacifique.»
Freuler est rentré en Suisse dimanche. Si la Nati s'était qualifiée pour les quarts de finale mardi, il se serait à nouveau envolé pour le golfe Persique. En prenant congé le vendredi et en rentrant le dimanche. «Du point de vue des supporters, ce n'est certainement pas une Coupe du monde à l'européenne», observe-t-il.
Est-ce que ça nuit à l’ambiance? «Non», répond Freuler. Au contraire, «c'est une fête entre gens de tous les pays imaginables». Selon lui, de nombreuses personnes ont fait le déplacement depuis les pays arabes et les fans d'Amérique du Sud sont également nombreux. On entend beaucoup de chants dans la ville et dans la fan zone.
Son compatriote Marcel Rohner confirme:
On discute sans cesse avec des gens que l'on n'aurait peut-être pas rencontrés autrement. «Par exemple avec des personnes d'Arabie saoudite», témoigne Freuler. «C'est pourquoi les neuf jours que j'ai passés à Doha ont été fantastiques.»
Les fans sont tout à fait pacifiques les uns vis-à-vis des autres, soulignent tant Freuler que Rohner. L'organisation est également impeccable. Certes, il faut faire passer des centaines de milliers de supporters à travers la ville chaque jour de match, mais ça fonctionne parfaitement.
«Les stades ne sont pas toujours pleins», constate Freuler. «Les véritables virages de supporters sont souvent relativement petits. Surtout lorsque deux équipes européennes s'affrontent.» Selon lui, il y a beaucoup plus de supporters neutres que lors d'autres grands tournois. Ça se ressent naturellement, explique le supporter de la Nati:
Pourtant, les matchs de la Nati sont des événements inoubliables pour les deux fans. Surtout lorsque les hommes de Murat Yakin gagnent. Après le match contre la Serbie, Rohner a bien célébré le succès. «Nous avons fait la fête au bar avec des Tunisiens et des Mexicains jusqu'à 4 heures du matin. Ensuite, nous avons continué à faire la fête devant notre appartement jusqu'à 8 heures», raconte le leader des supporters, qui avait son anniversaire le jour de cette victoire 3-2.
La situation des droits de l'homme au Qatar a fait l'objet de nombreuses discussions. Mais préoccupe-t-elle vraiment les supporters sur place? Pas vraiment, selon Roman Freuler:
Lui-même est conscient des critiques et estime qu'il est juste qu'elles soient exprimées, «tant qu'elles sont objectives».
Mais il tient à souligner: «Les supporters du Brésil, d'Allemagne, d'Argentine ou d'Arabie saoudite ne peuvent pas être tenus pour responsables des infractions.» Selon lui, il est agréable de voir que le football peut tout de même unir – au niveau des supporters en tout cas.
Au début de la Coupe du monde, une rumeur s'est répandue selon laquelle les leaders des supporters des pays participants étaient payés par le Qatar et la Fifa. Marcel Rohner s'offusque: «Mes collègues m'ont payé une bière pour mon anniversaire, je n'ai rien reçu d'autre», affirme le chef des supporters suisses. «Je n'ai été soutenu financièrement par aucune organisation. J'ai tout payé moi-même.»
Traduit de l'allemand par Léon Dietrich