Sion s'est métamorphosé et est prêt à gagner la Coupe
Cette saison, un fan du FC Sion a lâché ce commentaire sur le web: «Cette relégation, c'était un mal pour un bien». Même si la culbute en Challenge League en juin dernier a été douloureuse pour le club valaisan et ses fidèles, on ne peut que valider ce jugement aujourd'hui.
Car oui: en une année, le FC Sion s'est métamorphosé pour le meilleur. Et ce n'est pas le FC Lugano qui pourra dire le contraire. Les Tessinois iront défier les Valaisans samedi (20h30) dans leur antre, un chaudron de 14'000 spectateurs (guichets fermés) prêt à exploser pour un nouvel exploit en Coupe de Suisse, une compétition si spéciale pour Sion. Il y a treize mois, pour la réception de ce même Lugano le 1er mars 2023 en quarts de la Coupe, l'ambiance à Tourbillon était toute autre. En un mot: glauquissime.
Les Sédunois, alors avant-derniers du classement, s'embourbaient dans la crise et venaient de prendre une énième claque (4-0) à domicile face à Saint-Gall. A l'issue de cette défaite mortifiante, qui avait coûté sa place à Fabio Celestini, des fans valaisans mettaient le feu à un maillot de Mario Balotelli accroché au grillage.
Quatre jours plus tard contre Lugano, le kop valaisan faisait grève les 20 premières minutes du match, multipliait les banderoles anti-Constantin (alors sur le banc, en intérim) et voyait ses protégés s'effondrer (0-3). Mais l'atmosphère sera complètement différente ce samedi. Voici quatre points qui expliquent pourquoi. 👇
Une dynamique positive
Primo, tout roule sportivement du côté de Tourbillon cette saison. Sion est leader de Challenge League, avec un bilan plus qu'honorable (19 victoires, 10 nuls et seulement 3 défaites). C'est vrai, les Valaisans viennent de s'incliner face à leur dauphin Thoune (2-1) et ne comptent plus que quatre points d'avance (avec un match en plus) sur les Bernois. Mais ils sont assurés de terminer, au pire, 2es et de disputer le barrage contre l'avant-dernier de Super League, une double confrontation qu'ils peuvent envisager sereinement. Leur victoire – amplement méritée – en quarts de la Coupe face à Young Boys (2-1), meilleure équipe du pays, doit leur donner confiance.
Logiquement, ces bons résultats amènent un fort soutien du public. Les Valaisans comptent, en moyenne, 6'255 spectateurs cette saison. Une très belle stat' pour une équipe de 2e division et, surtout, un nombre que le FC Sion n'arrivait plus à atteindre en pleine crise à la fin du dernier exercice. Face à YB, ils étaient déjà plus de 14'000 à Tourbillon pour pousser les leurs.
Même sans éplucher les statistiques, on se rend compte de l'engouement retrouvé pour l'équipe valaisanne: son kop fait souvent le plein, à domicile comme à l'extérieur, avec régulièrement de superbes tifos. Une autre preuve? L'accueil du bus des joueurs au stade face à Young Boys le 29 février dernier.👇
L'arrivée du bus du @FCSion à 1h30 du coup d'envoi 🔥 pic.twitter.com/Gcr8ytJWpZ
— Christophe Moreillon (@ChrisMoreillon) February 29, 2024
Un recrutement intelligent
La forme des Sédunois cette saison ne doit rien au hasard. Les experts sont unanimes: le FC Sion possède un contingent pour la Super League. Sans une gestion intelligente, le club n'aurait pas eu droit à cet éloge. Habitués à chambouler l'effectif lors de chaque mercato ces dernières années et engager des starlettes en bout de course, ce qui exaspérait les fans et décontenançait les spécialistes, les dirigeants valaisans ont su, cette fois, construire un effectif cohérent et compétitif.
Ils ont, d'abord, pu garder leurs cadres (Ziegler, Lavanchy, Baltazar, Schmied, Chouaref ou encore Bua), dont certains se subliment cette année. On pense notamment à Bua, Chouaref ou Lavanchy, qui ont tous passé un cap par rapport à l'exercice précédent.
Avec Fayulu et Berdayes, Sion a aussi rapatrié deux jeunes joueurs du cru, formés au club, qui ont un rôle crucial: le premier est le gardien titulaire, le second illumine son couloir droit (3 buts, 2 passes décisives) et est l'un des éléments les plus utilisés.
Et puis, les recruteurs sédunois ont eu fin nez en renforçant l'effectif avec des joueurs d'expérience. Parmi eux, Nias Hefti (six ans de Challenge League entre Wil, Thoune et Stade Lausanne Ouchy) et surtout Dejan Sorgic. L'avant-centre (34 ans) est brillant: il a marqué 10 goals et délivré 5 passes décisives en 32 matchs de championnat. En Coupe, l'ex-Lucernois en est déjà à 4 pions en 3 rencontres. Des stats autrement plus solides qu'un certain Mario Balotelli l'an passé, pourtant nettement mieux payé que son successeur mais qui s'est révélé être une énorme erreur de casting. A croire que les dirigeants sédunois ont appris de leurs fautes.
Sagesse sur le banc
Sur le banc aussi, le FC Sion est méconnaissable. Didier Tholot, engagé au début de la saison, est toujours en place et n'a jamais été contesté. Au contraire, le technicien français est adulé par le public et, fait rare, par son président Christian Constantin. C'est le jour et la nuit par rapport à la saison dernière, où ce même «CC» avait épuisé... cinq coachs, dont lui-même (Tramezzani, Celestini, Constantin, Bettoni puis à nouveau Tramezzani).
Didier Tholot est donc bien parti pour vivre une saison entière dans le costume d'entraîneur. Un tel exploit n'avait pas été réalisé depuis l'exercice 2015-2016 et un certain... Didier Tholot. Le Français (60 ans) s'apprête même à faire le triplé, puisqu'outre 2015-2016, il était présent tout l'exercice 2009-2010. On n'invente rien en affirmant qu'une certaine stabilité est essentielle en football pour obtenir des résultats...
Aucune frasque extrasportive
Si Christian Constantin est devenu sage cette saison quant à la gestion de ses entraîneurs, il l'est aussi hors du terrain. Là encore, le contraste avec l'an dernier est saisissant. Le président du FC Sion avait notamment menacé publiquement de retirer son équipe du championnat à cause d'un arbitrage général dans la ligue qu'il jugeait anti-sédunois, sur fond de victimisation romande. «Il y a des règles pour les Suisses alémaniques et pour les Romands. Ce ne sont pas les mêmes. Autant s'arrêter là!», pestait-il.
On se souvient aussi de son coup de gueule à la mi-temps de Servette-Sion, quand il était venu retendre les bretelles à ses joueurs et son coach alors que l'équipe se faisait balayer (3-0 après 45 minutes, 5-0 au final). Une intervention qui avait coïncidé avec la rupture de contrat de David Bettoni et le dernier match de Balotelli. Et puis, il y avait aussi ses jérémiades sur le manque de soutien de la ville de Sion et des acteurs locaux, qui l'ont poussé à menacer de quitter le club en 2024 et de retirer celui-ci du foot pro.
Comme par magie, tous ces soucis ont disparu cette saison. En grande partie grâce à la spirale sportive positive du FC Sion, c'est certain. Mais il y a aussi eu cet événement en janvier dernier: l'Etat du Valais, la ville de Sion et l'association valaisanne de football ont signé une lettre d'intention pour la pérennisation du football professionnel dans le canton. Concrètement, ces instances s'engagent à développer une académie de formation cantonale, un stade d’environ 15'000 places assises et un projet immobilier censé financer les activités du club.
Depuis, «CC» n'a plus jamais évoqué son désir de lâcher «son» FC Sion. Il ne râle plus contre la ligue ni les arbitres depuis des mois et ne semble pas interférer dans le vestiaire. Résultat? Les banderoles hostiles du kop à son encontre ont cessé, et c'est en mode «union sacrée» que les Sédunois affronteront Lugano. Avec un tel état d'esprit, un 14e sacre en Coupe et une promotion en Super League sont entièrement à leur portée.
