Les Saoudiens veulent le Mondial 2030 et savent ce qu'ils doivent faire
La sélection saoudienne est déjà de retour à la maison. Mais avant ça, elle a créé la plus grande surprise de ce Mondial 2022: battre l'Argentine 2-1. Un exploit historique. A tel point que le prince héritier, Mohammed ben Salmane, a décrété un jour férié et a offert une Rolls-Royce à chaque joueur. L'Arabie saoudite a certes été éliminée dès la phase de poules, mais elle a montré que, contrairement au Qatar, elle était compétitive lors d'une Coupe du monde.
>>> Suivez en direct l'évolution de la Coupe du monde 2022
Dans huit ans déjà, une nouvelle édition devrait se dérouler dans le désert. L'Arabie saoudite veut organiser, dans une candidature commune avec l'Égypte et la Grèce, le Mondial 2030. Et il devrait à nouveau avoir lieu en hiver. En tant que leader de cette candidature, les Saoudiens seraient prêts à soutenir des projets d'infrastructure chez ses compères. L'Egypte, et surtout la Grèce, servent avant tout d'arguments.
En effet, il n'y a aucune raison pour que la Coupe du monde revienne déjà dans la péninsule arabique après le tournoi de 2026 en Amérique du Nord. Mais un récit presque romantique est en train de naître: le premier Mondial sur trois continents doit réunir l'Europe, l'Asie et l'Afrique. C'est une argumentation que la Fifa aime et souhaite propager.
Exécutions, guerre et photo polémique
La situation des droits de l'Homme en Arabie saoudite est encore bien pire qu'au Qatar. Selon Amnesty International, les femmes sont systématiquement discriminées, la torture est pratiquée dans les prisons, les personnes qui travaillent dans le journalisme ou qui s'engagent pour les droits de l'Homme sont persécutées, la discrimination religieuse existe et les exécutions sont nombreuses.
En un seul jour, en mars de cette année, le royaume a exécuté 81 personnes. Enfin, le Yémen est en proie depuis sept ans à une guerre déclenchée par l'Arabie saoudite. Selon les estimations du Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA), cette guerre a causé la mort de près de 250 000 personnes. De plus, des millions de Yéménites sont toujours confrontés à la plus grande crise humanitaire du monde, plus de la moitié de la population souffrant de graves pénuries alimentaires.
Mais dans le football, de tels sujets sont volontiers occultés. Notamment à la Fifa. L'actuel président Gianni Infantino s'est volontiers laissé photographier avec le prince héritier, tant lors de la Coupe du monde 2018 que lors du tournoi actuel au Qatar. Il y a cette fameuse photo du match d'ouverture en Russie il y a quatre ans: ben Salmane à gauche, le président russe Vladimir Poutine à droite et Infantino au milieu. Pour Infantino, se trouver à côté de deux hommes qui ont déjà déclenché des guerres à ce moment-là et qui sont responsables de nombreuses morts ne semble pas être un problème.
Aujourd'hui encore, Infantino veille à ne pas brusquer ses partenaires. Il n'a jamais mentionné la guerre d'agression russe en Ukraine, mais s'est prononcé pour un cessez-le-feu pendant la Coupe du monde lors du sommet du G20. Le président de la Fifa entretient également de bonnes relations avec l'Arabie saoudite et le prince héritier. Selon certaines rumeurs, il verrait son avenir professionnel dans le monde arabe s'il devait quitter son poste en 2027. Le Valaisan habiterait déjà depuis un certain temps au Qatar, mais il continue de payer ses impôts en Suisse. Il pourrait alors transférer son domicile en Arabie saoudite. Il apparaît même brièvement dans une vidéo publicitaire pour ce pays.
Messi, Ronaldo et Newcastle United
Lionel Messi fait lui aussi de la publicité pour l'Arabie saoudite. Le septuple Ballon d'or s'est fait engager à grands frais. Ainsi, il fait de la promo sur son compte Instagram avec une photo romantique et le hashtag «VisitSaudi» incitant à visiter le pays au bord de la mer Rouge. Petite anecdote: l'Argentine, pays d'origine de Messi, prévoit aussi de se porter candidate à l'organisation de la Coupe du monde 2030, avec le Paraguay, l'Uruguay et le Chili.
Outre Messi, les Saoudiens souhaiteraient désormais faire appel à son éternel rival, Cristiano Ronaldo. Le Portugais aurait reçu une offre du club saoudien d'Al-Nassr. La star y percevrait environ 200 millions d'euros en deux ans et demi. Au cas où Ronaldo préférerait continuer à jouer en Europe, l'Arabie saoudite dispose d'une garantie: Newcastle United, qui regorge d'argent saoudien, serait également intéressé à enrôler l'ex-joueur de Manchester United.
Les Saoudiens ne se sont pas seulement inspirés du Qatar en matière de marketing (David Beckham est l'un des ambassadeurs du Mondial 2022). Tout comme le petit émirat, l'Arabie saoudite s'implique dans le foot européen de clubs. Alors que «Qatar Sports Investments» a transformé depuis 2011 le Paris Saint-Germain en le faisant passer d'un club de milieu de tableau en France à un mastodonte mondial, un consortium mené par le fonds souverain saoudien «Public Investment Fund» a repris Newcastle United en novembre 2021.
Le club de Premier League est ainsi devenu d'un seul coup le club le plus riche du monde. A l'époque, Newcastle était dernier du classement de Premier League, mais désormais l'équipe de l'international suisse Fabian Schär occupe la troisième place. C'est réaliste que les Magpies puissent aussi devenir un club de top niveau en Europe. Avec ou sans Ronaldo.
Comme le Qatar, l'Arabie saoudite a recours au sportwashing pour polir son image. Dans la région du Golfe, on assiste à une véritable compétition pour les manifestations sportives les plus prestigieuses. L'Arabie saoudite accueille depuis peu des courses de Formule 1 ou des exhibitions de tennis bien dotées. Elle finance aussi un nouveau circuit de golf. Et maintenant, comme au Qatar, la Coupe du monde de football, plus grand événement sportif planétaire, devrait suivre.
D'ici 2030, la sélection saoudienne a le temps de se préparer pour réussir à passer la phase de groupes. Elle ferait mieux que cette année et, surtout, que son voisin qatari, piteusement éliminé après trois matchs où il a été d'une faiblesse criarde.


