Est-il encore assez bon? Ou sa convocation est-elle un peu due à la construction d'une légende? C'est la question que se posaient, avant les Mondiaux, plusieurs journalistes étrangers à propos d'Andres Ambühl.
Le Grison aura 40 ans en septembre et est toujours professionnel dans un sport où les stars sont déjà plusieurs fois millionnaires à 24 ans. Il est le joueur le plus âgé du tournoi. De telles questions sont donc compréhensibles.
La réponse est simple: sa 18e convocation pour des championnats du monde est liée à ses performances. L'attaquant du HC Davos et de la Nati est toujours l'un des meilleurs, au plus haut niveau mondial. Son bilan jusqu'à présent dans ce tournoi? Près d'un quart d'heure de glace (14:45 minutes) en moyenne par match, quatre buts et un assist en sept parties.
Et ces quatre buts, il les a notamment marqués contre le Canada et la République tchèque. Autrement dit, contre des titans. Ce ne sont pas des buts «bon marché» contre le Kazakhstan ou la Slovénie.
Le secret de la réussite d'Andres Ambühl réside dans son calme. En fait, il joue comme il parle. Et vice-versa. Lorsqu'il s'exprime, c'est à l'image de son jeu: simple, réfléchi et souvent d'une précision déconcertante. Ça a été le cas, par exemple, quand on lui a demandé de commenter ses deux buts (le 2-1 et le 3-1) contre la République tchèque:
Le hockey peut être aussi simple que cela. Mais il ne faut pas s'y méprendre: sur la glace, le Davosien est toujours en mouvement. Il patine, patine et patine encore. Plus vite et plus légèrement que ses adversaires. Mais il parle peu. Ce qu'il préfère, c'est ne pas avoir à parler.
Ses deux buts contre la République tchèque sont le produit de ses qualités: il a pu exploiter ces deux passes parce qu'il patine instinctivement vers le bon endroit, avec l'expérience de plus de 1500 matchs, et parce qu'il est si agile qu'il atteint cette position au bon moment.
A 39 ans, être encore l'un des meilleurs joueurs dans l'une des meilleures équipes d'un tournoi mondial, c'est tout simplement extraordinaire. Comment Andres Ambühl fait-il? L'entraîneur national Patrick Fischer ne trouve pas de réponse à cette question.
Interrogé sur la manière dont il a arrêté le processus de vieillissement, Andres Ambühl a un jour déclaré:
Mais le vétéran remarque quand même sa différence d'âge. «Je vois qu'autour de moi, dans le vestiaire, tout le monde rajeunit.»
Une chose est certaine: pour rester pareillement en forme, l'attaquant de 39 ans n'a pas changé son alimentation. Au contraire de beaucoup de sportifs qui continuent à cartonner à un âge élevé, comme c'est par exemple le cas de Cristiano Ronaldo (38 ans), qui surveille méticuleusement tout ce qu'il mange. «Ça me prend trop de temps d'étudier ce que je dois ou ne dois pas manger», se justifie Ambühl.
Andres Ambühl a grandi dans une ferme à Davos. Le fils de paysan de montagne qui a fait carrière dans le sport: un vrai romantisme sportif helvétique. Serait-il devenu paysan si le hockey sur glace n'avait pas marché? «Oui, c'est possible», reconnaît-il.
Entre-temps, il a obtenu son diplôme de commerce. Le «hockeyeur éternel» ne se fait pas de souci pour son après-carrière: «Je suis conscient que tout sera différent et que la camaraderie dans le vestiaire me manquera. Je suis impatient de voir à quoi ressemblera cette autre vie.» Ses collègues sont d'avis qu'il devrait devenir directeur sportif. Andres Ambühl est en effet considéré comme une «encyclopédie du hockey», qui connaît tout sur ce sport.
A Riga, le Grison partage sa chambre avec son «jumeau de hockey» Enzo Corvi (30 ans). Lors des Mondiaux, il est fréquent que les hockeyeurs soient logés dans des chambres à deux. Les deux hommes attaquent dans la même ligne au HC Davos et avec la Nati à Riga. Ils sont aussi souvent ensemble dans leur temps libre. Enzo Corvi a raconté que son compère et lui ne se parlent pas beaucoup et que, quand ils le font, la discussion ne tourne pas autour du hockey. Dans leur chambre d'hôtel à Riga, c'est pareil.
En fait, Enzo Corvi et Andres Ambühl se comprennent sans trop de mots. C'est ça, la magie de leur jeu.
Adaptation en français: Yoann Graber