Des vidéos qui circulent sur les réseaux sociaux montrent des supporters argentins, brésiliens, anglais, espagnols et allemands qui seraient arrivés au Qatar en avance. Tout semblerait normal si les fans en question n'avaient pas tous la peau brune. Les soupçons de faux supporters, payés par le Qatar pour mettre de l'ambiance, ont été relevés par de nombreux médias. Certains journaux britanniques ont été les premiers à accuser le Qatar de payer des ouvriers pour jouer le rôle de fan, face au manque d’affluence. Des reportages en caméra cachée semblent le confirmer.
Mais ce n'est pas toujours le cas. Les vrais supporters existent aussi et seraient même très nombreux. Selon l'AFP, des images prises le 12 novembre montrent de réels travailleurs immigrés venus célébrer le football et les différentes équipes qu'ils supportent. Les manifestations et les rassemblements sont rares au Qatar et sont normalement adossés à une sécurité renforcée. Cette manifestation aurait donc été exceptionnellement autorisée pour les fans de l'Argentine et du Brésil, les deux équipes les plus populaires parmi la diaspora indienne qui aime le football. Vendredi, ces supporters portant les maillots de leurs équipes favorites ont afflué vers la Corniche, la route qui longe le front de mer à Doha. Ils ont été estimés à environ 8000.
Les fans venaient principalement de l'Etat du Kerala, un bastion du football du sud de l'Inde. Cette population représente une grande partie de la communauté d'immigrés indiens au Qatar qui compte environ 750 000 personnes. Un chiffre relativement conséquent quand on sait que le Qatar a une population totale d'environ 2,9 millions de personnes. Si un certain nombre d'entre eux sont des ouvriers modestes, le Kerala est réputé pour la formation de ses ingénieurs et compte de nombreux expatriés au pouvoir d'achat conséquent. Ils n'ont donc aucune raison d'être payés pour célébrer le sport. Cette ancienne colonie portugaise majoritairement catholique et dont les habitants portent encore des noms de famille latins est, en Inde, l'un des rares bastions du foot. Au Kerala, il est aussi populaire que le cricket, le sport national du pays.
Sam Wallace, journaliste britannique au Telegraph, est actuellement au Qatar. Il explique avoir été accueilli à l'hôtel des Anglais à Doha par des dizaines d'expatriés indiens de l'Etat du Kerala, supporters passionnés des Three Lions.
Gireesh Edavana, 42 ans, un ingénieur en mécanique du Kerala, vivant à Doha, a réfuté les allégations selon lesquelles lui et ses amis avaient été payés pour être là. Il a déclaré que ses insinuations étaient «entièrement fausses» et que la plupart d'entre eux avaient acheté leurs billets et payé leurs maillots de leur poche. Ils sont plus de 500 supporters anglais du Kerala dans ce seul groupe de supporters. «Nous ne recevons d'argent de personne pour soutenir l'Angleterre», a-t-il déclaré. «Nous sommes de vrais fans.»
Ajmal Ashraf, 28 ans, est ingénieur informatique. Il vit et travaille à Doha. Ce supporter argentin convaincu espère voir certains des matchs de l'équipe. Son fan-club Kerala Argentina compte 190 000 abonnés sur Instagram. «C'est parce que nous aimons Messi», a-t-il expliqué. «C'est le dieu du football et ce serait un rêve devenu réalité de le voir gagner la Coupe du monde.»
L'Inde n'est pas une nation de football. Classée 104e au classement FIFA, la sélection n'a jamais grimpé plus haut que la 94e place. Sa dernière participation à la Coupe du monde remonte à 1950 au Brésil, où l'équipe avait déclaré forfait pour plusieurs raisons: le coût du voyage et le fait que la FIFA lui avait refusé le droit de jouer… pieds nus.