Du haut de ses 22 printemps, Léon Marchand a marché sur l'eau et a lancé sa moisson grâce à son premier titre olympique en 400 m 4 nages, remporté haut la main.
Détenteur du record du monde sur la distance, avec un temps stratosphérique de 4'02''50, le Toulousain n'a pas battu sa marque, mais pulvérisé le record olympique de... Michael Phelps.
Cette première breloque est une première étape sur le chemin de la gloire éternelle du Français. Léon Marchand devrait ensuite s'aligner sur le 200 m papillon et du 200 m brasse (mercredi 31 juillet) avant de nager le 200 m 4 nages vendredi, un exercice qui lui a permis d'être sacré champion du monde à deux reprises. Il est aussi annoncé en relais.
Alors, pour faire connaissance rapidement avec le phénomène, on vous le présente en cinq points.
Le prodige a toujours senti le chlore lui caresser les narines et lui remplir les oreilles. Son père, Xavier Marchand, vice-champion d’Europe (1997) et vice-champion du monde (1998), et sa mère, Céline Bonnet, multiple championne de France et qualifiée pour les JO de 1992 à Barcelone, ont écumé les piscines. Une voie toute tracée pour le gamin, qui n'a pas attendu longtemps avant de plonger la tête la première? Pas vraiment. Enfant, il n'aimait pas tellement la natation. Les premières nages n'avaient rien d'un ballet aquatique radieux et gracieux.
Son père parlait même d'un essai peu concluant dans Le Monde. La natation ennuyait le gamin, qui avait froid. Le bonnet de bain à la poubelle, le petit Léon décidait de fouler les tatamis, puis de s'essayer au rugby. Mais l'appel du chlore lui revenait à l'âge de 7 ans. C'est à 15 ans, au moment où il intégrait le pôle espoir de Toulouse, qu'il décidait de devenir nageur.
Ses parents ont tenté de lui éviter le traquenard du sport professionnel, de peur que Léon ne subisse le poids du patronyme. Mais le gamin avait la tête dure et faisait fi des inquiétudes de ses géniteurs, eux qui considéraient «ce sport comme assez difficile». Surtout, dans les colonnes du Monde, le père avoue qu'il trouvait «dommage que son fils y perde son temps». Les parents n'ont pas mis la pression sur le rejeton: «C'est dans leur personnalité, ils ne sont pas du genre à se mettre en avant», assure Michel Coloma, le dirigeant du club de natation toulousain.
Marchand s'est envolé pour les Etats-Unis, à l'Arizona State University (ASU), pour gratter titres et records. Bob Bowman, ancien coach de la légende Michael Phelps, a peaufiné la technique du gamin de Toulouse. L'Américain n'est pas étranger à la progression fulgurante du Français.
Le départ de Marchand au pays de l'Oncle Sam, dans la foulée des JO de Tokyo 2022, pour fuir la pression médiatique française qui commençait à poindre, selon les parents, lui a fait gagner six secondes. Une évolution fulgurante qui laissait le président de la Fédération française de natation (FFN) bouche bée après les Mondiaux de Fukuoka:
Sa grande force reste son rapport poids-puissance, qualifié d'extraordinaire par les observateurs. Mais surtout, c'est sa coulée qui lui fait gagner des dixièmes importants. Il réussit à utiliser «cette arme du début à la fin», avec une régularité d'orfèvre, selon Nicolas Castel, son formateur à Toulouse. Selon les calculs, sur les huit coulées de l'épreuve, le Français a grappillé deux secondes et quatre centièmes.
Selon des calculs de Robin Pla, l'expert data de la Fédération française de natation, Léon Marchand a passé 94,35 m sous l'eau quand ses adversaires - notamment son dauphin Carson Foster - en ont passé 81,55.
Son compagnon d'entraînement, le Hongrois Hubert Kos, est lui aussi béat d'admiration. «Ce qui m'impressionne le plus avec Léon, c'est cette capacité qu'il a d'aller jusqu'au bout, sa dernière coulée qu'il peut prolonger jusqu'à douze mètres», confiait-il à L'Equipe. Marchand a façonné son sacre grâce à ces phases dites «non nagées».
Phelps mesure 1,93 m pour 90 kilos et possède une envergure de 2,01 m. Marchand avoue 1,87 m pour 77 kilos. Une chose est certaine, il ne pourra jamais égaler l'envergure de l'homme aux 28 médailles olympiques.
Comment fait-il pour gommer ce déficit physique? Si la longueur des bras reste importante et les grands segments un atout, Marchand possède un avantage plus subtil: ses mains.
Nicolas Castel le décrit dans un article de L'Equipe:
En Arizona, l'étudiant Marchand se fond dans la masse et admet une passion pour les jeux vidéo et spécialement l'aviation. Le jeune homme a par ailleurs déjà passé ses brevets de pilote.
Aux Etats-Unis, il suit un cursus de programmation informatique, entamé en 2021 et étalé sur quatre ans. Et son quotidien est millimétré, comme le décrivait Le Monde. Le réveil sonne à 5 heures du matin pour un premier entraînement à 6 heures. Le phénomène de 21 ans reprend le chemin des bancs universitaires entre 10 heures et midi. Un petit repas et le voilà parti pour enfiler la combinaison à 14 heures sous la houlette de Bob Bowman.
Des horaires calibrés, tout comme son alimentation. Le programme est poussé si loin dans la performance qu'un test ADN a été effectué pour savoir quels ingrédients le nageur toulousain pouvait ingérer. Maintenant, la première étape pour conquérir l'Olympe.