Le début de la saison de ski s'approche à grands pas et les critiques pleuvent de partout. Les images du glacier Théodule, théâtre des descentes Coupe du monde à Zermatt (11-12 novembre) ont fait le tour des médias et provoqué la révolte des défenseurs de la nature.
A Sölden, en Autriche, le feu vert a été donné par les organisateurs pour les traditionnelles courses sur le glacier du Rettenbach (28 et 29 octobre), mais Greenpeace était monté aux barricades, jugeant que des portions du glacier étaient détruites pour les épreuves.
Si les organisateurs se démènent pour proposer des pistes praticables, coûte que coûte, les coureurs, eux, sont également à la peine pour peaufiner leur préparation estivale. Et spécialement en vitesse, où il faut souvent baliser et sécuriser de longs tronçons.
Vincent Kriechmayr se plaignait de ne pouvoir accumuler les kilomètres avec ses skis de vitesse. Dans les médias autrichiens, il parlait «de ne plus avoir d'alternatives» pour s'entrainer à la suite d'un camp en Argentine, rendu difficile par de grosses chutes de neige.
Julien Vuignier, l'entraîneur des slalomeurs suisses et entraîneur personnel de Loïc Meillard, nous rappelle qu'il est difficile de mettre en place un entraînement de descente. Les lieux pour le faire ne se bousculent pas au portillon.
Loïc Meillard, technicien mais également aligné en super-G, compose, comme ses collègues, avec ces problèmes de piste d'entraînement. «L'équipe s'est préparée durant trois semaines et demi à Ushuaïa, en Argentine. Loïc a pu faire 4-5 séances de super-G», nous décrit Julien Vuignier.
Odermatt et ses collègues ont pu profiter de travailler leurs courbes à grande vitesse entre fin septembre et début octobre, sur la première partie du tracé de la «Gran Becca», le nom de la piste valaisanne.
Les stages en Argentine ou au Chili sont devenus un passage obligé pour les skieurs de Coupe du monde et spécialement pour les descendeurs. «Zermatt, c’est très cher. Pour la réservation de la piste, la Suisse passe devant tout le monde», rappelle l'entraîneur valaisan. Par conséquent, il est difficile pour les autres nations de trouver un créneau pour s'entraîner en descente dans le Haut-Valais.
Toutes les délégations font donc le voyage jusqu'à l'autre bout du globe pour skier sur cette neige agressive, pour tester le matériel et travailler les derniers détails sur les lattes. Kriechmayr, dans les colonnes du Kronen Zeitung, disait que la préparation estivale n'avait pas été optimale; des blocs d'entraînement entiers ont dû être annulés. «Le problème, c'est qu'en Argentine, il a neigé comme jamais. Les descendeurs n'ont pu skier que 3-4 jours», nous confirme Julien Vuignier.
Mais selon le Valaisan, les descendeurs se connaissent très bien et «savent où il mettent les pieds». Face aux doutes de Kriechmayr, Vuignier rappelle le cas du néo-retraité Beat Feuz:
L'expérience et le talent du Bernois ont pesé dans la balance. De plus, si l'on se penche sur le matériel, on rappelle que les athlètes utilisent souvent des skis des saisons précédentes (les descendeurs ont souvent une paire fétiche qu'ils gardent au chaud et qu'ils ont déjà apprivoisée).
Vient la question du programme, d'un début de saison qui fait de plus en plus grogner. Cette année, les descentes zermattoises sont programmées très tôt dans l'année. Trop? Pour Julien Vuignier, «la descente de Zermatt arrive trop tôt dans le calendrier».
Les années précédentes, les premières épreuves de vitesse se disputaient à la fin du mois de novembre, à Lake Louise - une destination qui n'est plus au programme de la Coupe du monde. Mais selon le coach d'Evolène, le tracé de la «Gran Becca» est «très facile, encore plus que celui de Lake Louise». Il rappelle aussi que les entraînements seront bénéfiques avant la première descente officielle prévue pour le 11 novembre, sur les coups de 11h30.
Dans la foulée des courses de la «Gran Becca» (si elles ont lieu), les Suisses s'envoleront en direction l'Amérique du Nord, à Copper Mountain dans le Colorado, et resteront plus de trois semaines (en comptant les épreuves de Beaver Creek). «C’est la première piste d'entraînement qui est conforme pour de vraies sensations de descente», rappelle Julien Vuignier.
Mais pour skier sur les pentes du Colorado, il faut sortir le chéquier:
Le Valaisan nous confie que le service est d'excellente qualité, qu'une quinzaine d'employés bosse sur la piste et prépare un terrain d'entraînement de grande qualité. «C’est une entreprise qui gravite autour du tracé et tout est géré parfaitement.» Tout est organisé et millimétré, alors qu'en Suisse, par exemple, la préparation d'une piste d'entraînement (filets et injections d'eau) est à la charge des entraîneurs. Aux Etats-Unis au contraire, tout est prêt et les coureurs peuvent directement s'élancer sur le billard américain.
Avec toutes ces contraintes de budget, de piste et de conditions météorologiques, les spécialistes de vitesse ont dû ruser cet été pour répéter leurs gammes avant de croiser le fer à Bormio, Wengen ou encore Kitzbühel.