Suisse
Armée

Les bunkers de l'armée suisse tombent en ruine

Bunker de l'armée à Mels (SG).
Des couloirs entiers creusés dans la montagne? Bienvenue en Suisse.keystone

Les bunkers de l'armée suisse tombent en ruine

Avec la guerre en Ukraine, un changement de mentalité s'est amorcé au sein de l'armée, qui désire rénover une partie de ses bunkers. La facture est estimée à 1 milliard de francs.
06.02.2024, 06:0606.02.2024, 13:03
Andreas Maurer / ch media
Plus de «Suisse»

Enfouie dans la roche, la forteresse de Castels se trouve au-dessus de la commune de Mels, dans le canton de Saint-Gall. Elle date de la Seconde Guerre mondiale et jouait un rôle stratégique essentiel à l'époque. Nous sommes au sud du lac de Constance et l'armée suisse y surveillait sa frontière avec l'Allemagne nazie — respectivement, avec l'Autriche. La forteresse et ses canons étaient la première ligne de défense pour tirer sur les chars allemands si Hitler avait tenté d'envahir le pays.

A la fin de la guerre, le bunker a perdu de son importance et son existence n'était plus tenue secrète. Mais l'armée empêchait encore l'accès au site et interdisait aux journalistes de le photographier. En 2009, elle l'a ouvert pour la première fois aux médias et aujourd'hui, son entrée figure même sur Google Maps.

Pour le WEF et les cours de répète

Il s'agit d'une des dernières installations dans lesquelles l'armée avait continué d'investir. Les dernières modifications avaient eu lieu dans les années 1990. Les conditions y étaient auparavant précaires pour les soldats. L'humidité y était telle que les tenues de camouflage des soldats n'y étaient jamais sèches et les sanitaires étaient en outre misérables.

Bunker de l'armée à Mels (SG).
Le «Grand Hotel Castello».

Mais comme l'installation semblait importante pour l'armée, elle avait déboursé un million de francs pour sa rénovation et y avait même construit une salle de fitness. Le soulagement des soldats était tel qu'ils avaient alors installé à l'entrée un panneau avec cinq étoiles et l'inscription «Grand Hotel Castello».

Des investissements utiles, puisque le bunker est toujours utilisé par l'armée. Il accueille le centre de commandement pour les opérations de protection du Forum économique mondial de Davos (WEF). C'est là que convergent tous les renseignements liés à la manifestation, et c'est de là que l'officier responsable partage ses ordres à la troupe sur place via un système de communication protégé. En dehors du WEF, il sert aussi à loger des soldats en école de recrues et en cours de répétition. Il comprend 300 couchettes, utilisées pendant 40 semaines par an.

Près de 4000 installations concernées

Mais depuis peu, l'infrastructure est inutilisable à cause de moisissure apparue sur la paroi d'une galerie de liaison. La troupe a dû se rabattre sur des casernes, mais celles-ci sont souvent déjà occupées, notamment par des demandeurs d'asile. Ils doivent alors être logés dans des logements communaux.

«La priorité absolue va à la santé des militaires»
Porte-parole de l'armée

Ce bunker envahi par la moisissure n'est pas un cas isolé. Armasuisse gère 4000 installations actuellement utilisées par l'armée. Contacté, le département fédéral de l'armement Armasuisse, qui gère l'immobilier de l'armée, livre les chiffres clés du parc militaire suisse:

  • 5% des bâtiments sont en mauvais état au point qu'il vaudrait mieux soit les démolir, soit les rénover entièrement. Pour remplacer ces immeubles vétustes, il faudrait engager un milliard de francs.
  • 50% ont besoin d'être rafraîchis, du moins partiellement, dans les prochaines années. Il s'agit de 2000 immeubles qui valent onze milliards de francs.
  • Armasuisse vise un taux de remise en état annuel de 1,5% de tous les bâtiments vétustes. Le taux effectif varie toutefois d'une année à l'autre. L'office fédéral invoque une variation des montants disponibles. Par conséquent, en période de «manque de liquidités», les bâtiments ont tendance à se dégrader.

Les choses étaient encore pires il y a cinq ans. A l'époque, Armasuisse estimait que 70% avaient besoin d'être rénovés et que 11% n'étaient plus bons à rien, comme le révélait la Sonntagszeitung en 2019. Entre-temps, l'armée s'est séparée de 500 biens immobiliers.

Et soudain, la guerre en Ukraine

Au cours des trente dernières années, l'armée suisse a massivement réduit son infrastructure pour se réorienter vers la gestion de catastrophes. Elle a abandonné une grande partie des sites de combat et de commandement. Elle a vendu de nombreux bunkers ou les a démantelés.

En 2022, la situation s'est inversée. Avec la guerre en Ukraine, le chef de l'armée Thomas Süssli a bloqué la vente et la fermeture des installations. Les postes de commandement et les lieux d'hébergement des troupes ont soudain repris une importance stratégique. Aujourd'hui, l'armée regrette d'avoir divulgué l'emplacement de ces installations et d'avoir supprimé les réseaux de communication permettant de les desservir.

Notre entretien avec le chef de l'armée 👇

Dans le bunker de Mels, le retour de la moisissure est venu arracher quelques étoiles au «Grand Hotel Castello». Armasuisse doit aujourd'hui nettoyer tous les matelas et la literie et déshumidifier les pièces. Il faudra garantir une qualité de l'air correcte avant de pouvoir réinvestir le site. L'armée souhaite le faire dès ce printemps.

(Adaptation française: Valentine Zenker)

La plus grande pâtisserie végane du monde est bernoise
Video: watson
Ceci pourrait également vous intéresser:
1 Commentaire
Comme nous voulons continuer à modérer personnellement les débats de commentaires, nous sommes obligés de fermer la fonction de commentaire 72 heures après la publication d’un article. Merci de votre compréhension!
1
Voici la lettre qui met fin à la collaboration entre l’Unil et Israël
Le recteur de l'Université de Lausanne, Frédéric Herman, a écrit une lettre que s'est procurée watson, dans laquelle il explique à la direction de l'Université hébraïque de Jérusalem pourquoi l'Unil rompt ses liens avec cette institution israélienne.

Dans une lettre datée du 12 juin que s’est procurée watson, le recteur de l’Université de Lausanne (Unil), Frédéric Herman, indique au président et au recteur de l’Université hébraïque de Jérusalem (HUJI), Asher Cohen et Tamir Sheafer, les raisons pour lesquelles l’Unil met fin à son partenariat avec cette institution israélienne.

L’article