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Pénurie d'énergie: Pourquoi un panneau solaire ne vous sauvera pas

Avoir un panneau solaire ne vous sauvera pas du black-out, sauf si...

Avec la peur d'un black-out cet hiver, les petits panneaux solaires à installer chez soi se vendent comme des petits pains. Mais permettent-ils réellement une indépendance énergétique? Dans la majeure partie des cas: non.
21.08.2022, 11:2021.08.2022, 19:12
Jonas Follonier
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Peut-être est-ce aussi l'effet des grandes chaleurs? De peur de manquer d'électricité cet hiver, beaucoup de Suisses ont récemment fait le pas d'acheter un mini-panneau solaire pour chez eux, selon le média 20 minutes. Le risque d'un black-out dû au conflit russo-ukrainien est bien réel: c'est la Confédération elle-même qui le dit. Le Conseil fédéral s'est d'ailleurs doté d'un plan à déployer en cas de réelle pénurie d'ici à la saison froide.

Mais la disposition d'un petit panneau photovoltaïque, ou à l'inverse d'une grande ou moyenne installation, permettrait-elle vraiment de continuer à avoir de l'électricité si une coupure de courant générale devait survenir cet hiver?

La seule solution: une batterie

«Dans les faits, non», répond Christophe Ballif, professeur à l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) et directeur du Sustainable energy center du Centre suisse d'électronique et de microtechnique (CSEM), «en tout cas dans la plupart des cas». Ou plutôt oui, mais à une seule condition: mettre en îlotage son installation. Traduction: isoler ses panneaux photovoltaïques et le réseau électrique de la maison du réseau public, au moyen d’un onduleur spécial et d'un système de batterie.

Or, peu de gens l'ont fait jusqu'à présent, comme nous le confirme son confrère Christof Bucher, professeur en systèmes photovoltaïques à la Haute école spécialisée bernoise. Par conséquent:

«La grande majorité des panneaux photovoltaïques placés à domicile seront hors service en cas de black-out, car il n'y aura plus de signal de la part du réseau»
Christophe Ballif, professeur à l’EPFL et directeur du Sustainable energy center du CSEM

Il n'y a pas encore un bon business model pour les systèmes solaires avec batterie, et a fortiori pour des systèmes qui peuvent devenir autonomes dans un pays où le réseau est disponible quasiment à 100%, détaille le spécialiste. Ce qui explique que peu de personnes s'y soient mises.

«Mais la valeur d'un tel système devient tout autre en cas de coupures d'électricité fréquentes, et certains sont prêts à mettre un prix important. Sinon, il faudra plutôt penser à se fournir en lampes rechargeables et autres.» Quant aux entreprises capables de fabriquer des systèmes électroniques permettant l’îlotage, on en trouve notamment une en Valais.

Participer à l'effort commun

Jean-Marie, la soixantaine, habite en Valais. Il a investi 30 000 francs en 2020 pour couvrir son hangar et sa copropriété de panneaux solaires (70 m2). Quelqu'un lui a soufflé dernièrement que ses installations pourraient ne plus fonctionner en cas de coupure du réseau. «Je suis en train de réfléchir à installer une batterie.» Mais il n'avait pas acquis ces panneaux dans le contexte d'un risque de black-out. Il nous explique la genèse de son opération, dont il se dit très satisfait:

«Je charge ma Tesla à hauteur de 95% grâce à mes panneaux solaires. Tout est parti de ce déclic d'acquérir une voiture électrique, il y a deux ans. Et avec cela, l'envie de participer à l’effort commun en produisant de l'énergie propre»

Sur l'énergie totale qu'il produit (12 700 kilowatts du 1er janvier de cette année au 18 août), Jean-Marie en consomme un quart et revend le reste à la société électrique. Il a du reste pu bénéficier d'une subvention de quelque 6000 francs. Concernant le risque de pénurie d'énergie cet hiver, il pointe les réflexes qu'il conviendra d'adopter:

«Ne pas mettre en marche le lave-vaisselle et charger sa voiture en même temps, par exemple, est une habitude à prendre.»

Une facture d'électricité qui lui rapporte de l'argent

L'idée d'avoir une indépendance énergétique au moyen du solaire, Roland, 75 ans, l'a eue encore plus tôt. Le Vaudois a installé une première série de panneaux en 2009, dans sa propriété, en dehors de son champ de vision direct. Surface totale de l'installation: 30 m2. Coût de l'investissement: 20 000 francs. «A l'époque», raconte-t-il, «j’ai payé les panneaux dix fois plus cher que ce qu’ils coûtent aujourd'hui.» Expérience faite avec les 30 m2 supplémentaires dans lesquels il a investi l'an dernier.

Autre changement treize ans plus tard:

«J'avais acheté les panneaux en Chine. Je ne le referais plus maintenant, vu le contexte géopolitique»

Contrairement à Jean-Marie, Roland n'a pas touché de subvention, «pour une raison technique assez obscure». Le pari économique est en tout cas réussi: la facture d'électricité qui tombe à la fin de l'année est de... moins 1000 francs. Une somme qu'il reçoit, donc, sur la base de l'électricité qu'il produit mais ne consomme pas. Comme Jean-Marie, il charge sa voiture électrique grâce à l'énergie solaire. Sa pompe à chaleur est reliée aux cellules photovoltaïques.

C'est une fibre écologiste et un intérêt pour la technologie qui ont motivé Roland en 2009. Le fait que ses panneaux n'opéreraient plus avec un black-out, il l'a deviné en remarquant que certains de ses onduleurs – qui permettent de stocker le surplus de production pour la consommer plus tard ou la revendre à un tarif préférentiel – ne fonctionnent que s’il y a du courant sur le réseau. Avis donc à tous les (futurs) propriétaires de panneaux photovoltaïques, petits ou non.

La petite ironie de l'histoire
La législation fédérale en matière de panneaux solaires s'est assouplie en juin dernier, dans le but de favoriser le recours à cette source d'énergie renouvelable et locale. Or, l’Association suisse des propriétaires fonciers (APF) indique dans l'article de 20 minutes qu'ils entendent interpeller la Confédération pour demander à ce que les locataires souhaitant placer un panneau sur leur balcon ou leur devanture doivent leur demander une autorisation préalable. Ce qui n'est actuellement pas le cas, comme l'a confirmé l’Office fédéral de l’énergie (Ofen).
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