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Malaise à Genève: des fillettes voilées sur un visuel scolaire

Le visuel en question.
Le visuel en question. image: dr

Mais que font ces fillettes voilées sur un visuel scolaire? Malaise à Genève

Intégré à un programme d'apprentissage de la lecture dans une école primaire genevoise, un visuel montre deux fillettes voilées. L'Etat de Genève regrette.
30.11.2022, 06:0708.12.2022, 17:21
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Cette maman genevoise n’en pas cru ses yeux. Début novembre, elle découvre un visuel intégré à l’enseignement de français de son fils, élève dans une école primaire du canton. Conçu telle une planche de bande dessinée, ce visuel montre des enfants en bas âge, quatre filles et trois garçons, en train de lire. Partageant la lecture d’un même ouvrage à la couverture rose, deux des fillettes portent un hijab, un voile musulman. Leurs bras et jambes sont couverts, contrairement aux bras et jambes des deux autres petites filles, en shorts et t-shirts.

Cette représentation, où, par ailleurs, l’un des garçons porte une chéchia en guise de couvre-chef quand une troisième fillette arbore une casquette mise à l’envers, se veut peut-être inclusive. Ce n’est pas ce que la maman tombant sur le devoir de son fils y a vu. «Avec cette illustration, on promeut l’inégalité à l’école entre filles et garçons», dit-elle, jointe par watson. Engagée dans la défense de la laïcité, se disant féministe et de gauche, elle affirme que «le voilement de fillettes relève d’une forme de maltraitance».

«A cet âge-là, le port du voile ne peut pas être un choix, c’est une contrainte»
La mère d'un élève

Comment ce visuel, prélevé sur une banque d'images, a-t-il pu se retrouver dans un cours de français délivré à des écoliers genevois?

La mère de l’élève n’en veut pas particulièrement au personnel pédagogique:

«Dans cette affaire, ce ne sont pas les personnes qui sont en cause, ce sont les principes qui sont en jeu»
La mère d'un élève

Le 7 novembre, elle a adressé une lettre à la cheffe du Département de l’instruction publique (DIP), la socialiste Anne Emery-Torracinta, pour s'indigner qu’une telle illustration puisse servir de support pédagogique.

Une réponse, datée du 28 novembre, vient de lui parvenir. Elle porte l’en-tête de la direction générale de l’enseignement obligatoire (DGEO). Dans ce courrier, dont watson a pu prendre connaissance, la DGEO rappelle, d’une part, que «les enseignantes et enseignants peuvent (…) créer des ressources pédagogiques personnelles». D’autre part, ajoute-t-elle, «il peut arriver – comme c’est le cas dans l’exemple évoqué – que certaines images puissent produire un effet maladroit, probablement de manière involontaire.»

Dans sa lettre du 28, la DGEO renvoie à la loi comme à certaines règles:

«Les questions liées à la promotion de l’égalité entre les filles et les garçons ainsi que la lutte contre toutes les formes de discriminations sont des priorités de notre département, comme souligné dans l’article 12 (« Égalité ») de la loi sur l’instruction publique. (…) En matière de signes religieux ostensibles, les règles qui s’appliquent dans notre école publique et laïque se retrouvent dans une brochure publiée par le département en 2016 («La laïcité à l’école»), où les principes régissant ces signes religieux sont détaillés (…).»
Extrait de la lettre de la direction générale de l’enseignement obligatoire

Dans le canton de Genève, le port de signes religieux ostensibles par le corps enseignant et les collaborateurs du DIP est proscrit. Il est en revanche autorisé pour les élèves, sous réserve que cela n’entrave pas leur scolarité. L’est-il aussi pour les petites filles allant à l’école primaire? La brochure ne dit rien à ce propos. Apparemment, le cas ne se serait encore jamais présenté.

Rappel des règles à toutes les directions d'école

Au téléphone, le secrétaire général-adjoint du DIP en charge des questions sociétales, Nicolas Tavaglione, explique que la présence du visuel controversé résulte d’«une initiative prise par une enseignante non titulaire, dédiée au soutien scolaire, intervenant dans un programme d’apprentissage de la lecture appelé "fluence"» et dans le cadre d’un cours donné par un professeur en place.

Nicolas Tavaglione se veut très clair:

«Cette illustration montrant deux fillettes prépubères voilées n’a pas sa place dans quelque cours que ce soit. C’est contraire à tous nos principes. L’enseignante a cru bien faire dans un environnement qui se caractérise par la diversité des origines. Elle s’est rendu compte de son erreur, elle en est tout à fait désolée»
Nicolas Tavaglione, secrétaire général-adjoint du DIP

A la suite du signalement de ce visuel au département, «les directions d’établissement ont été appelées à la vigilance sur les questions de laïcité et les règles en vigueur ont été rappelées», affirme le secrétaire général-adjoint du DIP. Quant au visuel, il a semble-t-il été retiré mardi de l'école où il était apparu courant octobre.

Arguant d'une nécessaire pudeur, les tenants d’une conception rigoriste de l’islam prônent le voilement des femmes dès la puberté. Qu’en est-il des fillettes? Pour les mêmes, il s’agit de les «habituer» au port du voile afin qu’elles ne «se rebellent» pas plus tard. Ces propos, tenus dans une vidéo diffusée en France en 2017, avaient scandalisé nombre de musulmans opposés à de telles injonctions.👇

De même à Genève, des femmes d’origine maghrébine se sont élevées contre le visuel dont le DIP a été saisi. «Dans quelle culture on voile les fillettes?!», s’est exclamée l’une d’elles.

Le Parlement européen contre les Frères musulmans

A l’échelle de l’Europe et à l’initiative du député français de droite François-Xavier Bellamy, le Parlement européen, le 19 octobre, a voté deux amendements visant «à empêcher la Commission européenne et, au-delà, les instances de l'Union européenne, de financer ou promouvoir des associations religieuses radicales. Dans leur viseur: les associations liées aux Frères musulmans, dont les volontés d'entrisme profitent du manque de vigilance, voire de la complaisance, de la Commission européenne», rapporte le magazine Marianne.

A l’automne 2021, une campagne du Conseil de l’Europe, cofinancée par l’Union européenne, avait fait polémique. «La liberté est dans le hijab», affirmait-elle de façon contre-intuitive. Face au tollé, elle avait été retirée.👇

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image: capture d'écran
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Video: watson
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