Mauro Poggia, un procureur et la police genevoise se font épingler
A Genève, la commission de contrôle de gestion du Grand Conseil dénonce l'interpellation humiliante d'un élu fin 2019, alors que le canton était secoué par l'affaire Maudet. Elle émet des recommandations pour éviter qu'une telle situation ne se reproduise.
Rappel des faits
Simon Brandt, alors député PLR, avait été interpellé tôt le matin, menotté, mis à nu et fouillé. Ce proche de Pierre Maudet était soupçonné, finalement à tort, d'avoir consulté la main courante de la police en profitant de son poste d'analyste au sein de l'institution. Les médias avaient été mis au parfum avant même qu'il ne soit relâché.
«La commission de contrôle de gestion est partie de ce cas particulier pour généraliser», a relevé mardi devant les médias son président, le député Vert Pierre Eckert. Le député socialiste Alberto Veslaco, choqué par le traitement réservé à l'élu, a ajouté:
Comment cela s'est-il passé?
Dans un rapport d'une centaine de pages, sans les annexes, la commission décortique cette interpellation à la lumière des auditions des protagonistes. Les députés ont notamment entendu:
- Simon Brandt, le chef de l'inspection générale des services, soit la police des polices.
- La commandante de la police.
- Le procureur général Olivier Jornot.
- Le conseiller d'Etat Mauro Poggia.
L'inspecteur qui a mené l'interrogatoire de Simon Brandt a, lui, refusé d'être auditionné, une procédure judiciaire étant en cours. Ce refus a été cautionné par son magistrat de tutelle Mauro Poggia, au grand dam de la commission.
Que faut-il retenir de tout cela?
Il ressort de ces auditions que le principe de proportionnalité n'a pas été respecté, ont souligné, à plusieurs reprises, les membres de la sous-commission qui a mené les investigations sur mandat de la commission. Ils dénoncent aussi des abus d'autorité et des abus procéduraux, comme le fait d'interdire à Brandt d'appeler son avocat et d'avertir le Grand Conseil de son absence.
Cette interprétation s'éloigne des conclusions de la justice genevoise qui ne voyait pas de problème majeur dans cette procédure. Un recours de Brandt est, toutefois, encore pendant au Tribunal fédéral. Ce grand écart ne perturbe pas la commission de contrôle de gestion. Le député PDC Bertrand Buchs a relevé:
Selon la commission, l'interpellation de Simon Brandt a été «théâtralisée afin de le mettre sous pression. On a cherché à le faire craquer pour avoir des renseignements sur l'affaire Maudet», a relevé Buchs, et en visant directement le procureur général:
Le rapport, publié mardi, épingle:
- La police judiciaire pour son manque de proportionnalité.
- Le procureur général pour ses propos «erronés».
- Mauro Poggia pour son intrusion dans les prérogatives du pouvoir législatif.
Le document, accepté par une large majorité en commission, sera discuté en séance plénière du Grand Conseil.
Et maintenant?
La commission, qui a pour objectif qu'une telle situation ne se reproduise pas, a émis neuf recommandations. Parmi celles-ci figurent la mise en place d'enregistrements audios lors de fouilles et d'auditions et l'installation de vidéosurveillance dans les locaux où transitent les personnes interpellées. Ces mesures sont en discussion. (jah/ats)