L’été dernier, le Conseil fédéral a décidé d'acheter l'avion de combat américain F-35. Aujourd'hui, le sénateur démocrate américain Tim Kaine se demande pourquoi la Suisse a opté pour une «technologie américaine avec un prix aussi élevé». Il déclare:
Kaine faisait référence aux offres européennes. Pour mieux comprendre ce choix helvétique, il a donc demandé au nouvel ambassadeur américain en Suisse, Scott Miller, d’interpréter la décision du Conseil fédéral.
Le futur ambassadeur a, sans surprise, été incapable de fournir des réponses substantielles. N'étant pas encore entré en fonction, il ne connaît pas les détails de la vente d'armement et les subtilités de la politique suisse. En revanche, Scott Miller a loué l'approche du Conseil fédéral, «une décision fantastique», a-t-il déclaré. Il a également spéculé sur la proximité de la Suisse et des Etats-Unis en matière de politique de sécurité.
Reste que les déclarations de Tim Kaine sont explosives. Et le sénateur de Virginie n'est pas un député de seconde zone. Il s'est fait connaître dans le monde entier en tant que vice-président d’Hillary Clinton lors de l'élection américaine de 2016 (ils ont échoué face à Trump). Il siège désormais à la commission des Affaires militaires, à la commission budgétaire et à la commission des Affaires étrangères.
Ainsi, Tom Kaine, «le poids lourd» en matière de politique de sécurité, estime que l’offre de l’avion de combat F-35 est trop chère? Mais a-t-il des informations solides pour étayer son propos? Ou est-ce qu'il ne fait qu'attiser les flammes? Un sénateur expérimenté comme lui devrait savoir que le gouvernement américain est le client le plus important de l’entreprise de défense et de sécurité Lockheed Martin. Mais à présent, ce sur quoi Tim Kaine base ses déclarations reste ouvert. Le bureau du sénateur n'a pas voulu répondre aux questions de CH Media.
Une chose est claire: la ministre suisse de la Défense, Viola Amherd, a également justifié ce choix en raison du rapport performance-prix. Tant sur le plan technique que financier, l’avion de combat du fabricant Lockheed Martin est sorti vainqueur de la vaste procédure d'évaluation, a déclaré le Conseil fédéral. L'autorité en charge de l'armement affirme sans équivoque que le F-35 présente des «performances de pointe» aux «coûts totaux les plus bas».
Parallèlement, le sénateur Tim Kaine donne du grain à moudre aux opposants à l'acquisition des F-35 en Suisse. Après tout, le différend politique tourne également autour du rapport prix-performance. Selon l'agence d'armement Armasuisse, les 36 avions de combat américains de type F-35 achetés par la Suisse seront moins chers à exploiter que les autres avions évalués.
La facture de l’acquisition des 36 avions de combat s’élève à cinq milliards de francs. Dix autres milliards, du moins selon les calculs du gouvernement fédéral, seront consacrés aux coûts d'exploitation pendant 30 ans. Les partis et organisations de gauche veulent imposer un autre avion de combat par le biais d'une initiative populaire. En effet, ils estiment que le F-35 entraîne une plus grande dépendance de la Suisse à l’égard des Etats-Unis et que son coût est trop élevé.
Le Groupe pour une Suisse sans armée (GSsA) voit maintenant ses suppositions confirmées. «La déclaration du sénateur de Virginie, selon laquelle des offres moins chères étaient disponibles, n'est pas surprenante», déclare Jonas Heeb, secrétaire du GSsA. Peu à peu, des rapports et des avis en provenance des Etats-Unis, critiquant les bas prix, se sont multipliés. «Cela montre une fois de plus qu'il n'existe aucune certitude sur le meilleur avion de combat et que les opinions sont toujours très différentes», déclare Jonas Heeb.
La conseillère nationale socialiste Franziska Roth exprime des sentiments similaires:
La politicienne accuse les actions du gouvernement. Selon Franziska Roth, la question est de savoir «si le Conseil fédéral a menti au peuple suisse et a violé le droit des marchés publics lorsqu'il a affirmé que le F-35 était l'offre la moins chère».
En prenant en compte l'ensemble de sa durée de vie, le F-35 est le plus cher des types évalués, soulignent les initiants de l’initiative populaire «Stop F-35». Depuis des semaines, ils accusent l'autorité chargée de l'armement d'avoir calculé le prix à la baisse, en omettant l'inflation par exemple. Franziska Roth parle de plusieurs éléments financiers qui n’ont pas été pris en compte. Elle souligne le point suivant:
La performance de pointe au coût le plus bas? Le F-35 est également un enjeu politique aux Etats-Unis. Si certains mettent en garde contre les coûts élevés, d'autres sont fermement convaincus de ses performances. Ils viennent même à accuser les fabricants concurrents de semer subrepticement le doute.
Traduit de l'allemand par Charlotte Donzallaz