De Tavannes, dans le Jura bernois, la Fondation Digger contribue à améliorer sensiblement la vie de populations établies dans des zones de conflits armés où règne un danger sournois et quasi invisible: les mines antipersonnels. Ces armes explosives sont enfouies dans le sol de quelque 70 pays. Et huit victimes sur dix sont des civils. Bien que présente dans une quinzaine de pays avec ses machines de déminage, Digger a dû, par la force des choses, déserter le terrain opérationnel depuis le printemps 2020. «Avec la crise sanitaire, c'est très compliqué de voyager. Mais, il y a un peu moins de deux mois, nous avons enfin pu mener des missions en Bosnie, en Angola et en Casamance, au sud du Sénégal», énumère Frédéric Guerne, le directeur et fondateur de Digger.
Même si des équipes locales formées par Digger s'occupent de la maintenance des machines, certains problèmes nécessitent le déplacement d'un technicien de la structure bernoise, notamment quand il faut des pièces de rechange. C'est ainsi que Gentien Piaget, le vice-directeur et responsable des opérations et support technique vient de se rendre dans les Balkans et en Afrique. En Bosnie, il devait évaluer l'état technique d'une machine gagnée par «certaines faiblesses dues à l’âge et à l’usure». Et en Afrique australe, après une odyssée de trois jours et demi entre Zurich et Bié, province située au centre de l'Angola, le technicien suisse et l'équipe locale ont réussi à remettre sur pied une machine en panne dans un champ de mines. Un champ de mines qui est le résultat de la longue guerre civile qui a secoué le pays de 1975 à 2002. Enfin, une mission d'évaluation de l'état d'une machine a été menée en Casamance, région au sud du Sénégal secouée de manière intermittente par une rébellion armée.
Un hic demeure. Et il est d'ordre économique. Comme c'est le cas pour beaucoup d'autres structures, la crise sanitaire a rudoyé les finances de Digger. «Les machines construites par la fondation ne sont payées que quand elles sont livrées. Et depuis bientôt deux ans, cela n'a pas été possible», regrette Frédéric Guerne. Le directeur de la fondation basée à Tavannes fait un clin d'œil à ceux qu'il appelle avec humour «les actionnaires», c'est-à-dire les donateurs. «Depuis notre création, nous avons reçu des dons allant de 1 à 250'000 francs. C'est grâce à ces coups de pouce que notre fondation d'utilité publique continue d'exister», a salué le directeur de Digger. Mais, dégoupiller les situations les plus carabinées fait partie de l'Adn de cette structure habituée à évoluer en terrains minés.