Suisse
Israël

Une manif pour Gaza depuis la Cathédrale de Lausanne indigne

Une manif pour Gaza démarre de la Cathédrale de Lausanne et ça indigne

Le point de départ, samedi, à Lausanne, de la manifestation «pour mettre fin au génocide à Gaza», suscite le malaise parmi les juifs, qui voient là un manque de tact eu égard à l'histoire de l'antisémitisme chrétien. Réactions.
21.03.2024, 18:50
Plus de «Suisse»

Mais qui a eu l’idée de faire partir la manifestation nationale «Stop Génocide» à Gaza de l’esplanade de la cathédrale de Lausanne, samedi 23 mars? Le point de départ de la manifestation, entre autres organisée par le collectif Lausanne Palestine, suscite un malaise parmi les juifs.

Dans une tribune parue ce jeudi dans 24 Heures, Jacques Ehrenfreund, professeur d’histoire des Juifs et du judaïsme à l'Université de Lausanne, ne s’indigne par seulement de l’adresse choisie comme point de départ, mais aussi de l’emploi du terme de génocide pour qualifier la répression militaire israélienne dans la bande de Gaza.

Il écrit:

«Que révèle l’usage récurrent et banalisé du terme de "génocide" associé au nom d’Israël? Pourquoi choisir précisément cette qualification infâme pour la plaquer sur le peuple qui a fait l’objet d’une tentative unique d’éradication systématique? Pourquoi la critique légitime de la guerre d’Israël se mue-t-elle en diffamation?»
Jacques Ehrenfreund

Il ajoute :

«L’antijudaïsme a toujours procédé par inversion, il cherche à accuser les Juifs de ce qu’il rêve de leur faire subir. Les expulsions et les massacres du Moyen Âge étaient toujours précédés par les pires accusations, d’empoisonnement des puits, d’assassinat d’enfants chrétiens ou même de déicide. Ces accusations ont disparu aujourd’hui pour laisser la place à celle de génocide. L’État d’Israël est dorénavant accusé de ce dont on tenait pour responsables les Juifs.»
Jacques Ehrenfreund

«Peuple déicide»

En quoi le départ de la manifestation de samedi de l’esplanade de la cathédrale de Lausanne est-il discutable? Parce que pendant de longs siècles le peuple juif fut qualifié de «peuple déicide» par les chrétiens. L’esplanade d’une cathédrale n’est pas un lieu neutre, ni symboliquement ni politiquement. Pour les juifs, et non-juifs, ayant gardé une sensibilité à l’histoire juive, le fait d’associer un symbole chrétien – l’esplanade d’une cathédrale – à une manifestation dans laquelle on reproche à des juifs, fussent-ils israéliens, de commettre un génocide, est ressenti comme une violence, à tout le moins comme un manque de tact.

«L’Eglise évangélique réformée vaudoise (EERV) n’est pour rien dans le choix du lieu de départ de la manifestation de samedi», explique l’ancien conseiller d’Etat vaudois Philippe Leuba, membre du Conseil synodal de l’EERV. «Nous l’avons fait savoir mardi dans un communiqué», précise-t-il.

«Nous n'avons pas autorité sur la place de la cathédrale»

Extrait du communiqué de l'EERV:

«L’exécutif de l’Eglise réformée vaudoise précise qu’il se dissocie clairement de cette manifestation dont les participants au cortège sont appelés à se réunir sur l’esplanade de la Cathédrale. Sans lien aucun avec ce défilé, l’EERV informe que ladite manifestation lui est étrangère et n’a, de ce fait, bénéficié d’aucune autorisation de sa part.»
Communiqué de l'EERV

Philippe Leuba poursuit dans ses explications auprès de watson: «L’esplanade de la cathédrale de Lausanne n’est pas gérée par l’EERV. Nous n’y exerçons aucune autorité. L’esplanade relève du domaine public. Si la manifestation était partie de l’intérieur de la cathédrale, c’eût été autre chose, le Conseil synodal s’y serait opposé, car il aurait jugé avoir affaire à une manifestation politique qui n’a pas sa place dans un lieu de culte.»

«C'est pas nous»

Mais alors, qui a eu l’idée de faire démarrer la manifestation de samedi de l’esplanade de la cathédrale de Lausanne? «Ce ne sont pas les organisateurs de la manifestation», affirme un proche de ces derniers, joint par watson.

«Ils voulaient organiser le point de départ Place de la Riponne, mais la Municipalité leur a dit que ce n’était pas possible, car la place était déjà occupée ce jour-là. C’est la Municipalité qui leur a indiqué l’esplanade de la cathédrale.»

Il serait peu probable qu’une manifestation semblable s’ébranle du parvis de Notre-Dame à Paris ou de devant la cathédrale de Cologne, par exemple. Les autorités y verraient un affront fait aux juifs eu égard à l’histoire de l’antisémitisme chrétien.

«Que la Municipalité de Lausanne autorise cette manifestation qui colporte la diffamation, depuis le parvis de la cathédrale, laisse sans voix»
Jacques Ehrenfreund dans 24 Heures.

Les explications de la Municipalité

watson a pu joindre la Municipalité jeudi en fin d'après-midi. Voici ses explications, fournies par une source souhaitant conserver l'anonymat:

«Nous comprenons la réflexion de M. Ehrenfreund. Mais nous étions aux prises avec un problème tout à fait pratique. Une manifestation de milliers de Kurdes était déjà prévue Place de la Riponne. La Place du Tunnel étant en travaux, elle était indisponible aussi. Il y a bien la Place du Château, mais elle est occupée par des voitures que nous ne pouvons pas enlever. En fonction du tracé de la manifestation pro-palestinienne, il restait l'esplanade de la cathédrale. Mais il est bien clair que nous n'autoriserons aucun déploiement de banderoles sur la cathédrale. L'esplanade en tant que telle n'est pas un lieu religieux.»
Une source à la Municipalité

A la suite du massacre du Hamas qui a fait 1200 morts en Israël le 7 octobre, à quoi il faut ajouter 230 Israéliens capturés comme otages ce jour-là, la répression israélienne a fait jusqu’ici près de 32 000 morts côté gazaouis, selon les derniers chiffres communiqués par le Hamas.

Elle a 9 ans et documente Gaza comme une vraie journaliste
Video: watson
8 Commentaires
Comme nous voulons continuer à modérer personnellement les débats de commentaires, nous sommes obligés de fermer la fonction de commentaire 72 heures après la publication d’un article. Merci de votre compréhension!
8
Disparue en Argovie, elle est retrouvée morte à Francfort
Une femme vivant en Argovie a été retrouvée morte à Francfort, alors que son mari avait donné l'alerte sur sa disparition à la mi-avril. Ce dernier a également été retrouvé sans vie par la police.

Une femme de 44 ans portée disparue en Argovie depuis le 12 avril a été retrouvée morte dans un plan d'eau à Francfort (Allemagne). Peu de temps après, la police a découvert son mari mort dans sa maison à Merenschwand (AG).

L’article