Dans le sillage de la terrible tempête qui a dévasté en quelques minutes la ville de La Chaux-de-Fonds, une certaine solidarité s'est spontanément installée. Le haut et le bas du canton ont travaillé main dans la main et l'aide a afflué au-delà des frontières cantonales, par exemple de Lausanne ou de Genève.
Mais tout le monde n'est pas bien intentionné. Loin de là. Alors que les habitants accusent le coup et déblayent les dégâts autour de leur maison et que des bénévoles n'hésitent pas à donner un coup de main au voisin, d'autres profitent de la situation pour s'enrichir. Deux simples lignes dans un communiqué de la police neuchâteloise datant de mardi sèment le doute:
Daniel Favre, chargé de prévention au sein de la police cantonale neuchâteloise, nous explique dans quelles situations les Chaux-de-Fonniers risquent de se faire arnaquer, alors qu'ils sont déjà au plus mal. Car, comme dit le dicton, «un malheur ne vient jamais seul».
Depuis lundi soir, les travaux ne cessent pas à La Chaux-de-Fonds. Ouvrages d'urgence, déblayages, reconstruction. Les entreprises locales et les propriétaires bricoleurs sont mobilisés.
Mais ce ne sont pas les seuls. Certains particuliers débarquent sans prévenir et viennent sonner aux portes. Ils proposent leurs services, pour quelques heures ou une journée. Il y a beaucoup à faire, et ces travailleurs se mettent parfois au travail après un court échange et une brève poignée de main. Mais au moment de payer la facture, les choses deviennent étranges:
Ce qui est évidemment un mensonge. Le «client», mis devant le fait accompli et intimidé par la situation, sera tenté de régler la somme. Le chargé de prévention donne un exemple:
Juridiquement, on parle d'«usure»: le fait de profiter de la situation et de la vulnérabilité des personnes pour proposer des solutions très coûteuses.
Le chargé de prévention tient à préciser: «Cela n'a rien à voir avec une entreprise qui propose ses services après la tempête tout en pratiquant ses tarifs habituels». En effet, rien n'empêche une société de venir travailler pour des privés sur une zone sinistrée.
Mais le prix doit être discuté avant les travaux et un devis peut être demandé, même pour une situation urgente telle que celle qui a lieu à La Chaux-de-Fonds. Le fait de devoir payer immédiatement et en cash est particulièrement suspect, car cela empêche de connaître l'identité du prestataire.
Et puis, il y a les cas d'escroquerie, pure et simple. Dans ce cas-là, il s'agit aussi de travailleurs qui débarquent à l'improviste, mais avec une nuance en plus:
La méthode est la même: les travailleurs font leur job, avant de demander à être payés en cash, dans la foulée.
Daniel Favre précise d'ailleurs que le personnel de l'Ecap (réd: Etablissement cantonal d'assurance et de prévention) porte un équipement et un uniforme reconnaissable. S'il y a un doute sur du personnel communal, «il est tout à fait possible d'appeler la police ou la commune pour vérifier l'identité de la personne».
Pour l'heure, aucun de ces escrocs ne s'est montré agressif ou aurait menacé ou tenté de s'en prendre à une victime de la tempête, indique Daniel Favre. Mais cela n'est pas complètement à exclure:
Certaines victimes pourraient-elles être des cibles faciles, comme des personnes âgées? Daniel Favre réfute, indiquant que tout le monde peut être visé:
Le policier nous indique qu'une dizaine de cas de démarchages suspects ou de tentatives d'escroquerie ont déjà été annoncés auprès de la police.
Un autre genre de délit a été relevé ces derniers jours. Il s'agit de récupérer, à l'avantage du chaos ambiant, du matériel qui ne lui appartient pas. Deux personnes ont déjà été interpellées par la police pour des délits de ce genre.
Mais cela peut aussi concerner des objets de particuliers. «Cela peut être une table de bistrot ou du mobilier de jardin d'un particulier ayant été emporté hors de sa propriété», explique Daniel Favre. La situation concerne aussi... le bois des arbres déracinés ou pliés par la tempête. «Certains essaient de s'approprier du bois après l'avoir scié ou tronçonné», ce qui est aussi un délit.
Il est toutefois parfaitement possible de déplacer ou d'aller amener du matériel d'autrui à la déchetterie, sur demande, en tant que bénévole ou volontaire. «Les patrouilles de police effectuent parfois des contrôles», explique le policier. Mais pas besoin d'avoir peur de la police en allant jeter les chaises endommagées de sa voisine octogénaire. «Il faut garder une certaine clairvoyance», indique Daniel Favre.