Ouvert il y a quatre mois, le point de vente Cann-L accueille désormais 800 personnes à Lausanne. Quelque 330 autres attendent leur inclusion au projet et une trentaine prennent rendez-vous chaque semaine. Les ventes régulées de cannabis représentent pour l'heure l’équivalent de 10% du marché illégal, soit huit kilos par mois.
Le projet Cann-L, qui s'adresse aux personnes majeures vivant à Lausanne et déjà consommatrices de cannabis, atteint une population assez peu connue jusqu’ici, écrit la Ville de Lausanne dans son bilan après quatre mois.
«Alors que l'on pense souvent aux jeunes, on trouve toute une gamme de consommateurs, souvent intégrés socialement, qui passent sous le radar. Nous allons pouvoir leur parler prévention», a déclaré à Keystone-ATS le directeur adjoint d’Addiction Suisse Frank Zobel, qui mène le volet scientifique du projet.
Les participants peuvent acheter deux types de résine et quatre types d’herbe de cannabis cultivés localement et contrôlés. Les produits à faible taux de THC (moins de 10%) représentent un peu plus de 20% des ventes tout comme ceux à taux de THC moyen (10-15%). Frank Zobel détaille:
Et d’ajouter que la palette des produits évoluera aussi avec les récoltes de cannabis cultivé dans la région qui auront lieu cet été.
«Il n'y a pas de problème d'approvisionnement», a encore précisé le responsable. Si l'ouverture du point de vente avait éveillé des craintes au niveau de la sécurité, aucun incident n'a été signalé, s'est-il réjoui.
«Le projet-pilote CANN-L suscite beaucoup d’intérêt et la participation est très encourageante. Cela montre la pertinence de notre modèle», se réjouit Emilie Moeschler, municipale en charge des sports et de la cohésion sociale, citée dans le communiqué. D'ici la fin de l'année 2024, le magasin qui a ouvert en décembre dernier devrait recevoir entre 1200 et 1500 personnes, un résultat conforme aux prévisions.
Au point de vente, les participants ont accès à des recommandations de réduction des risques et peuvent obtenir des contacts s’ils ont besoin d’aide. Une vingtaine de personnes ont spontanément contacté le médecin référent du projet au Chuv. A ce jour, une seule personne s’est elle-même exclue du projet. Il s’agit d’une femme qui a renoncé à la consommation de cannabis quand elle a appris qu’elle était enceinte.
Les premiers résultats de l’étude scientifique seront publiés fin 2024 quand les participants auront rempli leur second et troisième questionnaire. Pour l’heure, les données ne sont pas suffisantes pour évaluer l’impact sur le marché illégal ainsi que sur les pratiques de consommation. Pierre-Antoine Hildbrand, municipal en charge de la sécurité, explique:
Comme prévu dans le projet, le point de vente va s’autofinancer, un objectif qui devrait bientôt être atteint. «Les éventuels bénéfices pourront notamment être utilisés pour la réduction des risques, la prévention et la sécurité», ajoute Émilie Moeschler.
Pour rappel, le projet mené par la Ville de Lausanne, avec son partenaire Addiction Suisse, est prévu sur une durée de quatre ans et demi. Il propose une approche complémentaire à celles mises en œuvre à Genève, Bâle, Zurich et Berne. L’ensemble de ces projets nourrira les réflexions sur l’évolution de la législation fédérale dans le domaine du cannabis. (jah/ats)