En arrivant à Boudry, on découvre un village endormi: aucune agitation n'est perceptible dans cette commune de 6000 habitants. Le «Café du Tram», situé au terminus du tramway, est fermé ce lundi.
Mais le calme est trompeur: à Boudry, non loin de Neuchâtel, il y a urgence. La raison en est le centre d'asile situé un peu à l'extérieur du village: c'est le seul centre d'asile fédéral avec des tâches procédurales en Suisse romande. Autrement dit, c'est ici que les demandes sont examinées et les décisions rendues. C'est, qui plus est, le plus grand centre d'asile de Suisse.
Mais avec la crise migratoire actuelle, même cette installation est trop petite. A la fin de l'année dernière, plus de 900 demandeurs d'asile ont logé à Boudry, alors que l'occupation maximale est de 480 places de couchage. Dans la région, ce n'est pas la seule raison de l'indignation: les vols et les cambriolages commis par des requérants d'asile – selon la police, seuls 3% d'entre eux sont des délinquants – ont également fait la une des journaux. La directrice cantonale des affaires sociales a parlé d'une situation «inacceptable» pour la population.
Tout cela a été une raison suffisante pour que la conseillère fédérale Elisabeth Baume-Schneider prenne les choses en main. Lundi, elle a invité le canton, la commune, les riverains et les organisations de réfugiés à une table ronde.
Le cas de Boudry représente un premier test pour la conseillère fédérale socialiste, en poste depuis quatre mois, et montre comment elle se glisse dans la peau d'une gestionnaire de crise. La Jurassienne mise sur un «dialogue ouvert» et veut s'orienter sur les faits et les observations sur place, a-t-elle expliqué.
Les faits ont été fournis par le conseiller d'Etat neuchâtelois en charge de la Sécurité, Alain Ribaux, en personne. L'édile PLR a parlé d'un «tsunami» de la petite délinquance depuis 2021, avec un pic fin 2022. Sur l'ensemble de l'année, 2900 délits ont été enregistrés dans les districts de Boudry et de Neuchâtel, et parmi ceux dont l'auteur est connu, 48% sont le fait de personnes du type «requérant d'asile».
Depuis quelques semaines, les vols ont diminué, a indiqué le Neuchâtelois. Il attribue cela à des mesures telles que les patrouilles de police renforcées et la baisse du nombre de demandeurs d'asile. Celui-ci est de nouveau dans les limites de capacité.
On a donc l'impression que Baume-Schneider n'est intervenue qu'après l'extinction de l'incendie. Lors de la conférence de presse, elle a présenté peu de choses concrètes. Elle a souligné qu'il fallait une interaction entre les mesures visant à améliorer le sentiment de sécurité de la population et les mesures d'accompagnement socioculturelles telles que le coaching pour les demandeurs d'asile. En outre, la Confédération s'efforcera, à l'avenir, de respecter la limite de capacité, à l'exception des «situations exceptionnelles».
Malgré ses déclarations vagues, la conseillère fédérale a marqué des points. «Elisabeth Baume-Schneider était très bien préparée et à l'écoute de nos préoccupations», a déclaré Dastier Richner, président de l'association des riverains. Il a particulièrement souligné l'échange direct avec la conseillère fédérale. Sous sa prédécesseure, Karin Keller-Sutter, il n'y avait eu que des contacts épistolaires.
Les organisations de réfugiés sont en revanche déçues. Louise Wehrli de «Droit de rester» affirme:
Elle salue l'échange, mais ne reconnaît pas que la conseillère fédérale veuille fondamentalement changer le système de migration. La preuve, selon elle, avec d'autres exemples. Ainsi, le Secrétariat d'Etat aux migrations continue d'envoyer des réfugiés en Croatie malgré les graves accusations contre les gardes-frontières croates. Louise Wehrli est aussi critique à l'égard de la suspension de la procédure de visa rapide pour les victimes de tremblement de terre en Syrie et en Turquie:
Il est donc clair que la pression sur la conseillère fédérale PS reste forte. Alors qu'elle était déjà la cible de l'UDC, la désillusion s'ajoute désormais de l'autre côté du camp politique.
Traduit et adapté par Noëline Flippe