Chauffer moins, prendre des douches moins chaudes, ne pas régler la température du réfrigérateur trop bas: ce ne sont là que quelques-uns des conseils de la Confédération qui devraient non seulement permettre d'éviter une pénurie d'électricité en hiver, mais aussi de ménager le porte-monnaie de chacun. Il faut juste éviter d'en faire trop, car cela peut créer d'autres problèmes.
Ellen Evans, spécialiste de l'alimentation et chercheuse en sécurité alimentaire à la Cardiff Metropolitan University, met en garde contre ce danger. Elle craint que la crise n'augmente le risque d'intoxication alimentaire. Concrètement, il pourrait y avoir davantage de cas de listériose.
Cette maladie potentiellement mortelle est causée par la bactérie Listeria monocytogenes, qui peut se trouver dans du poisson fumé, de la viande ou du fromage contaminés. Pour limiter la croissance des agents pathogènes, les autorités sanitaires conseillent de régler la température du réfrigérateur à moins de cinq degrés. Martin Loessner, professeur de microbiologie alimentaire à l'EPFZ, le confirme:
Il ne s'attend toutefois pas à une augmentation des cas de listériose, car le potentiel d'économie avec un ou deux degrés de plus dans le réfrigérateur est limité. On peut par exemple économiser davantage en n'ouvrant pas constamment la porte du réfrigérateur, car cela oblige à refroidir à chaque fois l'air chaud qui entre.
Selon Martin Loessner, les microbes pathogènes se cachent également dans le lave-vaisselle. Il est donc important de ne pas utiliser constamment les programmes d'économie d'énergie. De temps en temps, pour quelques verres sales, c'est bien, mais:
Martin Loessner considère les légionelles comme un problème encore plus important, qui présente des conflits d'objectifs avec le programme économe. L'inhalation de ces bactéries, présentes entre autres dans l'eau, par le biais de fines gouttelettes pulvérisées lors de la douche, peut provoquer une pneumonie grave. Les cas se multiplient en Suisse depuis quelques années.
Selon Martin Loessner, la meilleure arme dans la lutte contre les légionelles est de monter l'eau de la chaudière à plus de 60 degrés, au moins toutes les quelques semaines. En revanche, si l'on baisse trop la température de l'eau, on s'expose à un risque d'infection. Il est plus judicieux de prendre des douches plus courtes et de renoncer à un bain afin d'économiser l'eau chaude.
La microbiologiste Franziska Rölli de la Haute école de Lucerne s'occupe du problème de la légionellose dans les bâtiments dans le cadre d'un projet national. Comme elle le raconte, elle a reçu plusieurs demandes de locataires inquiets, surtout ces dernières semaines, parce que la gérance avait abaissé la température des réservoirs à 50 degrés, voire moins. C'est contraire à toutes les recommandations, dit-elle.
Elle est actuellement en discussion avec l'Office fédéral de l'énergie (OFEN) pour savoir s'il serait acceptable de s'éloigner de la limite stricte des 60 degrés. Car celle-ci aurait également une certaine fonction de tampon. Franziska Rölli explique:
Cela doit toutefois être évalué dans chaque cas par un spécialiste et la charge en légionelles doit être surveillée en permanence. L'expérience montre que ces conditions ne sont généralement pas réunies. Elle déconseille donc vivement d'abaisser la température de la chaudière de sa propre initiative.
Il est également possible d'économiser sur le chauffage des locaux. L'Office fédéral de l'environnement en Allemagne met toutefois en garde contre le fait que des baisses de température trop importantes comportent un risque considérable de moisissures et donc de conséquences pour la santé.
«Le danger menace surtout les maisons mal isolées des années 50, 60 et 70 qui n'ont pas été ré-isolées», explique Roger Waeber du service spécialisé dans les toxines de l'habitat de l'Office fédéral de la santé publique (OFSP). On estime qu'environ 10% des maisons en Suisse sont menacées.
Les pièces aux murs froids sont particulièrement délicates, selon Roger Waeber. En effet, lorsque l'air chaud et humide d'une pièce rencontre des surfaces froides, l'humidité se condense et crée ainsi des conditions optimales pour la croissance des moisissures.
Selon Waeber, la pire combinaison est une maison avec des murs mal isolés, mais des fenêtres neuves et qui ferment bien: «Les murs restent alors froids et l'humidité ne peut pas sortir.» Il est donc essentiel d'aérer régulièrement par à-coups pour éviter les moisissures. L'expert de l'OFSP ajoute:
Il recommande de ne jamais laisser la température ambiante descendre en dessous de 20 degrés dans les bâtiments mal isolés. Des exceptions, comme chauffer la chambre à coucher à 18 degrés seulement, sont acceptables. Les portes des pièces moins chauffées devraient toutefois rester systématiquement fermées.
La présence de moisissures dans les habitations est associée à des irritations des voies respiratoires, des yeux et de la peau. Il existe également des possibilités de bronchite chronique, d'asthme et d'allergies.
Ce champignon gênant peut non seulement mettre la santé en danger, mais aussi coûter cher, ce qui peut avoir un effet boomerang sur les économies de chauffage. Dans le pire des cas, la croissance des moisissures provoque des dégâts si importants qu'ils sont difficiles à assainir et entraînent finalement une perte de valeur du bien immobilier.
(traduction par sas)