Coup de théâtre après cinq heures de débats au National: alors que la Chambre semblait se diriger vers un net refus de l'initiative sur les rentes sans contre-projet, l'UDC a changé de position. Contrairement à ce qu'avait annoncé son chef de groupe parlementaire Thomas Aeschi (ZG) au début des débats, le parti conservateur a finalement soutenu le PLR et le PVL dans leur tentative de proposer un contre-projet.
L'initiative prévoit elle de relever l'âge de la retraite AVS à 66 ans pour tout le monde. Une fois cette étape atteinte, la hausse serait liée à l'espérance de vie.
La population est inquiète pour son pouvoir d'achat, elle vient d'accepter la hausse de la retraite des femmes à 65 ans, a rappelé Benjamin Roduit (Centre/VS) au nom de la commission:
Le mécanisme proposé par l'initiative est beaucoup trop rigide, a poursuivi M. Roduit. Il ne tient pas compte de la situation effective des travailleurs âgés. Et l'espérance de vie dépend de l'état de santé des gens, des catégories socioprofessionnelles, etc. Pour financer l'AVS à long terme, il faut une solution globale. L'initiative ne joue que sur un levier.
La gauche a elle dénoncé tour à tour une initiative d'une «tristesse infinie», «hors-sol», «complètement en décalage avec la réalité du pays», qui porte profondément atteinte aux liens entre les générations.
L'AVS n'est en plus pas en faillite, a martelé Pierre-Yves Maillard (PS/VD). Elle a une fortune de 47 milliards de francs. Pour le PLR, l'AVS est au contraire sur la voie des chiffres rouges, à cause de la démographie.
Les enfants des années 2050 ne doivent pas payer pour ceux de cette décennie, a rétorqué Philippe Nantermod (PLR/VS) en défendant l'initiative, dont il est membre du comité. D'autres pays européens ont déjà fait le pas d'ajuster l'âge de la retraite à l'espérance de vie, comme les Pays-Bas.
Le parti vert'libéral ne voulait pas de l'initiative, mais il a proposé de renvoyer le dossier en commission pour élaborer un contre-projet indirect à l'initiative. «Le financement des rentes des 'baby-boomers' est problématique, en l'état actuel. La solidarité entre les générations n'est plus garantie», a estimé la Bernoise Melanie Mettler.
Le contre-projet indirect devrait introduire un mécanisme de frein à l'endettement pour l'AVS.
Le Parlement a déjà «passé commande» pour une nouvelle réforme d'ici fin 2026 sur un projet de stabilisation de l'AVS pour la période de 2030 à 2040, a rappelé le ministre de l'intérieur Alain Berset. Dans ce contexte, il faut prendre en compte un mix d'éléments. Et pas seulement la démographie, a conclu le conseiller fédéral en appelant à rejeter le texte et un contre-projet.
Il n'a pas été suivi. Le vote a dû être répété, et le National a finalement soutenu le renvoi en commission par 93 voix contre 92 et 1 abstention. (ats)