Mercredi, la ministre de l'énergie Simonetta Sommaruga (PS) et le ministre de l'économie Guy Parmelin (UDC) ont déclaré que les ménages, les entreprises et l'administration publique devraient réduire leur consommation de gaz afin de passer l'hiver dans de bonnes conditions. Contrairement aux mesures prises en Allemagne, rien n’est encore obligatoire.
Le Conseil fédéral a repris l'objectif de réduction de l'énergie de l'Union Européenne (UE): économiser 15% de gaz de fin octobre à mars 2023. Dans les prochains jours, il lancera une campagne d'économie d’électricité. Si une situation de pénurie immédiate menace, des appels plus stricts à l'économie d'énergie suivront. Si la pénurie est avérée, le ministre de l'économie Guy Parmelin pourra ordonner aux entreprises disposant d'installations bi-combustibles de passer du gaz au pétrole.
Si ces mesures ne suffisent pas, l’ensemble du Conseil fédéral pourrait imposer des températures minimales dans les bâtiments publics, les bureaux et les ménages. Le potentiel d'économie des logements privés est important, étant donné qu’ils représentent 40% de la consommation de gaz. Si l'on réduit la température d'un seul degré, on consomme – en calculant prudemment, dit-on dans l'entourage des autorités fédérales – 5 à 6% d'énergie en moins. En réduisant la température ambiante de 23 à 19 degrés en hiver, la pénurie de gaz pourrait être évitée.
Le Conseil fédéral devrait présenter mercredi prochain une ordonnance avec des propositions concrètes d’économie d’énergie. Il devrait préciser quelle température maximale les logements chauffés au gaz devraient respecter en cas de pénurie. On se croirait revenu à l'ordonnance Covid-19, dans laquelle le Conseil fédéral avait réglementé la vie privée dans les moindres détails. Maximum cinq personnes pouvaient se rencontrer dans les cercles privés et dix à Noël en présence de personnes non vaccinées. L'amende en cas d'infraction s'élevait à 100 francs.
Mercredi, le Conseil fédéral a répondu de manière nébuleuse à certaines questions concernant le quotidien des prochains mois. Quelle est la température maximale autorisée dans un logement? Qui contrôlera? En réponse à une demande de clarification, un porte-parole du Département de l'économie écrit:
Des températures inférieures à 18 degrés sont considérées comme un défaut. L'Association suisse des locataires (ASLOCA) précise sur son site Internet qu'un appartement doit pouvoir être suffisamment chauffé, c'est-à-dire une température située entre 20 à 21 degrés. Selon un jugement du Tribunal fédéral, les locataires ont droit à une réduction de loyer si la température minimale est durablement inférieure de trois à cinq degrés. Une question que les juristes fédéraux doivent à présent clarifier est la suivante: le Conseil fédéral peut-il déroger à cette règle par voie d'ordonnance?
Une autre question sans réponse est celle de savoir comment contrôler les baisses de température ordonnées par l'État. Le ministre de l'économie Guy Parmelin a répondu à cette question par une analogie.
« Il se fera dénoncer par les voisins, et nous n’aurons pas besoin d’envoyer la police ». La délicate question de la délation et du contrôle policier, dans ce moment savoureux de la conférence de presse du Conseil fédéral. #Energiekrise pic.twitter.com/Xg5qC7tDFm
— Philippe Revaz (@PhilippeRevaz) August 26, 2022
Il pense que le contrôle social jouera, que les voisins dénonceront ceux qui ne respectent pas le seuil de température imposé. C'est en tout cas ce qu'il a déclaré à propos d'une éventuelle interdiction d'utiliser les saunas et les piscines privés.
En décembre dernier, le ministre de la santé Alain Berset avait déjà laissé entendre que les policiers ne se contenteraient pas de faire des rondes dans des foyers choisis au hasard pour vérifier si plus de dix personnes se réunissaient autour d'un sapin de Noël et si parmi elles se trouvait au moins une personne non vaccinée.
Les politiciens doutent de la mise en œuvre des ordres de température. «Comment peuvent-ils contrôler la température des foyers?», se demandait le conseiller national UDC soleurois Christian Imark. Selon lui, il est difficile d'imaginer que des policiers munis d'un thermomètre sonnent chez des particuliers et distribuent des amendes s'il fait un degré de trop dans l'appartement. Le politicien en charge de l'énergie salue toutefois le fait que la Confédération appelle à une utilisation économe du gaz.
L’association des locataires (ASLOCA) rejoint la position de Christian Imark. Elle soutient «entièrement» la campagne pour la réduction volontaire de la température ambiante, comme le dit son vice-président et conseiller national Michael Töngi (Verts, LU). Selon lui, la Confédération lance même son appel officiel bien trop tard. L'association s'oppose toutefois à une réduction de la température imposée par les autorités et assortie d'amendes en cas de non-respect.
Si une température plus basse était imposée par les autorités, il faudrait par exemple tenir compte des personnes qui pourraient avoir des problèmes de santé en raison des ces mesures. L'association des locataires (ASLOCA) demande également que la Confédération amortisse socialement la hausse des prix de l'énergie pour les ménages les plus défavorisés.
En attendant, l'administration fédérale doit, selon le Conseil fédéral, montrer l'exemple: éteindre les appareils qui ne sont pas utilisés, éteindre les lumières non-nécessaires, baisser le chauffage des pièces. Le gouvernement fédéral est en train de discuter de la mise en œuvre de ces mesures. Mais que dit le droit du travail? Le Secrétariat d'État à l'économie donne une réponse dans un guide relatif à la loi sur le travail:
Reste à savoir si la Suisse fera effectivement face à une pénurie de gaz et si le Conseil fédéral finira par imposer une température maximale dans les foyers dès l'approche de l'hiver.
Traduit de l'allemand par Charlotte Donzallaz.