Des pubs pour la snus ou pour les vapoteuses, vous en trouvez sur des réseaux sociaux comme TikTok ou Facebook, ou sur un grand média gratuit, allez savoir. Enfin, quand on dit «vous»... encore faut-il que vous soyez dans le public cible de ces réclames, à savoir les jeunes. Mais maintenant que la population suisse a accepté en votation populaire l'initiative «Enfants sans tabac», la publicité pour la fumée et ses équivalents sera interdite partout où elle est visible pour les mineurs. Y compris... sur internet! Concrètement, ce sera appliqué comment?
Les initiants ont établi une proposition de mise en œuvre de leur texte, accessible sur leur site. Mais concernant l'application technique de l'interdiction des publicités pour le tabac sur internet, rien ne figure dans le document. Il est seulement spécifié que «la publicité pour les produits du tabac et les cigarettes électroniques ainsi que pour les objets qui forment une unité fonctionnelle avec un produit du tabac est interdite lorsqu’elle s’adresse aux mineurs ou qu’elle touche les mineurs, notamment (...) sur les sites Internet», ajoutant, comme «mise en œuvre possible»:
En clair: pas de pub pour les clopes, si on ne peut pas s'assurer qu'un mineur ne tombera pas dessus. Or, aucun détail sur ce que peuvent être les mesures en question, sur le plan technique ou même légal. Le porte-parole du comité «Enfants sans tabac», Markus Meury, confirme que l'association n'a rien à communiquer de plus à ce sujet et qu'il revient maintenant au parlement de préparer la loi d'application de l'initiative. L'idée générale étant:
Au parlement, justement, le conseiller national Gerhard Andrey (Les Verts/FR), qui a co-fondé l'agence digitale Liip, est d'avis que la mise en pratique de l'initiative est «assez facilement réalisable». Selon lui, «les plateformes ont déjà maintenant la possibilité technique de cibler leurs publicités selon les régions et les catégories d'âge».
Il s'agira simplement pour elles de respecter la loi. «Il faudra un organisme de contrôle», ajoute-t-il, «je pense d'ailleurs que cela se fera via une auto-règlementation de la filière et que celle-ci sera relativement légère».
Quant à Google Ads, le service de pubs proposé par le géant américain, très utilisé par des sites et des blogs en Suisse, cela ne devrait pas poser de problèmes particuliers selon lui: Google ne fait que mettre à disposition ce service, c'est ensuite aux diffuseurs d'en assumer la responsabilité.
«Bien sûr, il y aura toujours des effets secondaires, avec des enfants qui se retrouveront devant une page ouverte sur l'ordinateur de leurs parents», modère le politicien. «Mais c'est exactement comme avec les journaux papier sur abonnement.» Or, c'est bien ça le problème: l'initiative n'interdit pas seulement les réclames qui ciblent les jeunes, mais bien toutes celles qui peuvent les atteindre (art. 118, al. 2, let. b du texte).
Le travail des chambres fédérales reviendra in fine à décider dans quelle mesure c'est une interdiction totale de la publicité pour le tabac qui devra être obtenue dans les faits. Les initiants (soutenus notamment par le corps médical et les grandes organisations de la santé), qui ne se cachaient pas d'avoir cet objectif en tête, doivent s'en réjouir.