Pour Antoine*, cela a été une évidence. Dès le début de l'invasion russe en Ukraine, ce Romand, au passé militaire, a utilisé ses connaissances à l'étranger pour entrer en contact avec des combattants ukrainiens. Son objectif? Aider les civils à résister à l'armée de Poutine. «Je me suis demandé ce que je pouvais apporter et je me suis investi comme spécialiste explosifs, piégeage et sabotage», confie-t-il par téléphone. Il explique:
Le Suisse reconnaît également admirer la force de résistance ukrainienne. «Ils sont très héroïques, c'est un élan de vie jamais vu, ils ont freiné les Russes alors qu'on ne leur donnait pas beaucoup de chances.» Désormais, il réfléchit en permanence à des idées pour aider la guérilla ukrainienne. «C'est devenu omniprésent, je fais ça la nuit après le travail.»
Antoine a donc rejoint un groupe secret d'une petite dizaine de spécialistes européens qui conseillent les combattants à distance. Par messagerie sécurisée, ils communiquent avec les forces territoriales - des volontaires engagés pour défendre le pays - et leur transmettent des tutoriels qui sont ensuite traduits en ukrainien. «L'objectif, c'est de donner des idées, des outils aux gens pour les aider à résister.»
Et tous les moyens sont bons pour ralentir l'avancée russe. Au début, le Suisse a notamment proposé des solutions pour améliorer les célèbres cocktails Molotov en y ajoutant du Sagex. «Cela va créer une masse collante qui va s'accrocher à l'objectif et cela sera beaucoup plus efficace», détaille-t-il.
Le Romand a aussi développé des tutoriels expliquant comment associer un détonateur artisanal à la charge explosive des nombreuses roquettes russes, non explosées, pour tendre des embuscades aux tanks ennemis. Antoine précise la stratégie:
Toujours pour ralentir les blindés, le groupe d'expert a proposé une autre solution concrète. «Ils consomment 300 litres au 100 kilomètres donc les Russes se sont mis à voler le carburant des particuliers. Alors, on s'est dit qu'il fallait piéger ces réserves», raconte le Suisse. Mais pour que la guérilla soit vraiment efficace, la difficulté est de trouver des moyens simples et accessibles à tous de parvenir à leurs fins.
Dans le cas présent, ce sera en mélangeant une huile végétale au carburant. Dans d'autres cas, ce sera en ajoutant de grandes quantités d'un médicament courant dans la nourriture que l'envahisseur pille sur son passage. «Ce n'est pas très joli à dire, mais cela détruit le foie», souffle Antoine.
D'ailleurs, comment le Romand vit-il le fait de participer à tuer des soldats russes?
Antoine assure également ne pas craindre d'éventuelles poursuites pénales en Suisse, même s'il a conscience que son engagement pourrait s'avérer illégal vis-à-vis du droit helvétique. «J'assume ce que je suis en train de faire. J'ai mon âme et conscience pour moi.»
Le Romand reçoit régulièrement des retours de ses contacts ukrainiens, mais reconnaît qu'il est difficile de voir clair au milieu de toutes les informations venant du front. «J'espère que nos conseils apportent des résultats. Mais, je n'ai aucun moyen de faire la différence entre leur enthousiasme et la réalité.»
Si Antoine a accepté de témoigner, même anonymement, c'est qu'il espère inspirer d'autres personnes qui pourraient apporter leurs compétences à la résistance ukrainienne. «Par exemple, dans le paramédical. On pourrait imaginer des tutoriels pour expliquer aux civils comment soigner les blessures de guerre.» Il exemplifie:
*Prénom d'emprunt