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Train CFF Bienne-Belfort: «Huit mois pour trouver une solution»

Inauguration en gare de Delle le 6 decembre 2018. Les invites a la gare de Delle avec les deux trains français (gauche) et suisse. La reouverture de la liaison ferroviaire franco-suisse Delle-Belfort  ...
Delle, 6 décembre 2018: inauguration de la ligne Delle-BelfortImage: KEYSTONE/BIST

Crise ferroviaire franco-suisse: «On a huit mois pour trouver une solution»

Va-t-on vers un divorce définitif entre les partenaires suisses et français de la ligne de train Bienne-Belfort qui mène à Paris? watson a posé la question de part et d'autre de la frontière.
16.08.2023, 05:5017.08.2023, 13:01
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Dans les couples, on appelle ça «faire un break». Eh bien, c’est ce que font les partenaires suisses et français de la ligne ferroviaire Bienne-Belfort. Il faut à présent éviter que le break se transforme en divorce. «On a huit mois pour trouver une solution», prévient le conseiller aux Etats jurassien Charles Juillard, membre de la commission des transports et des télécommunications au parlement, à Berne.

«Nous voulons faire appliquer la loi française»

Bref rappel des faits: début août, la région Bourgogne-Franche-Comté provoquait la consternation en annonçant qu’à compter de décembre 2025, le train suisse reliant depuis 2018 Bienne à Belfort s’arrêterait à Delle, côté français, à la frontière du canton du Jura. Dans ce dossier aux multiples facettes, la région en question «veut faire appliquer la loi française», indique à watson le premier vice-président de Bourgogne-Franche-Comté, chargé des mobilités, Michel Neugnot.

La loi française, c'est-à-dire? Les explications de Michel Neugnot:

«Aujourd’hui, la France permet à une entreprise, française ou étrangère, d’exploiter une ligne ferroviaire, dans le cadre d’un service dit librement organisé. Les CFF peuvent donc exploiter la ligne jusqu’à Belfort, mais à leurs frais, comme le font des entreprises italiennes ou espagnoles présentes sur le réseau hexagonal.»
Michel Neugnot

David Asséo, le délégué aux Transports du canton du Jura, confirme à watson que ce type d'exploitation a été proposé aux Suisses au printemps dernier. Il développe:

«Nous ne nous y attendions pas, le partenaire français n’avait jusqu’alors jamais évoqué cette solution. Nous ne l’avons pas retenue. Nous nous situons dans le cadre d’un trafic régional organisé par des pouvoirs publics, les CFF pour la Suisse, la région Bourgogne-Franche-Comté pour la France, avec une ligne qui n’est pas rentable.»
David Asséo

La ligne Bienne-Belfort

Image
source: République et canton du jura

Dans le cadre du plan «Convergence 2026» soumis aux Français pour sortir «par le haut» d’une situation ne satisfaisant aucune des parties, les Suisses proposaient d’exploiter la ligne Bienne-Belfort jusqu’à Belfort ville, le terminus, et non plus seulement jusqu’à Belfort TGV. Avec introduction de l’horaire cadencé à la demi-heure. Ils entendaient, comprend-on, faire preuve d’efficacité en proposant un service que les Français ne semblent pas en mesure de fournir actuellement.

Ce qui ne marche pas

Le chargé des mobilités Michel Neugnot ne prend en compte que les intérêts français dans l'affaire. «L’actuel ligne Bienne-Belfort a trois fonctionnalités: amener les voyageurs suisses à la gare TGV de Belfort; le trafic des passagers entre Belfort ville et Belfort TGV; le trafic des travailleurs entre Belfort ville et Delle.»

Or, au moins deux de ces trois fonctionnalités ne donnent pas satisfaction. Premièrement, trop peu de Suisses empruntent la ligne pour gagner la gare TGV de Belfort – la faute à la partie helvétique qui n’a pas introduit de trains directs, déplore Michel Neugnot. Ensuite, le trafic des travailleurs reste très faible entre Belfort ville et Delle. C’est pour l’accroître que le partenaire suisse proposait sa formule d’horaire cadencé à la demi-heure.

Dialogue de sourds

Michel Neugnot ne croit pas à cette formule. «Nous privilégions l’intermodalité, qui comprend le trafic ferroviaire, le trafic de bus et le covoiturage», dit-il. Le conseiller aux Etats jurassien Charles Juillard est sceptique:

«Venez le matin à l’entrée du tunnel sous les Rangiers dans le sens Porrentruy-Delémont, et en fin d’après-midi dans le sens inverse, le covoiturage ne semble pas être la règle chez les frontaliers français»
Charles Juillard

Pour le sénateur suisse, cela tient en partie à une question de mentalité: «La région de Belfort c’est celle des usines Peugeot-Citroën de Sochaux et Mulhouse, la voiture a ici un côté identitaire marqué.»

Huit mois

Tout cela ne dit pas ce qu’il adviendra de la ligne Bienne-Belfort. On sait que les trains suisses devront interrompre leur route à Delle, la partie française l’ayant décidé. Mais est-on sûr que la partie suisse voudra encore aller jusqu’à Delle? Peut-être décidera-t-elle de s’arrêter à Boncourt. D’où la mise en garde de Charles Juillard: «Nous avons huit mois pour trouver une solution.» Pourquoi huit?

«Parce qu’il faudra ensuite au moins quinze autres mois pour élaborer un horaire auquel on pourra se tenir avec certitude»
Charles Juillard

Les discussions devraient donc reprendre entre Suisses et Français. Ces derniers sont-ils définitivement fermés à l’idée de voir des trains suisses circuler au moins jusqu’à Belfort TGV? Pourraient-ils y consentir à condition que les Suisses veuillent bien envisager la possibilité d’un direct depuis Delémont? La ville de Porrentruy, en Ajoie, ne dirait pas «non» à cette option, elle qui n’est reliée au chef-lieu jurassien que par des omnibus.

Un compromis sera peut-être trouvé. Charles Juillard, président du groupe d’amitié entre les parlementaires suisses et français, pourrait agir dans la coulisse en ce sens.

La Franche-Comté laissée pour compte?

Le Mouvement Franche-Comté entre dans la danse. Cette structure régionaliste n’a jamais avalé la fusion de la Franche-Comté avec la Bourgogne en 2015 – «c’est comme si on décidait d’autorité de fusionner Genève et Vaud», compare son président, Jean-Philippe Allenbach, joint par watson. Il est le fils de feu Jean-Pierre Allenbach, animateur vedette à «Radio Genève» dans les années 1960.

Dans un communiqué daté de ce mardi, le Mouvement Franche-Comté et son président affirment:

«La décision d’interrompre la ligne Bienne-Belfort à Delle n’aurait évidemment jamais été prise si la région de Franche-Comté existait encore aujourd'hui, avec ses propres élus et son propre budget»

Voilà qui est dit.

Changement de train dans un tunnel à 7h du matin
Video: watson
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