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Psychisme et pandémie: pourquoi les jeunes femmes souffrent le plus

Les conséquences de la pandémie ne touchent pas que les enfants et les adolescents.
Les jeunes adultes aussi ont été frappés de plein fouet.Image: shutterstock
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Psychisme et pandémie: pourquoi les jeunes femmes souffrent le plus

Depuis le début de la pandémie, l’état psychique des jeunes femmes notamment a continué à se détériorer. Ces dernières sont davantage sujettes au stress lié au travail et à la pression de la performance que les jeunes hommes. Pourquoi cet écart?
27.09.2022, 11:06
Sidonia Küpfer
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Dans le cadre de ce blog, différents aspects de la nouvelle étude sur l'état de santé de la population suisse sont mis en lumière.

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Les conséquences de la pandémie ne touchent pas que les enfants et les adolescents. Les jeunes adultes aussi ont été frappés de plein fouet. Le troisième sondage effectué depuis mars 2020 dans le cadre de l’étude sur la santé CSS montre qu’au sein de cette tranche de la population, le bien-être psychique est aujourd’hui plus affecté qu’au beau milieu de la pandémie, alors que nous avons en grande partie retrouvé une vie normale.

L’isolement, qui a duré des mois, a particulièrement marqué les jeunes de 18 à 30 ans. Ces derniers disposent de moins de stratégies pour gérer la situation et dépendent davantage des échanges sociaux que les adultes plus âgés, dont la vie est stable.

Conséquence: «chez les jeunes hommes, nous observons plus souvent une dépendance aux jeux vidéo, tandis que les jeunes femmes souffrent davantage de troubles alimentaires et d’une dépendance aux réseaux sociaux. En résumé, les jeunes ressentent nettement plus d’angoisses. La tentative de mettre ces angoisses de côté et de réduire le stress grâce aux jeux vidéo et aux réseaux sociaux produit malheureusement souvent l’effet inverse à moyen et à long terme», explique la psychiatre et psychothérapeute Rosilla Bachmann.

Le fait que les jeunes en particulier souffrent de plus en plus de problèmes psychiques est aussi lié au monde du travail: dans l’enquête, ce sont surtout les personnes âgées de 18 à 30 ans qui ont considéré que la charge professionnelle et le manque de perspectives étaient le plus grand risque pour leur santé.

Ces peurs de l’avenir n’ont rien de surprenant, puisqu’il nous faut faire face actuellement à plusieurs crises: la pandémie, mais aussi le changement climatique, la guerre en Ukraine ou la crise de l’énergie esquissent un sombre tableau. En outre, le fossé grandissant entre riches et pauvres, l’effondrement de la classe moyenne et la précarité de l’emploi montrent à la jeune génération qu’elle ne vivra pas forcément mieux que la génération d’avant. Ce récit a fait son temps.

Plus de femmes que d’hommes touchés

L’écart entre les genres mis en évidence par les résultats de l’enquête est particulièrement frappant: les jeunes femmes rapportent plus souvent que les jeunes hommes une détérioration de leur état psychique depuis le début de la pandémie. Aujourd’hui, 55% des jeunes femmes affirment que leur bien-être psychique est perturbé ou moins bon qu’avant. L’année dernière, ce chiffre était déjà très élevé, puisqu’il atteignait 49%.

Qu’est-ce que cela veut dire? Ce résultat ne doit rien au hasard. L’étude sur le stress 2021 de Pro Juventute attirait déjà l’attention sur ces différences: par rapport aux jeunes hommes, les jeunes femmes se sentent plutôt épuisées et perçoivent plus le stress comme une charge.

D’autres caractéristiques utilisées dans l’étude de Pro Juventute comme indicateurs de santé mentale montrent également des niveaux de stress nettement plus élevés chez les jeunes femmes. La différence la plus importante concerne l’estime de soi, qui est plus souvent moins bonne chez ces dernières. De plus, elles font état d’un bien-être moins élevé et d’une moins grande auto-efficacité et se sentent plus souvent en échec.

Psychisme et société

Tant les résultats de l’étude sur la santé CSS que de l’étude de Pro Juventute suggèrent que l’explication réside dans des conditions sociétales. «Les jeunes femmes ont plus d’angoisses notamment parce qu’on attend plus d’elles», explique la psychiatre Rosilla Bachmann.

La pandémie n’a pas entraîné un assouplissement des rôles masculins et féminins. On observe plutôt une «retraditionnalisation». Ce sont toujours les femmes qui assument la majeure partie du travail non rémunéré. Et comme auparavant, elles doivent en faire davantage au travail pour être prises en considération. Les jeunes femmes âgées de 25 à 30 ans se voient souvent confrontées à la question de fonder une famille, et certaines se demandent comment y arriver au vu de toutes les contraintes.

Etant donné que les modèles traditionnels de rôles continuent d’avoir un impact et que la Suisse connaît dans le même temps un retard important en matière de garde d’enfants, il n’est pas surprenant que la pression sociétale en matière d’attentes touche surtout les femmes.

Vous sentez-vous sous pression pour être toujours en bonne santé et performant/e?
Vous sentez-vous sous pression pour être toujours en bonne santé et performant/e?

Cette conclusion explique le fait que, dans l’étude sur la santé CSS, près de 85% des femmes âgées de 18 à 30 ans déclarent être sous pression pour être toujours en bonne santé et performantes. Les hommes de la même catégorie d’âge sont nettement moins nombreux dans ce cas (49,8%).

Plus les personnes vieillissent, plus cette pression diminue et plus les différences s’effacent entre les genres. Ce n’est toutefois pas une raison de souffler. Rosilla Bachmann souligne que les problèmes psychiques se manifestent souvent dès le plus jeune âge:

«Si de plus en plus de jeunes femmes sont soumises à une telle pression de la performance et à un stress chronique, il est très probable qu’elles soient tôt ou tard confrontées à une dépression, à un trouble anxieux ou à une autre maladie psychique.»

C’est pourquoi il est si important de réagir et d’intervenir rapidement.

Instagram, un monde illusoire

Outre le monde du travail, il existe un autre domaine qui affecte la santé mentale des femmes beaucoup plus que des hommes: le rôle des réseaux sociaux, en particulier des applis photo comme Instagram, qui ont un impact négatif sur l’image corporelle des jeunes femmes et, plus généralement, sur leur psychisme.

Rosilla Bachmann a observé que, pendant le coronavirus, les adolescentes ont connu davantage de troubles alimentaires, notamment parce qu’elles ont passé plus de temps sur les réseaux sociaux en raison de leur isolement et qu’elles ont davantage dévoilé leur vie en ligne. «A cause de cette omniprésence du numérique, de nombreuses femmes se sont focalisées de façon obsessionnelle sur l’exercice physique et l’alimentation et sont tombées dans un cercle vicieux d’auto-optimisation.»

Entre exploitation de soi et burn-out

Le stress croissant dans le monde du travail et la pression normative émanant des réseaux sociaux affectent particulièrement les jeunes femmes. Le fait d’avoir beaucoup de choix dans notre société donne certes des opportunités, mais augmente aussi les craintes de ne pas réussir ou de rater quelque chose d’important, surtout chez les femmes.

Tout cela se passe dans un système de valeurs sociétales basé sur la pression de la performance, qui sous-estime le travail non rémunéré et occulte les conséquences négatives sur la santé mentale.

Blog CSS, Graphique burn-out
Image: css

L’étude de la CSS montre clairement où cela peut mener pour toutes les tranches d’âge: 10% des personnes interrogées affirment avoir déjà été confrontées au diagnostic de burn-out. 12% estiment avoir été atteintes d’un burn-out sans qu’un diagnostic ait été posé. Les 36 à 65 ans affichent les valeurs les plus élevées: plus d’une personne sur quatre affirme avoir traversé un burn-out, qui a été diagnostiqué dans 13% des cas.

Etant donné que le burn-out est souvent un euphémisme pour parler de dépression, il faut demander de l’aide à temps (cf. encadré). Le fait que les gens, et en particulier les femmes, soient confrontés à la pression de la performance dès leur plus jeune âge et que leur état psychologique se détériore n’est malheureusement pas de bon augure pour l’évolution future de la santé mentale, surtout si les rôles traditionnels continuent de se perpétuer, si les médias sociaux peuvent nuire à l’estime des jeunes et si la pression concurrentielle, professionnelle ou privée ne cesse d’augmenter.

Les signes d’alerte

A partir de quand les angoisses deviennent-elles pathologiques? Quand souffre-t-on juste d’une baisse de moral, et comment faire la différence avec une dépression? La frontière entre santé psychique et maladie psychique est floue. Pour les jeunes en particulier, plus on intervient tôt, mieux c’est. La psychiatre et psychothérapeute Rosilla Bachmann présente des signes d’alerte typiques chez les jeunes adultes:

  • Si les soucis et les angoisses sont de plus en plus dominants dans votre vie.
  • Si vous ressassez des choses pendant la nuit ou tôt le matin et que des pensées négatives vous hantent.
  • Si, en conséquence de cela, vous ressentez davantage de fatigue et d’épuisement.
  • Si vous évitez consciemment les situations qui vous font peur.
  • Si vous développez un comportement compulsif. Si vous n’arrivez plus à vous concentrer.
  • Si vous vous dévalorisez et que vous doutez fortement de vous.
  • Si vous négligez vos contacts sociaux et que vous vous mettez toujours plus en retrait.
  • Si vous n’avez plus le contrôle de votre consommation des médias (jeux, réseaux sociaux, etc.) et que vous négligez ainsi des activités importantes.

Dans tous les cas, une chose est claire: n’attendez pas trop longtemps pour demander de l’aide. Par exemple, une personne qui souffre d’angoisse ressent les émotions qui en découlent de manière très prononcée, ce qui nuit fortement à son quotidien et à sa qualité de vie. Sur le site Internet de «Comment vas-tu?», une campagne de Promotion Santé Suisse, vous trouvez une vue d’ensemble des différentes offres de conseil. Ici, vous pouvez rechercher spécifiquement des psychiatres et des psychothérapeutes.

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