Ce dimanche soir, Brendan Fraser a été sacré meilleur acteur durant la 95e cérémonie des Oscars pour son rôle dramatique dans le film The Whale de Darren Aronofsky où il incarne un personnage souffrant d'obésité morbide. Il remporte ainsi le trophée le plus prestigieux après avoir été également récompensé aux Critics Choice Awards où l'acteur avait tenu un discours terriblement émouvant en faisant un parallèle avec le personnage qu’il incarne dans The Whale et sa propre vie.
Malgré une concurrence certaine avec Austin Butler métamorphosé en Elvis Presley, Brendan Fraser a été récompensé pour le rôle le plus dramatique de sa carrière. A la fois incrédule et ému en recevant sa statue dorée, l'acteur a déclaré avec humour:
Une sortie faisant référence au succès de Everything Everywhere All At Once qui a remporté sept statuettes. Lors de son discours, l'acteur que les plus de 30 ans ont connu en parfait aventurier dans le rôle de Rick O'Connell dans La Momie, a exprimé sa gratitude pour le réalisateur de Requiem For a Dream et Black Swan. Un discours prononcé avec les yeux humides sans se laisser trop aller à l'émotion. Faisant notamment de nombreuses références marines, il évoque le jeu de sa partenaire Hong Chau en ces mots:
Il évoque également le passage à vide qu'il a connu durant sa carrière, le laissant près d'une décennie loin du grand écran. Un retour en grâce dont le comédien à bien conscience.
Un retour qu'il ne partage pas seul. En effet, Ke Huy Quan, qui avait disparu des écrans depuis plus de 20 ans, a été également récompensé pour le meilleur second rôle dans Everything Everywhere All At Once. L'ironie du sort veut que les deux acteurs aient déjà joué ensemble, en 1992, dans le film California Man.
Début des années 2000, Brandan Fraser est au sommet de sa carrière. La consécration lui vient avec la superproduction La Momie de Stephen Sommers qui l'a propulsé sur les rangs des acteurs les plus bankable d'Hollywood.
L'acteur canadien connaitra pourtant une véritable traversée du désert pendant près d'une décennie. Il a désormais 54 ans et n’a plus cette apparence idéale qui répond aux diktats d'Hollywood. Aux yeux du public, la star fut surtout un corps d'Apollon doté, accessoirement, d’une sympathique personnalité.
Il refait néanmoins un retour en grâce dans le film The Whale de Darren Aronofsky. Le réalisateur n'est d'ailleurs pas à sa première résurrection puisqu'il avait déjà réhabilité Mickey Rourk en 2008 avec The Wrestler où l'acteur, qui fut autrefois une icône dans les années 80, a reçu une nomination aux Oscars pour son rôle de catcheur vieillissant. Mais qu'est-ce qui a poussé Brendan, cette vedette que tout le monde aimait, à se retirer de la vie publique? C'est du côté de la face sombre d'Hollywood qu'il va falloir chercher.
En 2017, lors l'émergence du mouvement #MeToo et les scandales liés à l'affaire Harvey Weinstein, Brendan Fraser s'est joint au mouvement en affirmant avoir lui aussi subi une agression sexuelle de la part de l'ancien président de l'Association hollywoodienne de la presse étrangère (la HFPA) décidant chaque année des nominations et attributions des Golden Globes. Les faits se seraient déroulés au cours de l'été 2003.
À la suite de cet évènement, il décide de taire son agression, craignant que cela puisse nuire à sa carrière. Mais profondément traumatisé, Brendan sombre dans une dépression amplifiée par un divorce et les nombreuses douleurs liées à la violence des cascades qu'il effectuait lui-même lors des tournages des films La Momie, lui imposant de longues périodes de convalescence. Il restera en retrait des studios pendant près de sept ans, prendra du poids et ne sera plus que l'ombre de lui-même.
L'acteur, qui fut nommé cette année pour le Golden Globe du meilleur acteur dans un rôle dramatique, a d'ailleurs déclaré en novembre dernier dans une interview au magazine GQ qu'il boycotterait l'événement.
The Whale est en salle en Suisse romande depuis le 8 mars. La majorité des critiques outre-Atlantique sont dithyrambiques face à ce qui est une performance magistrale. Une performance qui entre désormais dans l'histoire. Alourdi par des prothèses, l'acteur incarne un personnage obèse, qui, conscient de sa comorbidité, tente de renouer les liens avec sa fille. On imagine bien que ce rôle sur la tyrannie des apparences ne pouvait qu'habiter l'acteur. The Whale est une histoire de rédemption, tout comme celle de Brendan Fraser.