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«Beau is Afraid»: notre avis sur le film d'Ari Aster

«Beau Is Afraid»: notre avis sur le film déjanté d'Ari Aster
Pour Beau (Joachin Phoenix), la vie est un long cauchemar aussi fascinant que repoussant. Image: A24

Dans «Beau is Afraid», vous allez suivre une thérapie sous champis

Avec Beau is Afraid, le réalisateur Ari Aster propose un objet filmique non identifié aussi profond qu'absurde porté par un Joaquin Phoenix impérial. Notre avis sur ce voyage au bout de la nuit.
27.04.2023, 16:5028.04.2023, 08:58
Sainath Bovay
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Si vous ne connaissez pas Ari Aster, vous passez à côté d'un des prodiges du cinéma américain. Seulement trois films au compteur et principalement portés sur l'épouvante, il est avec quelques autres comme Jordan Peel (Get Out, Nope) ou Robert Eggers (The Light House, The Northman) à faire partie du club des cinéastes à avoir redéfini le film d'épouvante, au point de créer un nouveau genre nommé «elevated horror». Un label de qualité collé depuis quelques années à des longs-métrages horrifiques, mais artistiquement ambitieux.

Exit donc les effets gratuits et autres jump scares, avec Hérédité et Midsommar, Ari Aster a su imposer des films au climat anxiogène au point d'être parfois irrespirable, mais ne laissant personne indifférent. Cette fois-ci, le cinéaste de 37 ans est bien décidé à se débarrasser de cette étiquette réductrice du film d'horreur en misant sur la carte de l'audace, quitte à ce que ça casse. En effet, son dernier film est sans doute son œuvre la plus originale et jusqu’au-boutiste dont le revers sera inévitablement de diviser fortement le public.

Pour tout savoir sur les coulisses du film 👇

Vidéo: watson

Œdipe is your love?

Avec Beau is Afraid, Ari Aster tente cette fois-ci d'explorer le monde des névroses avec un film ambitieux, peut-être un peu trop, car avec sa durée de près de trois heures, nombreux seront les spectateurs qui souhaiteront que le voyage s'arrête. En effet, à la manière de David Lynch, il filme le subconscient avec toute son étrangeté et livre une séance d'hypnose sur pellicule qui va retracer toute la vie de son personnage de manière fantasmagorique et grotesque: de ses peurs irrationnelles à ses souvenirs d'enfance en passant par les rêves, les fantasmes, le lien familial et tout ce qui constitue les névroses de nos psychés.

Comme le chantait Sandy Valentino en 1998: «Pourquoi tout ça n'arrive qu'à moi?»
Comme le chantait Sandy Valentino en 1998: «Pourquoi tout ça n'arrive qu'à moi?»Image: A24

Le film, découpé en plusieurs actes distincts, retrace la vie de Beau, interprété par Joaquin Pheonix. Un acteur qui, au-delà d'une filmographie passionnante, a déjà fait ses preuves dans l'art de jouer la névrose, notamment dans Joker de Todd Philipps ou I'm Still Here de Casey Affleck où il jouait une version déchue de lui-même. Cette fois-ci, il incarne Beau, un personnage solitaire, timide et surtout gentil, dont la vie n'est faite que d'anxiété et de paranoïa. Atteint d'une forme pathologique d'exister et de déranger, son entourage se résume à sa mère avec qui il entretient un rapport téléphonique et son thérapeute qu'il voit en dehors de son appartement miteux, véritable forteresse de solitude au milieu d'un quartier particulièrement inhospitalier.

Si physiquement Beau approche de la cinquantaine, marqué par un front légèrement dégarni et une bedaine apparente, il est néanmoins une personne fragile où chaque centimètre qui dépasse de sa zone de confort est une source d'insécurité, à la manière d'un enfant qui aurait grandi trop vite.

Beau a peur. Il a peur de son quartier, de ce qu'il voit aux infos, des SDF qui trainent dans sa rue. Il a peur des araignées, des médicaments, de perdre ses clés, de tout ce qui l'entoure et le constitue, comme l'introspection, la sexualité (qui est probablement la cause du gonflement suspect de ses testicules) et évidemment de décevoir sa mère, l'autorité suprême qui impacte sa vie depuis sa naissance.

La Petite Maison dans la prairie après avoir pris des psychotropes
La Petite Maison dans la prairie après avoir pris des psychotropesImage: A24

Beau est simplement l'incarnation de tout ce qui compose les psychoses de la société américaine et occidentale. Le simple fait de rejoindre sa mère pour fêter son anniversaire sera le début d'une longue odyssée au royaume de la névrose, un royaume parsemé de symboles, de visions cauchemardesques et de révélations sur son passé, dans laquelle notre héros va s’en prendre plein la gueule. En effet, l’univers entier semble se liguer contre lui et son aventure n'est en réalité qu'une succession de fuites qui le mènera à la source de toutes les angoisses, aisément devinable pour tous ceux qui sont passés par la thérapie un jour (que je suggère à chacun de faire une fois dans sa vie).

La bande-annonce est ici 👇

Vidéo: watson

Beau is a fraud?

Si sur le fond, le film se veut être une séance de psychanalyse sur grand écran, il est sur la forme, un film qui ne ressemble à aucun autre, à la fois étrange, drôle et terrifiant. Le spectateur est emporté dans des extrêmes surréalistes, allant de la comédie absurde en passant par une étrange séquence d'animation apportant son lot de légèreté, avant de brutalement enchaîner le spectateur dans une ambiance anxiogène et terrifiante. À la manière d'un voyage psychotrope, le film impose au spectateur un investissement émotionnel dont le bad-trip final renvoie au malaise paranoïaque d'un joint un peu trop chargé.

Moi en PLS à la sortie du film
Moi en PLS à la sortie du filmImage: A24

Pour les anxieux, les timides et les stressés de la vie, les aventures de Beau ne paraitront pas si improbables. Beau is Afraid est une sorte d'Alice Au Pays des Merveilles dont les personnages secondaires ne sont autres que des incarnations de peurs finalement très communes. Pour peu que vous soyez consentant à l'idée de plonger dans des abîmes anxiogènes, vous en ressortirez lourd, marqué par de profondes incompréhensions et questions existentielles qui vous demanderont un certain temps de digestion. Pour les autres, il se peut que Beau is Afraid ne soit qu'un film prétentieux et indigeste d'un cinéaste qui use d'artifices pour se filmer le nombril. Ari Aster reste néanmoins l'un des rares auteurs contemporains à proposer des expériences visuelles et narratives à la fois uniques et exigeantes comme ont pu le faire avant lui David Lynch, Lars Von Trier ou Darren Aronofsky, pour ne citer qu'eux.

À vous de tenter l'expérience, vous allez peut-être voir du génie dans cette folie. Pour les autres, bon courage.

Si vous voulez du fun, allez plutôt voir «Donjons et Dragons»

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