Instagram est bloqué en Russie. Comme le rapporte l'AFP, le réseau social ne s'actualise plus depuis lundi matin 14 mars. Ce n'est que par des voies détournées, comme des accès cryptés, que l'on peut encore l'utiliser, mais tout le monde ne s'appelle pas Mr. Robot.
Selon le portail spécialisé eMarketer, alors que 7,5 millions de Russes utilisaient Facebook en 2021, ils étaient 51 millions à utiliser Instagram. L'autorité russe de surveillance des médias Roskomnadzor a banni la plateforme. Officiellement, parce que des appels à la violence contre les Russes y auraient été tolérés. Officieusement, c'est plutôt parce que la vérité sur la guerre de Poutine en Ukraine ne doit pas être rendue publique. Mais pour beaucoup d'entreprises et d'influenceuses, Instagram est un gagne-pain.
Alors que dans le pays voisin, des hôpitaux pour enfants sont bombardés, des civils meurent et des villes entières sont réduites en cendres par l'armée de Poutine, la Russie se coupe de plus en plus du monde extérieur.
Pour les stars russes, les conséquences sont concrètes. Le Daily Mail rapporte que des influenceuses pleurent le monde d'avant. Pas parce qu'elles sont punies par le Kremlin pour un engagement courageux dans la guerre de l'information – non. Simplement parce que leur réseau social bien-aimé est désormais bloqué. Une influenceuse sanglote, par exemple, dans une vidéo que le tabloïd britannique s'est procurée: «Pour moi, Instagram c'est tout, c'est mon âme. C'est avec lui que je me réveille, que je m'endors et que j'ai passé cinq putains d'années de ma vie.»
La Russe, dont le nom n'est pas mentionné, est en larmes, mais n'évoque à aucun moment les terribles atrocités commises par l'armée de Poutine. Le beau monde illusoire d'Instagram, c'est fini. Faire du shopping sur des sites de marques occidentales comme H&M, Ikea ou Nike, ce n'est plus possible.
La chanteuse Anna Ivanova, suivie par 4,4 millions de personnes sur Instagram, a fait ses adieux ce week-end avec émotion. «Des millions de stories, des milliers de posts, des milliers de moments heureux que nous avons partagés (...). Toutes ces choses ont fait de nous une grande famille Insta», a-t-elle écrit sous une photo d'elle. Avant d'ajouter: «Je suis sûre que tout ira mieux et que nous serons encore plus nombreux, mais pour l'instant, je ne nous souhaite à tous que la paix et la force de surmonter toutes ces difficultés.»
C'est un bref moment de vérité dans la réalité si molle d'Instagram. Qu'Anna Ivanova écrive «paix» à ses plus de quatre millions de fans ne va pas dans le sens de la propagande de guerre acharnée de Poutine. Toute personne qui, du point de vue du Kremlin, diffuse des fake news sur la guerre en Ukraine, risque jusqu'à quinze ans de prison.
Un post de la danseuse Liza Lukasheva peut également être interprété de manière tout aussi solidaire. Elle a fait ses adieux à ses followers devant un fond bleu et jaune.
C'est sur Telegram que se rassemblent désormais les instagrameurs russes. Mais même sur les comptes de Liza Lukasheva ou Anna Ivanova, on ne voit pas encore de rhétorique anti-guerre. Au lieu de cela, des posts inoffensifs comme auparavant – mais vus par nettement moins de personnes. (asi)