Il faut toujours capitaliser sur un succès. C'est en tout cas le crédo d'Hollywood et pas toujours pour le meilleur. Mais avouons qu'en pariant sur une télé-réalité, Netflix a dépoussiéré Squid Game avec une certaine audace. Pour les trois du fond qui n'auraient pas encore vu cette horrifique série coréenne, sachez simplement qu'il s'agit de petites gens ruinées et prêtes à tout pour se renflouer, dans de célèbres jeux pour enfants, mais aux règles mortellement simples:
Tu gagnes, t’es riche, tu perds, tu crèves.
Jeudi, Squid Game The Challenge a dévoilé ses 456 vrais candidats, venus du monde entier (mais qui parlent tous anglais, sinon c'est le bordel). L'idée, l'ambiance, les combinaisons vertes de taulards, les gardes rouges et masqués, les dortoirs anxiogènes, les épreuves ou les décors (bluffants) sont les mêmes que dans la fiction.
A un détail près: personne ne meurt.
Quand un joueur est froidement éliminé, une petite bille d'encre noire explose sous son t-shirt blanc. Pour plus de réalisme, la production leur a tout de même demandé de s'écrouler comme s'ils avaient été criblés de balles. Voilà pour l'ambiance. Enfin, on y meurt manifestement de peur, de honte, de jalousie ou de tristesse, tellement la pression semble immense. Peut-être parce que le gagnant repartira avec la modique somme de 4,56 millions de dollars.
Vous vous souvenez du défi «un, deux, trois, soleil», mené par cette poupée aussi géante que terrifiante? Dans le premier épisode, gagnants et perdants s'écrouleront déjà, en larmes et à grandes salves de «Oh my god!» américains de circonstance. Il faut dire que certains ont dû quitter leur indispensable boulot pour participer à Squid Game. D'autres comptent sur leur victoire pour rembourser la bagnole ou aider les parents à payer les traites de la baraque. Les autres courent simplement après le pactole, l'esprit un brin plus léger.
Le casting, parlons-en. Forcément pluriel et caricatural, on y découvre deux potes à la coupe mulet, un fiston et sa mère, le vieillard de la bande, le gang des mâles sportifs ou la grappe de jolies filles. Niveau caractère, welcome to l'émotif, le généreux, l'humaniste, le courageux, le fourbe, l'empathique, le bourrin, le couard, la cruelle, celle qui ne s'aime pas et, last but not least, le crâneur parfaitement imbuvable. Il s'appelle Bryton, porte le matricule 432 et collectionne les pompes et les ennemis dans le dortoir.
C'est bien simple: tout le monde veut sa peau.
Dans la vraie vie, ce garçon a 21 ans, il vit en Caroline du Sud et gère sa propre marque de fringue baptisée «Protect Your Peace». Surtout, on fait difficilement plus sûr de soi.
Du bien. Etrangement. Après avoir expédié le fait que c'est effectivement une télé-réalité, avec sa plastique plus volontiers télé que réalité, ses codes, son confessionnal, ses gros défauts et son voyeurisme légendaire, on croche. Principalement parce que les épreuves sont bien réelles. A ce point qu'il y a quelques semaines, certains participants s'étaient plaints des conditions de tournage, les comparants à «de la torture».
Assister à cette espèce d'Intervilles socio-psychologique, où la tension est au moins aussi lourde que la tirelire qui attend le vainqueur, procure une satisfaction joyeusement malsaine. C'est un plongeon, sans mouillage de nuque, dans l'abysse du cerveau humain, avec tout ce qu'il a de moins reluisant. Pas besoin d'attendre le deuxième épisode pour assister à de viles tactiques pour assassiner son prochain.
Les amitiés sont volages, les alliances périssables et la morale accessoire. D'autant que la production a eu la bonne idée de rajouter des petits jeux psychologiques entre les épreuves, offrant ainsi le choix aux candidats d'incarner le bourreau ou le sauveur du voisin.
Spoiler: pas de quartier:
Bon, il paraît qu'on n'a rien sans rien.
Et encore moins 4,56 millions de dollars.
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Les 5 premiers épisodes de «Squid Game: le défi» sont désormais disponibles sur Netflix.